Comment le pacifisme est générateur de guerre et de mort

islamreligiondepaixL’équation peut sembler hasardeuse, voire contradictoire, et pourtant, les faits (têtus cela va sans dire) l’indiquent irrémédiablement. L’idéologie et l’activisme pacifiste, bien loin de favoriser la paix, la concorde et la stabilité, tendent bien au contraire à précipiter les conflits, quasi-systématiquement au détriment du camp qui a promu la voie pacifiste, amenant souvent à leur mort. Mais le pacifisme favorise aussi très souvent le totalitarisme. Et souvent bien pire que les régimes autoritaires des siècles passés.

Je ne me mouillerais guère en affirmant que le pacifisme, aussi bien dans un sens large que plus restreint sur le plan idéologique, est fort bien de nos jours, aussi bien dans la sphère médiatique que dans l’opinion publique. J’en veux pour preuve les succès des différentes manifestations anti-guerres qui eurent lieu contre les interventions américaines en Irak et en Afghanistan ou encore le fort retentissement des manifestations contre les interventions en Libye ou en Syrie. La justesse ou l’absence de justesse de ces interventions n’est pas en cause, il s’agit seulement de constater que les oppositions à ces interventions se sont faites au nom de la paix et qu’elles eurent des succès variables, mais constants. Que dire également de ces organismes tant respectés et ayant pignon sur rue que sont la Coordination française pour la décennie de la culture de paix et de non violence ou l’Union pacifiste de France qui disposent de beaucoup de visibilité médiatique et de soutiens importants sans commune mesure avec les services qu’ils rendent à la société. D’une manière générale, il est très bien vu de se dire pacifiste. Le pacifisme incarne la douceur, la gentillesse, la morale même. Il est aussi supposé incarner une forme d’intelligence supérieure, la subtilité, la culture. Très régulièrement, il est invoqué par des personnalités politiques, intellectuelles et artistiques de premier plan. En fait, bien plus qu’une idéologie (ce qu’il est également), le pacifisme est également une doctrine, une mentalité représentative de son époque et une véritable institution de l’Occident dégénéré.

Pourtant, tout concourt à discréditer le pacifisme en tant qu’idéologie ou idéal. L’histoire du XXe siècle nous le rappelle même douloureusement. Rappelons-nous que ce fut l’esprit pacifiste adopté non seulement par des associations influentes, essentiellement d’anciens combattants et de militants de gauche, mais aussi par les dirigeants politiques de la IIIe République qui permit les différentes reculades face à l’Allemagne de Hitler (Le réarmement de la Rhénanie, l’annexion de la Sarre, l’Anschluss, l’annexion des Sudètes) et le retard irrécupérable dans le programme d’armement de la décennie 1930, mais surtout, ce qui fut bien plus grave, entretint un état d’esprit capitulard et de soumission qui allait se vérifier plus tard durant l’occupation allemande. En effet, quels furent les grands tenors de la collaboration ? Jacques Doriot était un ancien dirigeant du Parti communiste qui mena la campagne contre la guerre du Rif, Marcel Déat était un socialiste qui rédigea un article intitulé « Pourquoi mourir pour Dantzig ? » en 1939, Jean Luchaire un radical qui oeuvra activement au rapprochement franco-allemand durant l’entre-deux-guerres, Pierre Laval lui-même fut socialiste et promut systématiquement lors de son passage au ministère des affaires étrangères une politique d’apaisement et de conciliation avec l’Allemagne.

Rappelons également que certaines des grandes consciences pacifistes de cette époque furent également compromises, à des degrés divers, avec la collaboration : Francis Delaisi fut cadre du RNP et collabora à des journaux collaborationnistes comme L’œuvre, L’Atelier ou Germinal, Robert Jospin (père de Lionel) fut rédacteur à Germinal et conseiller municipal à Meudon nommé par Laval, Louis Lecoin s’opposa à la mobilisation générale et au service militaire en 1939, ce qui lui vaudra d’être emprisonné par la IIIe République finissante, le philosophe Alain signa justement le manifeste Paix immédiate de Lecoin et fut membre de la Ligue de la pensée française. Les liens entre pacifisme politique et collaboration sont donc avérés, même si, bien sûr, l’un ne résume pas l’autre et inversement.

La démonstration fut renouvelée à l’occasion de la Guerre froide et le pacifisme se compromit avec un autre totalitarisme, le communisme stalinien. Ce fut bien au nom du pacifisme et de l’antimilitarisme que le Parti communiste français axa sa propagande pro-soviétique et antiaméricaine à la fin des années 1940 et durant la décennie 1950. Créé en 1948 par d’anciens résistants de gauche pour promouvoir l’esprit de paix, le Mouvement de la paix, relié au mouvement mondial des partisans de la paix, est noyauté dès le début par les communistes et aligne ses positions sur celles de l’Union soviétique : opposition au réarmement allemand, à la CED, à l’arme atomique américaine et à la Guerre de Corée. Il participe au Congrès mondial des partisans de la paix à Paris en 1949 et lance l’appel de Stockholm de 1950 contre l’usage de l’arme atomique (américaine bien entendu). Il va de soi que l’organisation n’a jamais dénoncé l’arme atomique soviétique, les goulags et les procès politiques en Europe de l’Est, la répression sévère des émeutes de Berlin Est en 1953 et de l’insurrection de Budapest de 1956.

Lors de la décennie suivante, le pacifisme allait être le paravent de l’anticolonialisme, notamment à l’occasion de la Guerre d’Algérie qui verrait une véritable opération de subvertion antifrançaise qui allait atteindre son point d’orgue lors du Manifeste des 121 en 1960, et du tiermondisme, qui se traduirait par le soutien des élites pacifistes à des personnalités comme Fidel Castro, Che Guevara, Amilcar cabral, Ho Chi Minh, Mao et Pol Pot. Les personnalités complices de ces manipulations sont connues : Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Louis Aragon, Laurent Schwartz. Tous des personnalités de gauche peu ou prou animées par le pacifisme, et tous encore honorées actuellement. Plus récemment, le pacifisme manifesté à l’occasion de la dernière intervention américaine en Irak en 2003 a surtout permis l’expression d’un antiaméricanisme exacerbé, de l’extrême-gauche à l’extrême-droite, et a également permis de vilipender Israël et sa politique de survie tout en faisant la promotion du terrorisme du Hamas, flirtant ainsi nettement avec l’antisémitisme.

Il est donc aisé de le constater, le pacifisme en tant qu’idéologie politique a permis de cautionner les pires compromissions avec les régimes totalitaires les plus destructeurs, favorisant ainsi leurs œuvres et s’avérant donc porteur de mort. Cela est en fait parfaitement logique. En effet, on a trop longtemps pris le pacifisme pour ce qu’il n’était pas, c’est-à-dire une posture morale objective et inaliénable. En réalité, ce n’est rien de tout cela, mais un positionnement idéologique à visée politique au service de courant politique, le plus souvent de gauche mais aussi d’extrême-droite (rappelons-nous l’approbation des accords de Munich par l’Action française où l’opposition de la Guerre en Irak et à la politique d’Israel du Front national). C’est de plus une idéologie complètement artificielle, apparue à la fin du XIXe siècle pour connaitre son apogée dès le début du XXe.

Le pacifisme a été systématiquement contre-productif sur le plan géopolitique, il a toujours empêché de mener une politique extérieure cohérente en influençant bon nombre de politiques français de premier plan (Jean Jaurès, Aristide Briand, Léon Blum, Pierre Cot, Pierre Mendès-France) dans le plus mauvais sens. En effet, leurs politiques respectives ont toutes été désastreuses. Bien loin de rendre plus intelligent, plus vertueux ou plus fin, le pacifisme a systématiquement affaibli la France face à ses ennemis, l’a rendu aveugle, inefficace, lâche. Ce n’est pas un hasard si l’élite intellectuelle française céda à toutes les modes idéologiques nocives depuis 1945 (et même depuis 1940), tous furent imprégnés de ce pacifisme idéologique très agressif. En effet, bien loin d’être paisible, celui-ci s’accompagnait très souvent de diatribes violentes et haineuses contre tous les faiseurs de guerre potentiels qui étaient systématiquement l’armée française, les partisans de la Guerre contre l’Allemagne, les partisans de l’Algérie française, les Etats-Unis, Israel, jamais l’URSS, Cuba, la Chine ou les organismes terroristes palestiniens. « L’Amérique a la rage » clamait Jean-Paul Sartre à l’occasion de l’exécution des époux Rosenberg (dont on sait maintenant qu’ils étaient bien coupables d’espionnage). Les choses n’ont guère changé à notre époque qui vit les manifestations anti-américaines de 2003 ponctuées de slogans antisémites et islamistes, parfois accompagnés d’agressions. Les pacifistes ne sont donc pas toujours pacifiques, loin s’en faut.

Pire encore, le pacifisme nous empêche irrémédiablement de nous défendre contre l’ennemi objectif. Systématiquement, une nation ou une société adoptant le pacifisme comme ligne de conduite se condamne non seulement à se désarmer moralement et physiquement, mais aussi à méconnaitre le contexte dans lequel elle évolue et l’adversité à laquelle elle fait face. Cela fut déjà le cas dans les années 1930 et 1950. Feu le dessinateur Jacques Faizant avait admirablement résumé ce triste constat : « La persévérance dans l’illusion béate est la maladie héréditaire des pacifistes ». Cette remarque ô combien juste est toujours d’actualité. De la même manière que le pacifisme nous a aveuglés et fait capituler face au nazisme et au communisme, il nous aveugle et nous fait capituler aujourd’hui face à l’islam radical et conquérant. Il n’y qu’à se rappeler les multiples discours compréhensifs qui suivirent les attentats du 11 septembre 2001, la première Intifada de 2000 ou, plus récemment, les assassinats commis par Mohamed Merah ou l’attentat contre le consulat américain de Benghazi l’année dernière.

Dans tous les cas, alors qu’on était en droit d’attendre la condamnation la plus ferme et l’indignation la plus sincère, il n’y eut que des paroles d’excuse, de relativisme, d’accablement pour l’Occident (et en particulier les Etats-Unis). Du reste, les Etats-Unis eux-mêmes, qui jadis avaient su surmonter la vague pacifiste des années 1970 (devenant ainsi avec Reagan le tombeur de l’URSS dans les années 1980) cèdent également aux voies du pacifisme politique et du relativisme sous l’égide de Barack Obama qui ne cesse de se montrer compréhensif envers le monde musulman, y compris le plus radical et le plus anti-occidental. Mais le pire exemple du pacifisme se trouve évidemment en Europe et surtout en France qui, chaque jour, cède un peu plus face à, la communauté musulmane sur son propre sol et se laisse imposer des règlements coraniques, sur le halal, sur les prières de rue, sur la polygamie, sur le Ramadan. Le relativisme multiculturel et l’esprit de repentance illégitime joue bien sûr également dans cette attitude, mais c’est avant tout l’esprit pacifiste de collaboration qui pousse la France à capituler face à cette communauté religieuse. Les principes sacro-saints de la laicité sont bradés face à elle et la présence du christianisme est volontiers bafouée pour la contenter (présence de crèches dans les communes et les écoles). Cet esprit de capitulation n’empêchera nullement la conquête musulmane de l’espace public ni les affrontements intercommunautaires qui s’ensuivront, mais il favorisera notre affaiblissement et donnera de gros avantages à la communauté islamique. Et bien sûr, on retrouve de nouveau des idéologues patentés pour soutenir cette évolution, pour des raisons différentes mais tendant toujours à plus de compromission et de capitulation. Hier, les Aristide Briand, Sébastien Faure, Louis Lecoin et Pierre Laval, aujourd’hui (ou récemment) les Stéphane Hessel, Albert Jacquard, Pascal Boniface et Alain Soral, tous poursuivent la même politique avec les mêmes effets.

De toute évidence, l’histoire se répète et aucune leçon n’a été retenue. Il serait pourtant bon de le faire et de se remémorer le vieil adage latin : « Qui veut la paix prépare la guerre ».

François Préval

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