Retour sur l’ouvrage de Jacques Marseille « Du bon usage de la guerre de la civile en France »

L’historien spécialiste de l’histoire de l’économie Jacques Marseille est décédé en mars 2010. Il adhère au Parti communiste français en 1969,

Dans la réédition en 2004 de sa thèse de doctorat « Empire colonial et capitalisme français » il écrivit dans la préface : » j’ai commencé ma thèse comme communiste, je l’ai terminé j’étais à droite »

En débutant sa thèse, il voulait « démontrer la pertinence des thèses marxistes dans l’histoire de la colonisation » or, il n’est pas arrivé à montrer « que le “grand capital” s’était enrichi grâce aux colonies ». Pour lui, l’empire colonial, à compter de 1930, fut surtout « un débouché pour un capitalisme archaïque soucieux de retarder au maximum une restructuration imposée par l’évolution internationale ».

Jacques Marseille disait « garder de mon passage au PC une méfiance absolue et finalement justifiée envers la social-démocratie française. Le Parti socialiste a toujours eu cette posture anti-argent et anticapitaliste tout en faisant des promesses d’égalité qu’il a toujours trahies. […] Seule une droite assumée et fière de ses valeurs peut faire ce que le PS est incapable de faire : établir une société plus équitable ».

Dans son ouvrage « Du bon usage de la guerre de la guerre civile en France » il défend et argumente par chiffres le texte de Marc Bloch : déposition d’un vaincu, analyse chirurgicale de la responsabilité de tout le corps social français dans la défaite de 1940, des hommes et partis politiques aux organisations syndicales patronales et ouvrières, des communistes aux cagoulards.

Jacques Marseille se sentait de cœur avec cette analyse froide de la situation, une analyse qu’il étendit à aujourd’hui. Dans cet ouvrage la thèse est simple et complexe, l’histoire de France nous enseigne que les grands mouvements, la révolution, Bonaparte, la commune, n’ont d’existence que parce qu’elles ont l’assentiment populaire.

Ainsi si aujourd’hui tel Bonaparte le 18 brumaire un général se levait et parlant de l’Assemblée nationale s’écrirait “foutez-moi tout ce monde dehors” il serait probablement obéi.

Mais n’oubliant pas sa thèse, Jacques Marseille défend la politique algérienne du Général de Gaulle en relatant ses propos tenus en 1959 devant Alain Peyrefitte, propos évidemment politiquement incorrect, chacun préférant oublier la franchise du Général de Gaulle, une franchise qu’en 54 ans nous avons oubliée pour une vision lâche et sans vertèbre de la politique.

Revenons à de Gaulle « allez Peyrefitte, il ne faut pas se payer de mots, c’est très bien qu’il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des français bruns. Ils montrent que la France est ouverte à toutes les races et qu’elle a une vocation universelle. Mais à condition qu’ils restent une minorité. Sinon la France ne serait plus la France. Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne. »

« Qu’on ne se raconte pas d’histoires, les musulmans, vous êtes allés les voir ? Vous les avez regardés, avec leurs turbans et leurs djellabas ? Vous voyez bien que ce ne sont pas des Français ! Ceux qui prônent l’intégration ont une cervelle de colibri, même s’ils sont très savants. Essayer d’intégrer de l’huile et du vinaigre. Agitez la bouteille. Au bout d’un moment, ils se sépareront de nouveau. Les Arabes sont des Arabes, les Français sont des Français. Vous croyez que le corps français peut absorber dix millions de musulmans, qui demain seront vingt millions et après-demain quarante millions.

Si nous faisons l’intégration, si tous les Arabes et Berbères d’Algérie étaient considérés comme français, comment les empêcherait-on de venir s’installer en métropole, alors que le niveau de vie y est tellement plus élevé ? Mon village ne s’appellerait plus Colombey-les-deux-églises, mais Colombey-les-deux-mosquées ! »

Dans cet ouvrage Jacques Marseille imagine trois issues à cette rupture qui nous attend et cette guerre civile qui nous menace.

La première tragiquement décrite par Marc Bloch en 1940, mais pas la moins invraisemblable, est celle de « l’accommodement », les non-choix d’une société qui, face au « train d’enfer » que lui imposent les « nouvelles ruches bourdonnantes » se replie frileusement sur elle-même, cultive ses « non au monde », fait de ses peurs un modèle et de ses compromis mous un mode de gouvernement.

La deuxième issue, pas la moins improbable, est celle de « la rupture-trahison ». Une issue maîtrisée avec brio et conviction par le général de gaulle en 1958 pour imposer l’Algérie algérienne à une population qui n’y était pas encore prête.

Une issue maîtrisée avec, selon la formule de Michel Rocard « un cynisme gigantesque » par François Mitterrand pour arriver à ce qui était le plus important à ses yeux : prendre le pouvoir et le conserver. Promettre où laissez croire à ceux qui vous élisent que vous allez changer leur vie, et se soumettre parce que c’est inévitable à l’ordre économique existant sans jamais s’atteler à un nouveau projet politique tout en continuant à tenir un langage radical.

La troisième issue la plus souhaitable, mais la moins certaine, est celle d’une « rupture élan », du type de celles inaugurées par les deux Bonaparte ou Charles de Gaulle en 1940. Des ruptures affirmation qui s’appuient sur la simplicité du verbe et la rapidité de l’action. (1)*

Ainsi rappelle Jacques Marseille, sous le règne cynique de Mitterrand, le 10 mai 1981 le cours moyen des actions françaises était trois fois inférieur au niveau de 1950 ; il était en 1995 sept fois supérieur à celui de 1981 ! Durant les deux septennats de François Mitterrand, véritable âge d’or du rentier-« celui qui s’enrichit en dormant » selon le programme socialiste d’alors la valeur des actions et autres participations dans le portefeuille des ménages sera passée de 452 milliards de francs en 1980 à 5390 milliards en 1995, et l’ensemble de leurs actifs financiers de 2905 milliards à 14 356 milliards, et dans le même temps le nombre de chômeurs passait de 1 492 000 en 1980 à 3 117 000 en 1994.

Cela aurait du alerter les français sur les promesses du candidat socialiste à la présidentielle, François Hollande.

Relire quelquefois un ouvrage de sa bibliothèque peut amener des surprises. C’est en écoutant sur radio-courtoisie l’historien de la colonisation Daniel Lefeuvre ami de Jacques Marseille, comme lui et comme moi ancien membre du PCF que m’est venu l’idée de relire ce dernier pour mesurer qu’en réalité (et d’ailleurs comme le dit Marx – à chacun selon ses besoins (mais à chacun selon son travail-) dans l’économie de marché qui est la notre et qui est en réalité la seule depuis des milliers d’années (relire Fernand Braudel-Civilisation matérielle, Économie et Capitalisme, XVe, XVIIIe siècle) comment pourrons nous assurer le poids de l’immigration, au prix de quelles distorsions allons nous poursuivre la folle course des aides sociales des pseudos emplois aidés et des constructions de logements pour ces nouvelles populations prédatrices et leurs descendants.

Mais surtout, les Français vont-ils continuer à avoir le goût du travail et de la construction de leur avenir s’ils ressentent qu’en réalité ce qu’ils produisent, ce qu’ils économisent, les rêves qu’ils font pour leurs enfants vont se fracasser sur le mur de la fin de leur civilisation.

Probablement que beaucoup, tels leurs ancêtres angevins, normands ou bretons iront chercher refuge au Québec, la nouvelle France.

Michel Ciardi

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