La polygamie en France

Ces derniers jours ont mis sous les feux de l’actualité le problème de la polygamie : une automobiliste se voit infliger un PV pour avoir conduit son véhicule en burqa. Il s’avère que son époux, naturalisé français en 1999, est soupçonné de polygamie et de fraude aux aides sociales.

Les coups de menton de Brice Hortefeux

Brice Hortefeux pique une grosse colère et demande que sa situation soit étudiée en vue de la perte éventuelle de la nationalité française . Bel effet de menton ! Destiné, bien entendu, à donner une image de fermeté qui ne coûte rien. Dans la réalité, il y a fort à parier que le mari polygame n’encourt aucune sanction, et en tous cas rien d’assez grave pour entraîner le retrait de la nationalité.
En droit français, la polygamie est le fait de contracter un second mariage sans avoir mis fin au premier. Elle est interdite par l’article 147 du Code civil : “On ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier”. Tout contrevenant encourt un an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende (article 433-20 du Code pénal). Mais cette disposition ne concerne que les mariages civils et non les « mariages » purement religieux, dont nous parlerons plus loin. Le fait de vivre avec plusieurs femmes sans être marié avec elles n’est pas répréhensible par la justice (1). Quant aux conditions de retrait de la nationalité française, elles sont elles-aussi très difficiles à remplir.
Bref, en principe, nous sommes en présence d’un coup de menton pour rien.
En revanche, il aurait été plus facile de détecter plus tôt le défaut d’assimilation de ce mari, et de lui refuser la nationalité française. Il aurait également été bien facile, avant d’attribuer des aides sociales, de vérifier que les mères avaient vraiment la qualité de parent isolé.

L’état des lieux demandé par Chantal Brunel

Plus sérieux que les coups de menton de Hortefeux :
La députée UMP Chantal Brunel a demandé samedi “un état des lieux département par département” des familles polygames afin de “permettre une analyse des prestations versées et éviter d’éventuels abus” (2).
Ancienne porte-parole de l’UMP et auteur de “Pour en finir avec les violences faites aux femmes” (éditions du Cherche Midi), Mme Brunel a souhaité, dans un communiqué, “que le gouvernement demande aux caisses d’allocations familiales de faire un état des lieux des familles polygames, département par département”.
Il s’agit, selon elle, “de permettre une analyse des prestations versées et d’éviter d’éventuels abus”. “Comme pour le port de la burqa (voile intégral), la polygamie est contraire aux valeurs de notre pays. Celles-ci doivent être respectées”, a-t-elle conclu.
Espérons que cet état des lieux sera plus sérieux que le rapport précédent, établi par Sonia Imloul il y a six mois seulement.

Rappel : le rapport pour rien de Sonia Imloul

Sonia Imloul est fondatrice et présidente de l’association “Respect 93”, une association de prévention de la délinquance des mineurs. Elle a publié, en novembre 2009, un rapport intitulé « Polygamie en France : une fatalité ? ». Elle y rappelle que la polygamie est illégale en France et dans l’Union Européenne, et constate son caractère destructeur pour les femmes et les enfants. Beau rappel juridique et moral ! Aussi beau qu’inutile, car Mme Imloul ajoute aussitôt que la polygamie est un phénomène ultra-minoritaire et formule, pour la combattre, des propositions des plus surprenantes comme une « décohabitation » qui ressemble en réalité beaucoup à une acceptation de la situation. Parmi ces mesures, dites (par antiphrase ?) de décohabitation, elle propose l’attribution d’autant de logements HLM que d’épouses, l’obtention de titres de séjour, et de la nationalité. Et comme par ailleurs il est bon pour un enfant de voir facilement son père et sa mère, les logements des différentes cellules de la tribu seront proches les uns des autres.
Vous avez dit « déhocabitation » ? Diantre ! On ne doit pas parler la même langue !

Rappel de quelques vieux principes laïques trop oubliés

La polygamie n’est punissable que s’il y a pluralité de mariages civils. Sauf dans le cas de situations familiales internationales très complexes, le cas ne se produit pas en France, aujourd’hui, car les officiers d’état-civil ont les moyens de vérifier qu’ils marient bien des personnes libres d’autres engagements. Que M. Hortefeux arrête donc de parler des sanctions que cet homme encourrait pour polygamie : vraisemblablement, si, comme il est probable, les mariages surnuméraires sont simplement religieux, il n’en encourt aucune.
Le problème du mariage religieux sans mariage civil préalable était bien connu des laïques d’autrefois. Du temps où l’Eglise catholique ne renonçait pas volontiers à ses anciennes prérogatives d’état-civil, la République savait punir sévèrement le prêtre qui s’amusait à célébrer un mariage religieux sans que les époux soient passés préalablement à la mairie.
Ce conflit de prérogatives entre l’Eglise catholique et la République est aujourd’hui bien oublié … trop peut-être, car les mariages purement religieux continuent d’exister. Simplement, maintenant, ils sont musulmans. Il s’agit d’un véritable fléau, produisant non seulement de la polygamie, mais également de la maternité célibataire : la jeune fille se croit mariée, puis, quand Monsieur veut partir sans tambour ni trompettes, elle s’aperçoit qu’elle ne l’est pas, et c’est le contribuable qui apporter de quoi vivre aux enfants.
Il serait souhaitable du punir les imams qui se prennent pour de faux officiers d’état-civil. L’article 433-21 du Code pénal punit de six mois d’emprisonnement et de 7500 euros d’amende tout ministre d’un culte qui procède, de manière habituelle, aux cérémonies religieuses de mariage sans que lui ait été justifié l’acte de mariage préalablement reçu par les officiers de l’état civil.
Peut-être faudrait-il renforcer cet article pour supprimer l’exigence que le délit soit habituel, car une fois suffit pour créer du malheur.
Catherine Ségurane
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