Par Medias Libres le mardi 14 février 2012, 08:18 – Entrevue – Lien permanent
Medias Libres : La semaine dernière, avec votre ami Pascal Hilout, vous étiez jugé devant la 17e chambre correctionnelle de Paris. Quel est votre état d’esprit, maintenant que l’épreuve est passée ?
Pierre Cassen: Je voudrais d’abord expliquer à vos lecteurs le cheminement d’un tel procès. J’ai reçu une convocation à la Préfecture de police de Paris en janvier 2011. J’ai bien lu les textes incriminés. Je continue à trouver scandaleux que la plainte de la LDH ait pu être instruite par un procureur de la République. Je trouve insupportable, en tant que responsable de la rédaction de RL, qu’à chaque lettre recommandée que je dois aller chercher à La Poste, je me pose la question de savoir si ce n’est un nouveau procès qui nous guette, et donc qui me menace. Je trouve intolérable d’avoir déjà reçu des menaces de la part de l’avocat du maire de Trappes, de l’avocat des Indigènes de la République, et même de l’avocat de la LDH, qui nous a menacé d’un deuxième procès à cause d’une interview poisson d’avril de Tubiana. Le procès du 3 février n’est donc que l’aboutissement de plusieurs menaces juridiques qui, jusqu’à ce jour, n’avaient jamais abouti. Je voulais ajouter que, depuis près de cinq années, Riposte Laïque a publié plus de 8.000 articles, et que ce sont seulement deux articles qui, à ce jour, ont fait l’objet d’une plainte que je continue à considérer comme n’ayant aucune autre raison d’être que de nous couler financièrement.
Mais maintenant que l’épreuve est passée ?
Pierre Cassen: L’épreuve est passée, oui et non ! Il nous a fallu des heures de réunions, de préparations de ce procès. Nous avons du engager des frais pour faire venir nos témoins, et rembourser les huissiers qui leur déposent leur convocation. Même si notre avocat est un ami de la cause, il faut bien également qu’il se nourrisse, et toute peine mérite salaire. Pour une association comme la nôtre, ce sont des frais que nous devons engager, or, nous n’avons que deux types de ressources : les dons de nos lecteurs, et les ventes de nos livres, que nous produisons à des prix très bas (15 euros pour 380 pages des « Dessous du voile », par exemple). Nos adversaires bénéficient de ressources presque illimitées, par les subventions gigantesques qu’elles touchent. C’est donc David contre Goliath. Mais vous avez raison, l’épreuve est passée… jusqu’au 23 mars. Car je vous rappelle que nous avons au-dessus de nos têtes, Pascal et moi, deux mois de prison avec sursis pour lui, et trois mois pour moi, et un ensemble d’amendes et de dommages et intérêts de 158.588 euros, rien de moins. On a beau se dire que les associations anti-racistes chargent la barque pour toucher le maximum, je n’ai pas envie qu’on puisse me dire, si nous sommes condamnés à 10.000 euros chacun, qu’on a échappé au pire, car je considérerai que ce serait un véritable scandale si nous étions condamnés, en premier appel, à payer une telle somme, Pascal et moi. Nous avons travaillé toute notre vie, et ce sont des sommes d’argent que nous avons souffert pour épargner. Je trouve révoltant que Tubiana et les siens puissent oser demander les économies d’une vie de travail, sans état d’âme. Quant à la peine de prison, même avec sursis, elle me révolte au plus profond de moi-même, et je n’ai pu m’empêcher d’exprimer, à la fin de l’audience, quand le président m’a redonné la parole, mon indignation devant cette requête de Madame le procureur. J’ai eu l’impression que Pascal et moi étions considérés comme de vulgaires malfrats, alors qu’on n’a jamais causé de préjudice à autrui, et que nous faisons des personnes qui ont une éducation et le respect des êtres.
Qu’est-ce qui vous a le plus surpris, lors de cette audience ?
Pierre Cassen: Je dois dire que la chose judiciaire n’est pas mon monde. Je n’avais, jusqu’à ce jour, assister qu’aux deux procès de Fanny Truchelut, à Nancy et à Épinal. Mais là, à Paris, j’étais en première ligne. J’ai essayé de rester moi-même, mais c’est difficile quand on sent que nombre de questions sont piégées, et qu’on cherche à vous faire dire des choses pour vous enfoncer. La procureur de la République a osé parler de mes hésitations, alors que j’ai, à deux ou trois reprises, essayé de bien peser mes propos, pour ne pas donner des armes à nos adversaires. Malgré cette prudence, j’ai essayé de rester ce que je suis, et surtout d’exprimer l’intégralité de ma pensée, et de mes convictions. J’avoue que je ne sais pas tricher avec la parole, et que la langue de bois, ce n’est pas mon truc. J’ai essayé de dégager le maximum de sincérité. Après, que certains m’aient fait le coup du « faux nez », comme l’avocate de la LICRA, ou du délit d’intention, là, cela devient difficile. Si je dis que j’attaque les musulmans, je suis automatiquement inculpé, si je dis que j’attaque l’islam, on me reproche de ne pas dire que derrière l’islam, ce sont les musulmans ! Cela devient ingérable, surtout quand j’ai bien précisé la différence entre musulmanes et islamistes.
Avez vous retrouvé la même ambiance que lors du procès de Fanny Truchelut ?
Pierre Cassen: Quatre années s’étaient écoulées. Fanny, hélas pour elle, n’avait pas notre notoriété, et les soutiens que nous avions. Disons que Tubiana, déjà présent à ses deux procès, est toujours le même, et je n’en ajouterai pas davantage. J’ai eu une impression de meute, en regardant notre avocat, Joseph Scipilliti, seul, face à cinq associations, et sept avocats. Je le redis, les plaidoiries m’ont fait penser à des réquisitoires de pays totalitaires, où on peut se permettre d’énoncer les pires mensonges, les pires contre-vérités, les pires calomnies, contre un accusé, avec un seul but : l’enfoncer par tous les moyens. J’ignore si ces avocats peuvent se regarder dans une glace tous les matins, et s’ils le peuvent, grand bien leur fasse. Je continue à penser que Pascal et moi n’avons rien à faire devant un tribunal, et que Jacques Philarchein et Renaud Camus, contre qui le MRAP a porté plainte, et a vu, grâce à la procureur Anne de Fontette, cette plainte instruite, n’auront pas davantage à y faire, dans un an. Je pense réellement qu’il y a urgence, si on veut sauvegarder la liberté, et notamment la liberté d’expression dans ce pays, d’en finir avec la loi Gayssot, et d’empêcher les associations dites anti-racistes de pouvoir ester en justice, et, en outre, d’en tirer profit par les dommages et intérêts qu’elles peuvent demander. Comment une démocratie peut-elle accepter cela ?
Si vous êtes condamnés, Pascal Hilout et Vous, ferez-vous appel ?
Pierre Cassen: Nous aurons dix jours pour prendre la décision. Ma première réaction serait de vous répondre oui, car nous considérons que toute condamnation serait une injustice, et que seul un acquittement, comme pour Michel Houellebecq, nous paraîtrait correspondre à l’idée que nous avons de la justice. Mais ce sera le président, que j’ai remercié, à la conclusion de l’audience, quand il m’a redonné la parole, d’avoir su nous donner la parole, et nous écouter, et ses assesseurs, qui prendront la décision. J’ignore si le contexte politique, à un mois du premier tour de la présidentielle, pèsera. Donc, je préfère ne pas me mettre le dos au mur, et bien peser l’ensemble, avant de prendre une décision, en accord avec notre avocat, Maître Joseph Schipilliti, en qui nous avons toute confiance pour nous donner les conseils qui conviendront. Mais je suis obligé de constater, quand je vois le harcèlement que dit subir le site Fdesouche, et le procès que nous avons connu, que je crains un durcissement législatif contre la formidable liberté d’expression que représentent nos sites. Nous devrons donc prendre en compte, dans nos décisions, la nécessité de préserver l’existence de Riposte Laïque.