Les deux "historiques" de la LCR n'ont toujours rien compris à l'offensive du voile en France

Bensaïd et Krivine, l’un, intellectuel communiste révolutionnaire, l’autre, porte parole de la LCR, voire du nouveau NPA nous offrent ensemble un recueil de textes écrits à l’occasion du vingtième du trentième et du quarantième anniversaire de mai juin 68.
Les deux auteurs,avec talent s’en prennent aux anciens soixante huitards devenus journalistes, écrivains qui continuent à ne voir dans les « événements » de 68 qu’une révolte étudiante.
Beaucoup de ces anciens barricadiers peints en vert , en rose, voire en bleu continuent encore aujourd’hui à souffrir d’une « grosse blessure narcissique ».
Daniel Bensaïd et Alain Krivine expliquent la portée de cette grève générale et l’inscrivent dans une situation nationale et internationale particulière.
La « lutte de classes ne relève pas d’une science exacte » « Chaque situation critique n’a pas une solution unique scientifiquement établie. Elle ouvre sur un carrefour de possibilités et de bifurcations »
Si la grève générale n’a pas débouché sur des changements majeurs, c’est aussi parce que toutes les conditions n’étaient pas réunies pour le passage d’une situation pré révolutionnaire à une situation révolutionnaire.

Les différents groupes révolutionnaires, sans implantation ouvrière conséquente n’ont pas pu apporter une alternative crédible dans un pays où le Parti communiste français, encore puissant et influent a freiné puis canalisé le mouvement .
Si trente ans après Georges Séguy s’interrogeait toujours « J’en suis toujours à me demander si nous n’aurions pas pu faire miueux , l’histoire a tranché : d’erreur en erreur « le parti de la classe ouvrière » n’est même plus l’ombre de ce qu’il a été .
Si Daniel Bensaïd dénonce à juste titre le concept de laïcité positive et le discours de Sarkozy à Ryad et à Latran, il continue à montrer une myopie politique étonnante quand il écrit: « Et dire que tous ces gens étaient prêts, il y a quelques années ou quelques mois encore, à partir en croisade, loi de 1905 à la main, contre quelques foulards islamiques dans les écoles. »
Comment un intellectuel comme Daniel Bensaïd peut-il nier ou travertir la réalité?: il n’ignore pourtant pas que Nicolas Sarkozy et ses amis se sont opposés au vote d’une loi d’interdiction du port de signes religieux à l’école !
S’il est effectivement nécessaire « de brosser infatigablement l’histoire à contre poil », ce n’est pas en cajolant dans le sens du poil tous ceux et toutes celles qui défendent le communautarisme…
Les hésitations et les analyses à l’emporte pièce ont causé des dégâts dans les rangs de cette organisation révolutionnaire. Des militants sont allés jusqu’à signer l’appel des indigènes de la République et même manifester avec des filles voilées, surveillées et protégées par des intégristes .
Daniel Bensaïd et Alain Krivine ont ainsi couvert de leur autorité morale des glissements opportunistes et des alliances contre-nature.
De nombreux militants LCR ont eu, eux une position beaucoup plus cohérente, comprenant clairement que les religieux, toutes obédiences confondues voulaient et veulent briser la solidarité pour la remplacer par la charité des églises et des mosquées.
Si « l’émancipation ne s’hérite pas », si « elle se conjugue au présent », elle exige des organisations qui se réclame d’elle, de la lucidité et non un opportunisme désespérant ceux là même qui attendent que l’on trace des perspectives pour mettre fin à ce système où libéralisme et communautarisme sont rois.
Jean-François Chalot
« 1968
Fins et suites »
de Bensaïd et de Krivine
Nouvelles éditions lignes
188 pages
avril 2008
12 €

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