Martine Aubry et ses principaux adversaires donnent des gages à la Ligue islamique du Nord

Dimanche 2 mars, il est 9h30. La maisonnée n’est pas encore éveillée. Assise devant mon café noir et mes croissants, je feuillète La Voix du Nord, édition de Lille.
Soudain, page 15, surprise ! Surréalisme d’une photographie en contre-plongée montrant le recteur de la mosquée de Lille-sud, Amar Lasfar, gigantesque au-dessus de petits personnages assis en ligne et parmi lesquels je reconnais Martine Aubry.
J’y regarde de plus près. Je lis la légende sous la photo : « Les candidats aux municipales sous l’œil bienveillant de leur hôte, Amar Lasfar ». Quelle symbolique a voulu transmettre le photographe du journal avec cette image ? La statue du Commandeur dans Dom Juan de Molière ? Le Colosse menaçant les petits humains paniqués du tableau de Goya ? La supériorité des religieux sur les politiques ? De quoi s’agit-il ?
L’éclairage, la prise de vue et l’impression en Noir et Blanc ont estompé l’écran géant où est projeté en direct Amar Lasfar au-dessus de Martine Aubry (PS), de ses concurrents à la mairie Sébastien Huyghe (UMP) et Jacques Richir (MoDem), du député UMP Thierry Lazaro et de Slimane Tir, candidat Verts à Roubaix et actuel vice-président de Lille-Métropole Communauté Urbaine.
Ces candidats aux municipales ont accepté de se soumettre aux questions d’une assemblée religieuse : la deuxième « Rencontre annuelle des Musulmans du Nord » au Zénith-Grand Palais de Lille.
Devant 2300 musulmans, ces politiques ont répondu aux thèmes choisis par la Ligue Islamique du Nord et de son président, Amar Lasfar. « L’auditoire musulman doit être éclairé par rapport à ses valeurs », écrit la Voix du Nord. Le président Sarkozy a donné l’exemple avec son discours à Saint Jean de Latran (Vatican, Rome) et à Riyad (capitale de l’Arabie saoudite). Ici, au niveau local, nous sommes déjà dans les Travaux pratiques sarkozyens de la remise en cause de la loi de 1905 de séparation des Eglises et de l’Etat. Du religieux contrôlant le politique. De la République laïque jetée aux orties. Martine Aubry nous y a habitués. C’est pourquoi elle réentonne son air préféré : « Les musulmans qui sont là apportent un islam tolérant, ouvert. Rendons-leur cette solidarité et cette fraternité ». Tolérant ? Inquiétant ! Amar Lasfar, ce proche de l’UOIF et des Frères musulmans, n’a de cesse d’imposer l’Islam aux dépens de la laïcité qu’il veut « ouverte ». De plus en plus ouverte. Convergence oblige, Martine Aubry ajoute : « C’est une erreur fondamentale de ne pas avoir donné le droit de vote aux étrangers aux municipales. On créera un conseil des résidants étrangers ». Quel meli-melo : « étrangers » est ici égal à « musulmans ». Et les athées, les agnostiques ? Jacque Richir du MoDem est sur la même longueur d’ondes : « C’est en respectant nos racines respectives qu’on prépare notre avenir ». En bon sarkozyste, Sébastien Huyghe (UMP) veut créer un Conseil du dialogue œcuménique lillois. Slimane Tir cultive aussi la « laïcité ouverte », c’est à dire la fin de la laïcité, et le droit à la différence, donc la différence des droits : « Nous musulmans, devons couvrir et assumer notre héritage culturel, pour construire un avenir (…) ».
La laïcité républicaine, on connaît de moins en moins chez ces élus candidats. On s’assoit dessus pour quelques voix et pour acheter la paix sociale encadrée par les religieux. C’est la surenchère dans l’encouragement du communautarisme religieux et ethnique.
Je tourne les pages de La Voix du Nord et je vois une photographie d’un barbu souriant coiffé… Coiffé de quoi d’ailleurs ? Un voile blanc ? Un keffiyeh ? Je n’en sais rien, tout ça n’est pas mon monde. La légende de la photo dit que c’est un cheik : « Le cheik Abdallah Basfar dirigeait la prière, pour la deuxième rencontre annuelle des musulmans du Nord, hier à Lille Grand Palais ». Curieuse, j’entre son nom dans Google.
Google parle : Abdallah Basfar est récitateur du Coran, Secrétaire général de l’Organisation Internationale de l’apprentissage du Coran. Il vient de Jeddah, deuxième ville d’Arabie saoudite et jumelée avec Strasbourg. L’Arabie saoudite : le Wahhabisme, les femmes interdites de conduite de voiture, la charia, la lapidation des femmes, etc. C’est dans ça qu’ils sont allés, ces candidats aux Municipales !
Je crois que nous aurons vraiment du mal à avoir un Islam de France. Surtout avec un Président Sarkozy, une Martine Aubry ou un Jacques Richir pris ici en flagrant délit de non respect de la laïcité pourtant défendue par son leader François Bayrou (à moins que ça soit cela !). Quant au candidat musulman Slimane Tir, à quel Vert se réfère-t-il ? Le Vert de l’écologie ou le Vert de l’Islam ?
Quelle confusion ! Quelle régression ! Laïques des gauches et des droites, réveillez-vous ! Il faut défendre la loi de 1905 pour éviter la libanisation de la France ou son implosion comme en ex-Yougoslavie.
Je ferme La Voix du Nord. Je bois mon café. La maisonnée s’éveille.
Fanny Deulin

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