Les jihadistes de France en Syrie : la magnanimité trompeuse de la Turquie d’Erdogan

TERRORISME 22513 ATTAQUES-04-05-2014La Turquie a interpellé, mi-mars 2014, six personnes résidant en Savoie, dont un Algérien de 37 ans, Saleh Bou Habila. Ils faisaient route dans un bus pour s’infiltrer en Syrie et pour mener le jihad dans la région d’Alep, sous la bannière de l’Etat Islamique d’Irak et du levant (EIIL). Cet Algérien était déjà connu par le ministère de l’Intérieur depuis 2011 pour avoir organisé le recrutement et l’envoi de jihadistes en Afghanistan.

Ces hommes ont été extradés de Turquie et livrés à la France. Aussitôt, l’Algérien a été expulsé dans « son pays de naissance », l’Algérie. Il faut rappeler que l’expulsé est de nationalité algérienne, ce qui a facilité grandement la légalité de l’expulsion. Mais comment notre ministre de l’Intérieur compte-t-il agir si les jihadistes de retour de Syrie sont de nationalité française ? Que sont devenus les cinq autres jihadistes du groupe ? Pour le moment, le ministre de l’Intérieur fanfaronne en soulignant « la pertinence et l’efficacité des mesures décidées par le gouvernement ». …

Nous avons des doutes sur ces mesures qui ne sont que des rustines sur une situation grave. Nous devons traiter le problème du jihad en nous penchant sur les causes qui rongent la société française : la présence d’un islam de plus en plus radicalisé, avec la montée en nombre des mosquées qui sont des lieux d’endoctrinement, un enseignement religieux sectaire et le rôle souvent occulte joué par le salafo-wahhabisme et les Frères Musulmans, causes auxquelles il faut ajouter la lâcheté de nos dirigeants qui manquent de courage politique pour s’attaquer aux sources de cette guerre, maintenant ouverte et d’un genre nouveau, que nous affrontons.

La Turquie vient de faire un tout petit geste en remettant aux autorités ces six « Savoyards » alors que depuis le déclenchement de la guerre, la Turquie est un des acteurs-clés qui ont déstabilisé la Syrie en aidant les jihadistes à s’introduire dans ce pays, en leur fournissant un soutien logistique, du renseignement, des armes et même en faisant une razzia préméditée et gigantesque sur le potentiel industriel d’Alep et sur le pétrole syrien. La Turquie d’Erdogan se comporte en fait en État néo-ottoman, en État criminel.

REBELLES-FUSEE

Deux rebelles lancent une fusée anti-char sur les troupes syriennes à Ma’arat al-Nou’mân (province d’Idlib) (Ph. Al-Safir, 01/05/2014)

Pour l’heure, la Turquie n’a pas changé de politique envers la Syrie. Elle ne cherche pas à lutter contre le jihadisme dans ce pays mais elle surveille son propre territoire pour ne pas être contaminée par ce terrorisme à caractère religieux. Elle n’a fait cependant que céder partiellement aux pressions des Occidentaux et de l’OTAN en contrôlant l’afflux et le reflux des jihadistes européens.

La Turquie joue sa propre partition en Syrie. Si elle a fait un geste envers la France et l’Europe, cela ne l’empêchera pas de poursuivre sa razzia sur Alep afin de priver Assad de ce grand bassin de population et de lui retirer sa légitimité en le privant de ces électeurs lors des prochaines élections de juin 2014. Il s’agit d’une attaque turco-Golfe (selon le journal libanais Al-Safir) pour achever la conquête d’Alep, partiellement aux mains des rebelles et des jihadistes. La Turquie peut compter sur les légions de jihadistes qui lui sont acquises ou qui sont sous sa férule, à savoir : des Tchétchènes, des Daghistanais, des Ouzbecks (la katiba Al-Imam al-Boughari) et des Turkmènes (les légions du Sultan Mourad et du Sultan Mohammad el-Fâteh et la katiba Al-Moustanser-Billah). Il faut y ajouter le groupe de Seyf-Allah al-Chichani (le Tchétchène) lié au Renseignement turc.

Ces multiples légions qui portent des noms à connotation turque démontrent que la Turquie est impliquée en Syrie et qu’elle a des visées territoriales sur la Syrie du Nord et tout particulièrement sur Alep. Cela rappelle la tragique occupation ottomane qui a sévi sur la Syrie durant 4 siècles, de 1516 à 1918.

L’Histoire, hélas, se renouvelle, et personne ne se soucie de l’avis du peuple syrien martyrisé. L’Occident reste silencieux, sinon complice.

Bernard Dick

 

 

image_pdfimage_print