Les «Primaires» : piège à cons ?

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Je tiens à signaler à nos contributeurs et lecteurs pourquoi Lesobservateurs.ch ne parleront pas, ou très très peu, de ces Primaires en cours en France. Inutile donc de nous envoyer des articles sur le sujet et sur les combats de coqs et d’ego surdimensionnés auxquels cela va donner lieu ces prochains temps.

Je trouve le début de ce spectacle indigne de la politique et des citoyens français et pas uniquement parce qu’il y a parmi ces candidats des repris de justice, une réalité incroyable et scandaleuse. Quelle honte que d’oser simplement se présenter avec de telles casseroles derrière soi. Et pourtant ce spectacle va occuper une grande partie du monde politique, des « élites » et des médias pendant des mois.

Ce petit monde de candidats nombrilistes et hors sol et dont certains sont personnellement responsables de l’état désastreux dans lequel se trouve la France, un pays que j’ai admiré et qui était une référence centrale dès mon enfance, osent subitement venir nous faire croire qu’ils vont sauver la France et lui redonner ses rôles d’antan ; cela dans un spectacle où chacun dénie à tous les autres la moindre compétence.

Les citoyens français valent mieux qu’un spectacle aussi avilissant.

Un pays à régime politique hypercentralisé dépendant complètement d’une sorte de « sauveur », forme abâtardie de la royauté, est totalement dépassé et ne peut que contribuer à aggraver la situation, sauf miracle, auquel les citoyens, contrairement aux prétentions des roitelets candidats, ne croient plus.

Donner l’occasion à un peuple entier de se prononcer seulement tous les 5 ou 7 ans sur LE responsable suprême devant amener le pays entier vers un avenir radieux revient à se moquer du peuple et à lui assigner un rôle indigne.

Aujourd’hui, nos pays comprennent des citoyens au plein sens du terme, éduqués, informés, conscients des problèmes  et ayant même des idées et des désirs très concrets et précis sur les possibilités de leur résolution. Seuls des pays très participatifs  auront des chances d’être à la hauteur de cette fameuse montée des profanes. Si on consultait davantage les citoyens, bien des dérives destructrices seraient à coup sûr évitées. Pour leur résolution, ces moyens existent pourtant et, suivant les appellations, il s’agit du Référendum ou de l’Initiative populaire, parfois on parle même de Référendum d’initiative populaire ; dans certains régimes politiques il s’agit de deux moyens politiques totalement différents, le référendum permettant de s’opposer à des décisions du Parlement tandis que l’initiative populaire permet de partir de la base de la population qui, elle, peut précisément prendre l’initiative de faire des propositions politiques qui doivent ensuite être mises en application si elles sont acceptées en votation.

Actuellement, certains acteurs politiques français évoquent  l’introduction de tels moyens de participation citoyenne. Mais la plupart du temps certaines de ces  propositions en cours, du moins celles des pouvoirs en place, sont tellement restrictives et difficiles à mettre en œuvre qu’elles s’avèrent en fait irréalisables, et cela est sans doute voulu. Ce qui témoigne de ce qu’il y a de plus grave : une méfiance viscérale envers le peuple, les citoyens de base, qui ne peuvent qu’être irrationnels, voter avec leurs tripes, brefs incompétents; les compétences étant l’apanage de la seule énarchie et autres super-compétents. Si c’était vrai le pays ne serait  pas dans l’état où il se trouve.

Le peuple ne peut  qu’être « populiste » un des termes les plus décriés et qui sent mauvais le mépris. On n’en sort pas : c’est la méfiance envers le peuple et la crainte de ce dernier qui sont à la base de ces proposition les plus timorées. Le référendum devient alors un alibi, une façon de dire : on s’occupe de vous, pas de soucis.

Prétendre gouverner pour le peuple, au nom du peuple, pour le bien du peuple, revient en réalité à gouverner de plus en plus contre ce peuple et ses vrais intérêts. Mais à trop tendre la corde, elle risque de se casser et c’est ce qui pourrait bien arriver en France tant la situation devient explosive au sujet de certains problèmes politiques, car ces derniers sont volontiers abordés dans le sens contraire des volontés citoyennes.

Il faut en revanche signaler que du côté du Parlement français, un assez grand nombre de députés ont compris son importance  et travaillent de manière très convaincue et convaincante à des formes de référendums qui correspondent à l’état d’esprit politique défini ici. Ils ne représentent de loin pas  la majorité mais le signal semble assez fort et déjà bien partagé.

C’est une révolution cognitive qu’il faut pour éviter des révolutions politiques, qui comme chacun  sait finissent par priver de tout pouvoir ceux qui voulaient se le réserver en exclusivité.

Solution possible : un gouvernement et  un président, s’il en faut absolument un, mais alors  de nature très différente, comprenant une équipe de gens ayant un sens politique et faisant passer les intérêts de la nation avant les leurs. Pour cela il faut enfin de l’humilité, la qualité sans doute la plus rare, et une capacité d’écoute et des décisions approuvées par des majorités de citoyens.

Concrètement, cela suppose des pratique participatives référendaires régulières et sur des problèmes jugés fondamentaux par les citoyens eux-mêmes, surtout sur les problèmes les plus « chauds » et « brûlants » du moment, de ceux qui vont déterminer les grandes orientations d’un pays.  Une telle démarche fournit alors un élément déterminant  à la prise de décision :  la légitimité, ce qui manque le plus et est la cause de tant de conflits et d’échecs.

En introduisant 3-4 fois par an des consultations de ce type  sur 2-3 sujets à la fois on change totalement le climat politique, on abréagit bien des tensions, on se rapproche des citoyens et ces derniers se sentent moins  méprisés et rejetés. L’effet est garanti et d’ordre structurel. On casse aussi les sectarismes et intransigeances sectorielles, corporatives, etc.,  car les décisions correspondent cette fois aux souhaits et intérêts de la majorité, empêchant ainsi les égoïsmes des petits collectifs de bloquer et de nuire à tout le pays.

J’avais écrit un article dans ce sens dans un grand quotidien français il y a déjà plus de 20 ans.

L’intérêt, à ma grande surprise, était considérable.  Au point que j’étais invité à faire un dossier sur le fonctionnement concret et quotidien de la démocratie directe suisse pour les services de la présidence française du moment. Sans doute parce que le Président de l’époque, Jacques Chirac, avait une réelle sensibilité populaire et souhaitait associer davantage  la population à la politique. On m’avait demandé de prendre le premier contact avec l’ancien Président du Conseil constitutionnel, Pierre Mazeaud, qui avait alors été envoyé en Haute-Savoie car le président Chirac se souvenait qu’il aimait la montagne.

Mais les choses ne se sont pas très bien passées. J’ai expliqué le système politique suisse à P. Mazeaud qui a failli me mettre à la porte d’emblée en me disant qu’on n’allait quand même pas voter tous les dimanches en France comme en Suisse. J’ai juste eu le temps de lui dire que ce n’était vraiment pas tous les dimanches mais bien quatre  fois par an et sur plusieurs sujets à chaque fois, avant de prendre la porte si généreusement offerte.

J’ai quand même fait un rapport pour les services de la Présidence mais j’ai vite compris que le Président  était assez seul à vouloir aller dans le sens proposé et que le personnel politique du sommet du pouvoir était très opposé et avait visiblement réussi à dissuader le Président. J’ai tout de même reçu les remerciements de son chef de cabinet, et qui regrettait que le Président ne puisse me recevoir personnellement pour cause d’agenda surchargé.

J’ajoute ci-dessous un texte sur le thème du présent article que j’ai écrit à la suite du référendum français sur la Constitution européenne en mai 2005, Constitution qui avait donc été refusée. Mais le Président, un autre à ce moment-là, N. Sarkozy, n’en avait tenu aucun compte  et était passé outre.

Uli Windisch

http://lesobservateurs.ch/2016/10/04/france-election-presidentielle-2017-les-primaires-piege-a-cons/

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9 Commentaires

  1. Monsieur, si l’intelligence est née en Suisse, alors permettez-moi de vous dire Bravo! Votre article est en tous points d’une grande et belle intelligence et vous me semblez ne pas démériter.
    Vous avez raison de ne pas vouloir parler de- ou des- primaires à la française. Non pas que ce soit indigne des français ou de la politique, car après plus de cinquante ans d’analyse et d’étude de nos concitoyens, je pense sincèrement qu’ils ont les “dirigeants” qu’ils méritent et qui sont à l’image du français de base!
    Vous allez me trouver un peu cynique, moqueur et irrespectueux, mais auriez-vous l’amabilité de me dire comment vous, vous décririez des gens qui votent pour les mêmes sans relâche?

    • “les primaires” cette connerie nous vient encore des USA COMME LES SECTES? LES MACDO? LA THEORIE DU GENRE et nous “ancien pays des lumieres” éclairé par des bougies vacillantes maintenant nous fonçons têtes baissées dans toutes leurs conneries souveraineté quand reviendras-tu ? OUI QUAND REVIENDRAS TU (chanson de BARBARA)PAUVRE FRANCE SOUMISE A TOUT ET A TOUS LES USA L ISLAM alors que nous avons combattu hitler, nous avions interdit “mein kampt” et nous ne sommes plus foutus d interdire le coran l’autre livre de mein kampf

  2. “Si les élections servaient à quelque chose, cela fait longtemps qu’elles seraient interdites”
    Coluche

  3. Ces primaires sont de la tambouille démagogique. Elles laissent transpirer juste ce qu’il est nécessaire pour faire accroire à un choix démocratique. Dans faits vous avez le droit de choisir entre bonnet blanc et blanc bonnet !

    Par ailleurs, ni le drouate ni la gôche au pouvoir n’ont organisé de consultation populiste pourquoi devrions nous leur faire confiance ?

  4. (suite) de preuves pour les mettre en prison; ce qui est valable aussi dans le domaine judiciaire. Mais il faudrait, à ce moment là, vider une partie des prisons pour leur laisser la place.
    Aujourd’hui, on ne crache pas dans la soupe et chacun protège l’autre selon ses moyens et le résultat est devant nous.
    Le référendum de 2005 est le dernier exemple d’escroquerie de nos pseudo-représentants.
    Cordialement

    • et le même qui revient en disant la main sur le coeur le referendum, le referendum mais pour qu’il se prend je crois qu’il a la maladie d’heilzeimer il a oublié tout ce qu’il a défait, tout ce qu’il a promis il faut l’enfermer et pas au zenit où il y a encore des tas de c…qui sont allés l’écouter béatement

  5. A mon avis, les primaires sont antidémocratique : ça laisse sur le bord de la route un grand nombre de candidats potentiels probablement plus sérieux que ceux qui les organises. Avec les gamelles;;;melles…melles et les bidons attachés à leur ceinture.
    Roitelet dites-vous? C’est ce je clame depuis des décennies : la démocratie d’aujourd’hui n’est autre que la royauté d’antan coupée en rondelles et distribuées à un certain nombre de roitelets plus ou moins “importants” selon leur position dans l’échelle de la nation. d’où la razzia dans les caisses de l’état sous une forme ou une autre.
    Si on gratte un peu à la surface des politique, on découvrirai (oh surprise) suffisemment de preuves

  6. Oui comme je l’ai déjà dit à plusieurs reprises, l’honneur des marinistes est de rester à l’écart de cette mascarade.

  7. Peut être devrions nous faire notre révolution à la manière de celle du Jasmin. Mais ce serait leurs faciliter la tâche. Certains en profiteraient pour venir s emparer d un pouvoir dont ils n auraient aucun mérite cela s est vérifié en Tunisie ou le planqué.est retourne gentillement prendre possession du trône sans avoir eu à lever le petit doigt

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