Libérer la parole est un exercice difficile

Parler librement est un exercice difficile. Bien que sans cesse des voix s’expriment pour dénoncer la domination de la bien-pensance, dès que l’on exprime des points de vue hors des sentiers battus, les uns sont choqués, écœurés, les autres scandalisés.

De plus, pour aggraver votre cas, si vous vous avisez de traiter d’un sujet que vous connaissez bien, mais oh combien délicat, l’exercice devient singulièrement périlleux. Tel est le cas du vaste sujet de l’immigration sous toutes ses coutures. Pendant des lustres, la gauche a réussi de faire en sorte qu’en agitant l’épouvantail du Front national, le débat soit confisqué. Toute analyse ou observation critiquant le comportement des immigrés vous reléguait immédiatement dans le camp des lepénistes, des racistes… Seuls avaient le droit de parole ceux qui prônaient le métissage, la diversité, la lutte contre les discriminations et tous ceux qui, pleins de générosité, défendaient les sans-papiers. Eux avaient le droit de parler, les autres devaient se taire.

Résultat : en 2002, Le Pen devance Jospin au premier tour des élections présidentielles. Mais visiblement la leçon n’a toujours pas été comprise.
Et maintenant que Le Pen est sur la touche, la bien-pensance a trouvé son nouveau bouc émissaire : le Sarko. c’est maintenant l’injure suprême ; si vous ne défendez pas les sans-papiers, vous êtes pour Sarko et Sarko c’est le diable, même si 53% des Français l’ont élu à la présidentielle et même si l’opinion publique continue de lui accorder un très net soutien notamment sur les questions d’immigration et même parmi l’électorat de gauche.

Pour moi, la question n’est pas là. Je n’ai envie de me ranger derrière aucune bannière et si certains ont besoin de s’accrocher à une étiquette « je suis de gauche », comme à un ex-voto, cela ne m’intéresse pas. Ce qui motive ma réflexion que j’ai livrée à Riposte laïques et qui a suscité quelques vives réactions, c’est de sortir des chemins labourés de certitude et de faire un pas de côté pour réfléchir.
Se demander, par exemple, s’il suffit de croire être toujours du côté du bien, alors qu’en réalité on ne se fait pas à son corps défendant l’allié objectif de pratiques qui sont contraires au but recherché. Il est sûr que nombreux parmi ceux qui aident les sans-papiers le font avec la foi chevillée au corps et la certitude d’agir pour le bien des peuples. Mais voilà, rien n’est moins sûr.

Car les filières pour qui l’immigration clandestine est un secteur aussi rentable que le trafic de drogues s’appuient, qu’on le veuille ou non, sur ceux qui par générosité aident les « sans-papiers ».
Quand les filières russo-géorgiennes déposent des dits “tchétchènes” devant des centres d’accueil des demandeurs d’asile, elles montrent qu’elles sont assez bien informées. En outre, de nombreux « sans papiers » vivant dans la clandestinité, réduits évidemment à la misère, à la précarité et vivant dans des taudis, auraient objectivement tout intérêt à retourner chez eux en profitant des 2000 euros accordés par le gouvernement, ce qui, au regard du niveau de vie dans les pays d’origine, n’est pas rien.(cf courrier international n°882)

Mon objectif est de faire comprendre à ceux qui en ont envie que les choses ne sont pas si simples, que l’enfer est pavé de bonnes intentions et que la liberté de penser est un droit inaliénable. Il est important que Riposte laïque soit un espace de discussion libre, et personne ne défend de discours xénophobe. Mais ne pas être xénophobe ne signifie pas de se taire, d’être pour une immigration totale, d’accepter le voile à tous les coins de rues…

Alors petit exercice pour ceux qui portent la gauche contre parapluie, étendard, ou bouclier.
C’est quoi être de gauche sur les statistiques ethniques ? Soutenues par l’institut Montaigne (libéral pro américain), par le CRAN, communautariste noir UMP financé par une fondation américaine, par une partie de chercheur de l’INED ,dont Patrick Simon assurément de gauche. “Contre” : SOS racisme de gauche, le PS dans un amendement qu’il propose à la loi Hortefeux, le PC ou ce qu’il en reste au Sénat…

Sans revenir sur le débat sur l’ADN qui va concerner une dizaine de personnes et encore mais dont la fonction est d’agiter le microcosme et ça marche bien. Mais Pasqua, Raffarin, Villepin qui sont “contre”, ils sont de gauche ?

Cet amendement est inutile et ressemble plus à une surenchère dont l’inefficacité se révèlera flagrante. D’autant plus que sont acceptés les enfants adoptés parfois même dans le cas d’un système d’adoption simple comme le prévoit les pays comme l’Algérie ou le Maroc de la kafala. Mais les belles âmes crient au scandale, dénoncent le racisme, la xénophobie : pourquoi les étrangers et pas les Français ? Il faut lire Libération du 3 octobre et les « experts appelés à la rescousse : Stomy Bugsy rappeur « une boucherie dans les familles » ; Charles Berling « On ne ferait pas ça à une famille française », Isabelle Adjani « une sorte de purification par la race »etc
Or, ce que ne savent pas ces « experts », c’est qu’en matière d’immigration, les règles ne sont pas exactement les mêmes, le concubinage par exemple n’ouvre pas les mêmes droits que le mariage.

Parce que venir en France représente pour beaucoup l’accès à un mieux être considérable même si c’est dans des quartiers de relégation comme disent les sociologues (scolarité des enfants, santé, sécurité sociale, liberté, sécurité) autant d’avantages qui suscitent bien des envies et un certain nombre de fraudes à l’état civil ou des falsifications de papiers. Il arrive que dans certains pays où l’état civil est notoirement défaillant, il soit tentant de faire venir les enfants des cousins, la notion de famille ne se réduisant pas à la famille nucléaire papa, maman et 2 enfants.
Les cas sont sans doute assez peu nombreux et le test ADN n’est sans aucun doute pas indispensable mais quand l’accès à un droit est lié à la filiation et qu’il existe des présomptions de fraude, le recours au test génétique peut être tentant, ce que font bien d’autres pays. En France, contrairement aux déclarations de nos spécialistes cités, les tests ADN existent en matière d’héritage par exemple ou de revendication de paternité. Rappelons-nous qu’on n’a pas hésité à exhumer ce pauvre Montand pour cela.
Donc encore une fois, il serait temps que la question de l’immigration puisse être traitée sérieusement sans surenchère et démagogie de part et d’autre. Je répète : de part et d’autre.

Gabrielle Desarbres

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