Il faut soutenir à fond l’opposition égyptienne aux ayatollahs du Caire

Si la soi-disant révolution lybienne n’est qu’un foutoir tribal mis en scène et réalisé par le plus grand réalisateur de notre époque, j’ai nommé l’inénarrable BHL (“Le Jour et la Nuit”, devinez qui des deux est en trop…), si la Tunisie, longuement formée à la laïcité, navigue mollement (pour l’instant) entre démocratie et turban, les événements égyptiens sont en revanche passionnants à observer.

C’est en quelque sorte 1792 chez nous, quand la symbiose des révoltés se fissure et, pour ce qui concerne la France, accouche de la Terreur. Les Égyptiens n’en sont pas encore là et c’est sans doute mieux pour eux. Mais on voit bien que le danger est entré sur la place (Tahir), avec les ultras portés au pouvoir, en embuscade pour réaliser leur projet dont la philosophie tient en deux mots : dictature religieuse.

Monsieur Morsi pourra louvoyer tant qu’il voudra, gagner du temps, mentir effrontément pour cacher ses intentions, la réalité est que les laïcs sont en passe de se voir définitivement privés des droits qu’ils pensaient, ayant renversé Moubarak, avoir gagnés de haute lutte.

C’est que le fond du pays égyptien, mis à part les Coptes promis au massacre et à l’exil, est authentiquement musulman, plus précisément, observant du dogme. C’est lui qui, en opposition à la ville, a porté les islamistes au pouvoir. Ce sont les millions de fellahs disséminés le long du Nil qui ont tranché, et préféré majoritairement la camisole de la croyance aux chants d’oiseaux des démocrates. Pour les faire changer d’avis, il faudrait, dans l’optique de très aléatoires scrutins futurs, une campagne de désintoxication de la taille et du poids des colonnes de Louxor, non envisageable en l’état actuel des choses.

La cité résonne pour le moment d’un affrontement qui ne dépassera guère ses limites. Certes, il y a là suffisamment de gens pour établir un front, armer des milices et se livrer au sanglant festin que les Libanais, les Soudanais, entre autres, ont eu le douloureux plaisir de partager. Un témoin-clé de cette mise en place demeure cependant à l’heure qu’il est dans une attitude d’expectative prudente : l’armée. Ici comme dans maints endroits, elle est un pion majeur dont l’intervention contre qui que ce soit suffira à éteindre l’incendie.

On peut faire confiance aux maîtres (politiques) actuels de l’Égypte pour en avoir commencé la purge. Il semble que les choses aillent moins vite qu’il y a trente ans, en Iran, mais l’Orient est un mystère suffisamment épais pour que des cerveaux d’élite comme ceux de messieurs Lévy, Boniface et consorts n’y aient strictement rien compris. Ou fassent semblant, ce qui, là, est tout-à-fait envisageable.

Les islamistes du Caire doivent encore composer quelque temps avec une opposition plus déterminée que prévu. Quand celle d’Iran fut pliée en quelques mois, celle d’Égypte paraît autrement capable de durer, à condition que la force militaire ne la réduise pas en cendres à coups de canon et de mitrailleuses. L’instauration d’une loi martiale qui ne dirait pas tout-à-fait son nom est une possibilité pour les jours qui viennent. La course de vitesse entre les deux partis, arbitrée en sous-main par les militaires, se joue maintenant sur la dernière ligne droite.

S’il reste assez de laïcs dans l’armée, la chance existe de voir les barbus se faire tailler le poil chez le coiffeur. Dans le cas contraire, la vague coranique déferlera, et nombre de nos beaux esprits “made in France” auront définitivement laissé passer l’occasion de fermer leur crachoir à stupidités. L’urgence étant, pour les lucides, de soutenir les tenants d’un bien tout simple : la liberté.

Alain Dubos.

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