Intervention à Vénissieux : M. Gerin, messieurs les députés, ne décevez surtout pas l'espoir que votre mission a suscité

André Gérin, je voulais vous remercier. Par votre courage, en vous appuyant sur la réalité de votre commune, Vénissieux, vous avez contribué à une indispensable prise de conscience, dans ce pays, sur le voile intégral, sa symbolique, et la réalité qu’il cache. Vous avez refusé l’intimidation du « politiquement correct », que nous avons vu immédiatement à l’œuvre dès que des dizaines de députés de tous bords ont signé votre texte.
Nous y sommes d’autant plus sensible que notre journal, Riposte Laïque, avait lancé, il y a maintenant deux ans, une pétition demandant l’interdiction du voile intégral, et l’interdiction du voile pour les mineures, et à l’université. Nous avions eu le plaisir, avec Michèle Vianès, autre initiatrice de cette pétition, de vous compter parmi les premiers signataires, ainsi que Jacques Myard, qui a longtemps été le seul député à réagir contre ces prisons ambulantes, en demandant une loi.
Nous aimons le symbole du député communiste et du député gaulliste, Jacques Myard, dans cette bataille contre le voile intégral, nous trouvons que vous incarnez parfaitement l’esprit de la Résistance qui, il y a bientôt 70 ans, a permis à notre pays d’être préservé de la barbarie nazie.
Naturellement, votre initiative a immédiatement déclenché les foudres de la bien-pensance. A écouter ces bonnes âmes, la République ne serait pas en danger pour quelques burqas égarées. On a commencé à entendre que ces tenues étaient le symbole de l’échec de l’intégration, donc de la faute de la République, bien évidemment. Nous avons eu droit aux inévitables “La France c’est le pays des Droits de l’Homme, la burqa c’est mon choix c’est ma liberté”. D’autres ont parlé d’une crise d’adolescence de quelques nouvelles converties en mal de repères.

La romancière d’origine iranienne, Chahdortt Djavann, auteur de « Bas les voiles », disait : « Les islamistes ont réussi un tour de passe-passe qui est un véritable exploit : ceux qui critiquent dans la religion ses aspects les plus totalitaires se voient traités, sous le nom d’islamophobes, de racistes et de xénophobes, au même titre que des militants d’extrême droite. Quand les mots perdent leur sens, la déraison triomphe ».
Ces dernières années, vous avez montré que vous étiez un esprit libre, et que vous n’étiez pas un homme qui se laissait intimider. Vous avez été un des rares hommes de gauche qui, courageusement, ont refusé de se taire sur la réalité de la délinquance, de plus en plus juvénile, dans les quartiers populaires. Des propos qui valaient immédiatement, de la part des petits commissaires politiques de la pensée correcte, le qualificatif de « dangereux sécuritaire, qui osait surfer sur la lepénisation des esprits ».
Vous n’avez pas hésité, bien que minoritaire dans votre parti, à voter pour une loi contre les signes religieux à l’école, alors que là encore, toute une partie de la gauche, et Nicolas Sarkozy, à l’époque ministre de l’Intérieur, freinaient des quatre fers pour s’y opposer.
Vous avez été de ceux qui se sont battus pour que le « non » l’emporte le 29 mai 2005, refusant une Europe de la concurrence libre et non faussée. Vous avez, comme nous, entendu les qualificatifs de xénophobes, lancés par des personnes qui sont aujourd’hui à la tête du Parti socialiste, ou commissaires européens UMP. Comme nous, vous enragez de voir comment des parlementaires de l’UMP, du PS ou des Verts, en ratifiant le traité de Lisbonne, ont montré leur mépris pour le vote populaire.
Grâce à vous, malgré ceux qu’Elisabeth Levy appelle les maîtres censeurs, nous avons pu entendre, au Parlement, des interventions extraordinaires, ces derniers mois. Je parlerai d’abord des organisations féministes, dont la présidente de « Regards de Femmes », Michèle Vianès, et notre collaboratrice Annie Sugier, présidente de la Ligue du Droit International des Femmes, qui ont exprimé la symbolique du voile, intégral ou pas, dans la société française.
Nous avons pu entendre les organisations laïques exiger, à l’exception d’une d’entre elles, une loi contre le voile intégral. Nous avons connu de grands moments, comme ces auditions de Sihem Habchi, présidente de NPNS, ou d’Elisabeth Badinter. Je ne suis peut-être pas le plus objectif pour estimer que l’audition, ce mercredi, de Pascal Hilout, notre rédacteur d’origine marocaine, fils d’une voilée intégrale, fut également un de ces grands moments.
Et puis nous avons entendu ceux que Jacques Myard appelle les jésuites, nous tenir le discours suivant : « Bien évidemment, le voile intégral est un symbole abominable, mais il faut faire de la pédagogie, et surtout ne pas légiférer ». Autrement dire, ne rien faire. Nous avons même entendu un président laïque nous dire que légiférer sur la burqa serait autant liberticide que l’interdiction de la mini-jupe sous les colonels grecs !
Et puis nous avons écouté les Tariq Ramadan et autres représentants du CFCM. Quel était leur discours ? « Surtout ne faites pas de loi, sinon, vous allez stigmatiser les musulmans. Laissez-nous faire, accordez-nous quelques accommodements raisonnables avec la laïcité française, bien trop stricte, prenez-nous comme interlocuteurs, et vous verrez, tout va bien se passer ». Pascal Hilout a résumé ces propos, en disant que les barbus administraient des soporifiques à Marianne.
Ce dimanche, il y a eu ce tsunami, avec le vote suisse interdisant les minarets. Exactement comme en France, lors du référendum sur le TCE, l’ensemble des médias, et la grande majorité des forces politiques, demandaient aux Suisses de voter d’une façon. Exactement comme en 2005, les Suisses, malgré les insultes contre les initiateurs du référendum, malgré les sondages, ont fait le contraire de ce qu’on leur intimait l’ordre de faire. Exactement comme en France, Libération a insulté, dès le lendemain, les électeurs, les qualifiant de xénophobes, et titrant sur le vote de la honte.
Le pompon de ce lynchage revient sans conteste à Cohn Bendit. Il est vrai que ce garçon a toujours eu un problème avec l’expression populaire. En 1968, il criait « Elections piège à cons ». Quarante ans plus tard, il glapit « Votation, piège à couillons ! ». Pour un peu, il dirait que la chienlit, ce sont les électeurs suisses ! Ce personnage, imbu de lui-même, caricature de l’idéologie libérale-libertaire, haineux avec la notion de Nation, militant pour la cause du voile à l’école, a osé demander aux Suisses de revoter ! Il a poussé l’ignominie jusqu’à recommander aux dictatures islamistes de retirer leur argent des coffres suisses ! La vraie honte, est-ce le vote des Suisses, ou bien les propos de Cohn-Bendit et des siens ?

Car enfin, qu’ont-ils fait, ces salauds de Suisse ? Ont-ils décidé de jeter tous les arabes dans le lac ? Ont-ils décidé d’interdire la pratique du culte musulman ? Ont-ils décidé de démolir les mosquées ?
Ils ont tout simplement fait passer ce message aux musulmans de Suisse : continuer à prier et pratiquer votre religion tout en restant discret et sans nous l’imposer. Acceptez nos coutumes. Les minarets ne sont pas indispensables pour cela et ils ne cadrent pas du tout dans notre paysage, culture et architecture.
Dans un pays où sévissent les frères Ramadan, ils ont voulu mettre des limites à un prosélitisme de plus en plus intolérable.
Comment pourrait-il en être autrement ? Comment les citoyens français, suisses ou européens ne seraient-ils pas excédés par cet esprit de conquête permanent, dont le voile et le voile intégral ne sont que la face visible d’un iceberg autrement plus inquiétant.
Comment la gauche a-t-elle pu accepter qu’en 1989, on recule devant trois jeunes filles voilées, à Creil, comme le rappelait devant vous Elisabeth Badinter, et que ce livre, « Les dessous du voile », écrit par notre rédaction, évoque comme le point de départ de 20 ans d’offensive islamique contre la République laïque ? Il a fallu 15 ans pour rattraper cette lâcheté ! Aujourd’hui encore, le voile est autorisé dans nos universités, quand les laïques et les féministes turques se battent pour que les islamistes ne le réintroduisent pas dans leurs universités ? Comment les citoyens de ce pays peuvent-ils ne pas être inquiets quand ils voient que dans nos hôpitaux, des médecins hommes sont parfois agressés pour avoir voulu soigner une épouse ? Imaginez l’état d’esprit des habitants du 18e arrondissement parisien quand ils voient, tous les vendredis, les rues de Barbes occupées, près de deux heures, par des prières musulmanes, avec une milice barrant la rue, avec la complicité de la police et du maire, qui fut pourtant ministre de l’Intérieur sous Lionel Jospin ? Imaginez l’état d’esprit des Marseillais, quand ils voient à quelques mètres de la Canebière, le même spectacle, qu’on retrouve à Puteaux, ville de la suppléante de Nicolas Sarkozy ? Imaginez l’état d’esprit de cet habitant qui, pas suffisamment fortuné pour avoir quitté le quartier, ne peut plus acheter une bouteille de vin ou une tranche de jambon, parce que tous les commerces du quartier doivent obéir aux interdits religieux ? Que dire de l’offensive de la viande halal dans nos cantines scolaires, des piscines réservées aux seules musulmanes à Lille, ou des mariages annulés pour cause de non-virginité, sans oublier Robert Redeker, les caricatures, les pressions subies lors du ramadan…. La coupe est pleine !
Comment voulez-vous que ces citoyens, qui ont mis beaucoup d’espoir dans la mission que vous présidez, ne comprennent pas immédiatement que le vote des Suisses est un acte de résistance contre une offensive politico-religieuses grave, que la presse et les dirigeants politiques de ce pays occultent, préférant insulter les laïques, les féministes et les Républicains qui ont l’outrecuidance de s’y opposer ?
Vous auriez tort, monsieur le député, pour rassurer les bien-pensants, de continuer à joindre votre voix à ceux qui, depuis dimanche, lynchent les électeurs suisses. Les ayatollahs du politiquement correct ne vous pardonneront jamais la liberté d’esprit qui vous a permis de mettre sur pied cette mission parlementaire, et vous allez désarçonner ceux qui vous soutiennent dans votre démarche. Pour nos adversaires, vous êtes un dangereux populiste, xénophobe et raciste, comme les électeurs suisses. Le vote des helvétiques est pourtant une aubaine pour la mission parlementaire que vous dirigez. Il vous montre que les classes populaires (il n’y a pas que des banquiers en Suisse) vous suivent, qu’elles comprennent bien mieux que les élites l’agression d’un projet policito-religieux conquérant, qui vise nos valeurs : la liberté d’expression, la séparation du religieux et du politique, le droit de croire ou de ne pas croire, l’égalité entre les hommes et les femmes, le droit au blasphème…
Vous auriez également tort de penser que c’est en vous appuyant sur les imposteurs qui se réclament de l’islam de France que vous allez réussir dans votre mission. En 2008, le cardinal Tauran s’exclamait, à Turin : « Grâce aux musulmans, Dieu est de retour en Europe ». Avez-vous remarqué avec quelle unité toutes les Eglises sont tombées sur les électeurs suisses ? Vous souvenez-vous de leur hostilité à toute loi contre les signes religieux à l’école ?
Nous avons un président de la République qui veut réinstaller le fait religieux en France. Ne disait-il pas, à Neuilly, le 20 juin 2005 : « On m’a soupçonné de vouloir instrumentaliser les Eglises. Je n’ai fait que constater que lorsqu’il y a un prêtre ou un pasteur, dans un village ou un quartier, pour s’occuper des jeunes, il y a moins de laisser-aller, de désespérance, et finalement moins de délinquance. Aujourd’hui, nos quartiers sont devenus des déserts spirituels ». Autrement dit, plutôt le curé, l’imam, le pasteur ou le rabbin que des travailleurs sociaux ou des policiers de la République.
Dans ce contexte de reconquête cléricale,bien sûr que le voile et la burqa ne sont pas seulement des signes religieux, qui véhiculent un message politique, mais ils sont aussi des signes religieux qui entendent imposer aux citoyens la visibilité de l’islam dans l’espace public, comme les méga-mosquées et leurs minarets.

Je terminerai en vous réaffirmant ô combien les laïques et les Républicains vous sont reconnaissants pour le courage que vous avez manifesté, en mettant sur pied cette mission. Mais cela implique des obligations de résultat. Si, dans quelques mois, quand vous aurez tiré les conclusions de vos travaux, les Français constatent que le voile, intégral ou pas, continue à insulter les héritières de Simone de Beauvoir, que les islamistes continuent de multiplier, en toute impunité, les provocations et les demandes d’accommodements raisonnables avec nos principes laïques, ils auront l’impression qu’on les a roulés dans la farine, avec cette mission, et ils croiront encore moins aux vertus du politique.
Nous savons que le Résistant que vous êtes, face à l’ordre dominant, souhaite une autre conclusion. Nous imaginons que vous devez subir de nombreuses pressions, notamment suite au vote des Suisses.
La République est confrontée à un bras de fer, entre les Lumières et le retour de l’obscurantisme. C’est la plus violente agression qu’elle ait subi, depuis 1905. Ce sont les démocrates de culture arabo-musulmane, hommes et femmes, qui veulent être des citoyens français à part entière, à égalité de droits et de devoir, qui ont le plus besoin d’une laïcité de combat, qui seule les préservera de la dictature des imams.
Ne reculez pas, monsieur le député. N’hésitez pas à vous appuyer sur le peuple, celui qui a voté non en 2005, celui qui tient à son identité nationale, celui qui en a marre de l’insécurité dont souffrent d’abord les plus pauvres, celui qui est frappé de plein fouet par la crise, celui qui ne supporte plus qu’on crache sur la France et qu’on siffle son hymne national, celui qui, majoritairement, appuie le vote des Suisses, celui qui en a marre de l’offensive des barbus, celui qui se voit méprisé par les élites de gauche comme de droite.
Son appui nous sera indispensable pour sauver notre pays du cauchemar communautarisme.
Nous savons que nous pouvons compter sur vous, Monsieur le député, cher André.
(applaudissements)
Pierre Cassen
Intervention faite à la tribune de la réunion publique organisée par l’ADLPF de la Vallée du Rhône, le samedi 5 décembre 2009, à 15 heures.
Intervenaient :
Michèle Picard, maire de Vénissieux
Hubert Sage, président de l’ADLPF de la Vallée du Rhône.
Michèle Vianès, présidente de Regards de Femmes
Faiza Alami, vice-présidente de Ni Putes Ni Soumises
Pierre Cassen, rédacteur en chef de Riposte Laïque
André Gérin, député du Rhône, président de la mission parlementaire sur le voile intégral

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