Bande dessinée Mahomet : Merci Charlie Hebdo, Merci Charb !

Charb n’est pas ma tasse de thé : gauchiste, mondialiste, complaisant avec les forts, impitoyable avec les faibles ! Mais après avoir lu sa vie de Mahomet en bande dessinée, je m’incline !

Il a fait œuvre utile et les musulmans, au lieu de le menacer, devraient le remercier.

Le Christ jouit d’une iconographie riche. La peinture religieuse a illustré sa vie de mille manières et la sculpture aussi en porte témoignage. Pourquoi Mahomet n’aurait-il pas droit lui aussi à une iconographie qui lui serait consacrée ? Charb a réparé cette injustice !

Mahomet ne pouvait être laissé pour compte. Il mérite, à l’égal du Christ, d’être représenté. L’Occident est fasciné par l’image. Mahomet est pris dans ce tourbillon, difficile d’y échapper… Le musulman moyen, même dans les pays islamiques, a été aspiré par cet amour des images. Un détail est révélateur à ce sujet. Dans mon enfance, les parents musulmans prenaient très rarement des photographies de leur progéniture. Lorsque cela se produisait, on sentait un malaise, fait de culpabilité, gagner peu à peu comme si on transgressait un interdit. On avait, bien ancré au fond de soi, le poids de la censure. S’il y a interdit de la représentation, il ne concerne pas seulement Mahomet, mais tous les musulmans, ce qu’ils semblent avoir oublié quand on voit leur engouement pour les smartphones et autres petites merveilles créées par l’Occident ! Je me demande s’il n’y aurait pas là matière à édicter une fatwa… Après tout, on est musulman ou on ne l’est pas !

Il faut se rendre à cette évidence : Mahomet, c’est l’image ! Obsédé par son apparence, il était fou de son corps. Il maquillait ses yeux, teignait ses cheveux et sa barbe, faisait sa raie au milieu, et non sur le côté comme les juifs. Il était très pointilleux sur l’hygiène. Le soin du corps est codifié à l’extrême dans le coran ; ce que certains appellent le « coran des latrines ». Les actes les plus intimes (toilette du corps, ablutions, positions à adopter pour la miction et la défécation, lavage des parties intimes, etc.) y sont détaillés avec crudité. On ne trouve rien de tel dans la vie de Jésus, pauvre hère sans feu ni lieu, jeté sur les routes et en butte à la cruauté de ses contemporains.

On peut dire que Charb rend un bel hommage à Mahomet dans son souci du corps et de l’apparence, comme s’il avait saisi ce trait si marquant de la personnalité du prophète des musulmans. Son travail iconographique, même s’il s’agit d’une modeste BD, offre à Mahomet une visibilité sociale. Ainsi, chacun pourra juger « sur pièces ».

Pour revenir sur l’interdit de la représentation, il ne touche que les musulmans, les non-musulmans ne sont en rien concernés par cette limitation. La simple logique pousse même à dire que les champions de l’image, ce sont les musulmans : dans l’islam, l’habit fait le moine. Il n’est que de voir le souci exacerbé des musulmans vivant en Occident de ressembler physiquement à leur prophète : port de la barbe, longue robe, henné et khôl pour les hommes et, pour les femmes, chignon porté bas sur la nuque, longs voiles à l’image des épouses de Mahomet. Le musulman reproduit l’apparence même du prophète, preuve s’il en est de son attachement à l’image, quand le chrétien a le souci d’imiter les vertus morales du Christ !

Pourquoi les musulmans se plaignent-ils de cette publication fidèle aux textes sacrés qui fait connaître leur prophète ? Qu’y a-t-il de mal à « voir » Mahomet dans ses œuvres ?

Leila Syam

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