A l’heure où des épouses et des mères vivent sans savoir si maris et pères rentreront d’OPEX, à l’heure où des militaires tombent pour la France ou au nom de la France, monsieur Delanoë inaugure une place Mohamed Bouazizi, du nom du jeune Tunisien dont le suicide – par le feu – avait été à l’origine du soulèvement de la Tunisie.
Est-ce à dire que la France n’a pas assez de soldats, de chercheurs, d’intellectuels, d’écrivains, d’explorateurs, de résistants, de savants, de héros à honorer ? Cela signifie-t-il qu’étant, malheureusement pour eux, de simples Français, ils n’auraient pas droit à l’admiration et à l’émotion du maire de Paris ? Il semblerait que oui. A moins qu’après avoir hébergé, aux frais des contribuables parisiens, des clandestins tunisiens, dans des hôtels, le maire de Paris, par ce geste, ne cherche à faire oublier sa connivence passée avec son camarade de l’Internationale socialiste Ben Ali ! Quant à nos soldats, hélas pour eux, ils sont basiquement, banalement français. Sans doute pas assez festifs, pas assez exotiques, pas assez multiculturellement porteurs de sens pour qu’on leur accorde un bout de rue ou un petit square.
Suis-je surprise par cette énième fumeuse initiative du maire de Paris ? Non. Un homme qui est à l’origine de Paris-Plage devrait être, à mon avis, considéré comme inapte à exercer le mandat de maire. Néanmoins, et alors que le vent tourne, lui apportant la rumeur de la lassitude et de l’exaspération des Français et des Parisiens, Delanoë se bouche frénétiquement les yeux et les oreilles. Hélas pour nous, il parle, il parle et bouge encore, ignorant, dans de consternants numéros de foire, la puissante vague qui remue ce petit peuple sans doute trop vivant et trop enraciné pour plaire à cet homme fervent partisan du multiculturalisme, de l’ailleurs, de l’Autre, de tout ce qui ne sent pas trop son Français.
Voilà l’état de la France: un pays où un vendeur tunisien est célébré et distingué, tandis que crèvent des garçons de notre peuple et que la clique de France Télévisions se vautre dans l’hagiographie de Ghesquières et Taponnier, dont peu savent encore, hélas, qu’ils sont en grande partie responsables de ce qui leur est arrivé.
Murat Yagci, Thierry Jean-Baptiste, Simah Kingue Eithel Abraham, Alan Karsanov, Cédric Crupel, Loïc Le Page, Kamel Elward, Joël Gazeau, David Poulain, Frédéric Paré, Sébastien Planelles, Pascal Correia, Stéphane Rieux, Laurent Pican, Damien Buil, Kévin Chassaing, Sébastien Devez, Damien Gaillet, Nicolas Grégoire, Julien Le Pahun, Rodolphe Penon, Anthony Rivière, Alexis Taani, Melam Baouma, Nicolas Rey, Patrice Sonzogni, Nicolas Belda, Guillaume Barateau, Anthony Bodin, Johan Naguin, Thomas Rousselle, Kévin Lemoine, Yann Hertach, Gabriel Poirier, Ihor Chechulin, Johan Hivin-Gérard, Mathieu Toinette, Fabrice Roullier, Harouna Diop, Enguerrand Libaert, Robert Hutnik, Christophe Barek-Deligny, Konrad Rygiel, Steeve Cocol, Laurent Mosic, Antoine Maury (, Lorenzo Mezzasalma, Jean-Nicolas Panezyck, Hervé Enaux, Thibault Miloche, Benoît Dupin, Jonathan Lefort, Hervé Guinaud, Clément Chamarier, Bruno Fauquembergue, Alexandre Rivière, Loïc Roperh, Cyril Louaisil, Guillaume Nunes-Patego, Matthieu Gaudin, Lionel Chevalier. Florian Morillon, Cyrille Hugodot, qui parlera de vous au-delà des trois minutes forfaitaires accordées par des Pujadas ou des Ferrari ?… 63 hommes morts en Afghanistan, et, que cette guerre soit juste ou non, 63 soldats français. 63 qui n’auront pas eu l’honneur de coller une larme à l’œil de notre maire de Paris, 63 dont la mort s’inscrit désormais sur une liste abstraite, sans visages et sans noms. 63 qui n’ont pas eu l’heur d’être nommés après chaque journal télévision, et dont les visages n’auront pas été affichés sur la place de l’Hôtel de Ville.
Si l’on fait le calcul du temps médiatique accordé à Ghesquières et Taponnier, et qu’on le compare aux quelques minutes concédées aux 63 noms précédents, on verra assez vite de quel côté penche la balance médiatique (car Delanoë n’est que cela, une marionnette médiatique en accord parfait avec son époque, une époque vaine et sans mémoire, une époque où l’on chasse Louis XIV des manuels d’histoire, au profit de la culture du Monomotapa).
Un ami, officier du Génie, m’écrit pour me crier son indignation : « Je pense que chaque soldat a aujourd’hui le coeur serré en voyant une telle mobilisation des média pour leurs collègues alors que les morts sur nos théâtres d’opération se succèdent dans la plus grande indifférence. Moi en tout cas, mon coeur de soldat est serré et lourd devant un tel déferlement médiatique. »
Pauvre peuple de France, pris en otage par des politiques crétins et irresponsables qui trahissent leurs morts au profit de la mémoire d’un vendeur tunisien (dont je déplore la mort atroce, mais qu’il me soit pardonné de pleurer d’abord les miens, frères français par le sang reçu ou versé) et par une bande de journaleux qui lui bassinent les oreilles du retour des enfants prodigues, dont la vie semble peser dangereusement plus que celles qu’ils ont mise en péril par leur inconséquence. Celles de militaires qui avant de se prendre pour les yeux et les oreilles de l’Information (au fait, quelle Information ? On a vu, depuis quarante ans, de quelle nature elle était), se contentent de faire leur travail à l’autre bout du monde, sans se prendre pour les Grands Réformateurs et Inquisiteurs de la société française.
Je pense aux enfants qui grandiront sans leur père, aux femmes qui vivront sans leur mari, aux parents qui pleurent un fils, à un pays déshonoré chaque jour par le mépris de son identité, et je songe à ce poème de Péguy… Oui, malheureux, malheureux sont désormais ceux qui meurent pour la France ou au nom de la France. Malheureux, car mourant pour un peuple dont la caste gouvernante ignore le sacrifice. Nos hommes crèvent seuls, dans la saleté, l’indifférence et le sang, tandis que Delanoé se donne de petits frissons d’émotion pseudo révolutionnaire en inaugurant une place Bouazizi… tout en refusant de donner à Robespierre le nom d’une rue parisienne ! Tandis que celui qui défend « le droit à la fête » lance par ailleurs une politique de marchés publics « en direction des entreprises, pour les inciter à mener une politique de diversité dans leur recrutement. ». En un mot, recrutons, mes amis, recrutons : mais surtout, et par pitié, ne recrutons pas ceux qui portent un nom trop français (dommage pour toi, jeune Sénégalais que tes parents ont appelé Pierre, il eût mieux valu que tu te nommes Abdoulaye), qui ont la peau trop blanche, l’air trop poli ou pas assez musulmans.
Il serait plaisant que, dans un grand coup de démence, le maire de Paris se lâche une fois pour toutes et, abandonnant sa novlangue de décérébré du XXIème siècle, dise les choses franchement. On verrait alors des panneaux quatre par quatre, dans tout Paris, annonçant, si je puis dire, la couleur , telle une Anne Lauvergeon : « LA VILLE DE PARIS RECRUTE ! MALES BLANCS FRANCAIS S’ABSTENIR » Voilà qui serait franchement bouhazizien, tunisien, égyptien, jasminien, en un mot : révolutionnaire.
Antigone