Nicolas Sarkozy, comment osez-vous dire que la burqa n'a rien à voir avec l'islam ?

Monsieur le Président de la République, vous avez plus d’une fois assimilé l’islamophobie à l’antisémitisme, ce qui démontre non seulement votre inculture linguistique, mais aussi votre inculture républicaine. Oui, on a le droit d’être islamophobe, c’est-à-dire de rejeter, de détester ou d’avoir peur de l’islam, sans être taxé de racisme.
Vous introduisez ainsi dans la République française un véritable « délit de blasphème », et votre discours de ce jour au Congrès de Versailles va exactement dans le même sens, quand vous dites que « la laïcité, ce n’est pas le rejet du sentiment religieux » et que « c’est un principe de neutralité, de respect [des religions] ». Et vous appelez à votre secours Jules Ferry, en sortant l’une de ses citations de son contexte : un enseignant n’aurait pas le droit de dire quoi que ce soit qui heurte la croyance religieuse de l’un de ses élèves.
Votre inculture historique vous fait oublier que nous ne sommes plus du temps de Jules Ferry. A cette époque, les femmes n’avaient pas le droit de vote et n’étaient pas considérées juridiquement et civilement comme les égales des hommes. L’avortement et l’homosexualité étaient des délits. Et les élèves musulmans étaient rarissimes sur les bancs de nos écoles. Alors évidemment, il n’était guère difficile à cette époque de trouver des convergences entre morale républicaine et morale chrétienne – tu ne voleras pas, tu ne tueras pas, tu respecteras père et mère, etc. – tout en ne heurtant guère les convictions religieuses des élèves très majoritairement catholiques ou athées.

Mais si on projette votre idée du « respect des religions » en 2009 en France, comme vous le souhaitez, alors l’enseignant, afin de ne pas heurter ses élèves de telle ou telle confession, ne pourra plus :
Parler de Darwin, car cela heurterait les créationnistes chrétiens ou musulmans ;
Prôner l’égalité des sexes, car le Coran donne autorité à l’homme sur la femme et cela heurterait les élèves de confession islamique ;
Prôner les droits des homosexuels, considérés comme des pêcheurs par les catholiques et comme des criminels par les musulmans ;
Parler de la liberté religieuse, car le droit à l’apostasie est condamné dans l’islam ;
Faire campagne pour l’information sexuelle et la contraception, pour ne pas heurter les élèves catholiques ;
Parler de l’apport diététique de la viande, pour ne pas choquer les bouddhistes végétariens ;
Evoquer le droit au divorce, banni dans plusieurs religions.
Bref, selon vous, par « respect » des religions, l’instituteur devra se coltiner la Bible, le Coran, le catéchisme de Jean-Paul II et les bulles papales, ainsi que les textes religieux bouddhistes, hindouistes, sikhs, etc., afin de déterminer le plus petit commun dénominateur de ce qui n’est pas « haram » ou péché chez les uns et les autres.
D’autre part, votre discours fait fi de la religion majoritaire en France : l’athéisme ! Vous faites ainsi une discrimination entre croyants pour qui la moindre lubie écrite par un gourou il y a 3000 ou 1400 ans devrait être respectable, et les incroyants à qui vous interdisez d’afficher leur critique des religions, et en particulier leur islamophobie. On est loin de votre soutien à Charlie-Hebdo pour les caricatures de Mahomet !
Monsieur Sarkozy, cette partie de votre discours est anti-laïque. J’ai pour ma part bien compris que c’était un marchandage avec les lobbies musulmans : l’interdiction ou la restriction du port du voile intégral, contre la défense de l’islam et en particulier le financement de mosquées par les deniers publics. Alors même que dans le même discours de Versailles, vous invitiez l’Etat et les collectivités locales à ne pas gaspiller le moindre euro !
Votre méconnaissance de l’Histoire de France vous fait également oublier que même avant la République, la royauté ou les aristocraties locales étaient souvent en conflit avec la papauté romaine ou ses représentants. Il en est ainsi chaque fois que des religieux investissent le champ politique. Il n’y a donc aucune raison que quand, aujourd’hui et maintenant, une religion telle que l’islam prône des dogmes contraires à nos lois et nos valeurs, nous n’ayons pas le droit de les dénoncer et de les combattre.
Et sur le voile intégral, vous dites que c’est « un problème de liberté, de dignité de la femme. (…) La burqa n’est pas un problème religieux. C’est un signe d’asservissement, d’abaissement de la femme » et vous précisez que la burqa « n’est pas la bienvenue sur le territoire de la République ». Vous avez dit la même chose lors de votre campagne électorale, et bizarrement, vous attendez plus de deux ans pour appliquer cette promesse de campagne. Vous le faites uniquement par opportunisme, contraint et forcé à réagir à une proposition de commission par une soixantaine de députés de tous bords.
« La burqa n’est pas un problème religieux », dites-vous ! Mais vous vous fichez de qui ? A part des gens qui se réclament de l’islam, avez-vous vu en France une seule personne qui porte le voile intégral (sauf pour se déguiser) ? Et le voile islamique non intégral, n’est-ce pas également « un signe d’asservissement, d’abaissement de la femme » comme l’explique votre ministre Fadela Amara ?
Monsieur Sarkozy, vous refusez tout simplement de voir la réalité d’un islam politique qui, depuis 20 ans, lance une offensive contre la République française ; et également contre sa laïcité à laquelle vous n’adhérez pas mais que vous n’osez attaquer de peur de choquer les Français. Vous l’avez d’ailleurs dit : « les Français sont attachés à la laïcité », sans dire que vous aussi vous y étiez attaché. Contrairement à votre prédécesseur Jacques Chirac qui la déclarait « non négociable », donc qui la faisait sienne. Contrairement au Général De Gaulle, à Georges Pompidou ou Valérie Giscard d’Estaing, qui, bien que catholiques pratiquants, n’ont JAMAIS évoqué ni Dieu ni les religions dans leurs discours républicains.
Monsieur Sarkozy, j’ai le droit d’être islamophobe ou cathophobe ou zoroastrophobe tout comme j’ai le droit de m’opposer au communisme ou au capitalisme, du moment que les religions deviennent des idéologies politiques et contraires aux valeurs et lois de la République. J’ai le droit de dire, sans caricature aucune, que Mahomet était un chef de guerre sanguinaire, ou de démontrer que Marie-Madeleine était la concubine de Jésus, ou de supposer qu’Abraham n’est qu’un personnage de légende qui n’a jamais existé.
Et vous n’empêcherez personne, au pays de Descartes et de Voltaire, d’avoir le droit de ne pas respecter les croyances d’autrui, de les critiquer, et de les combattre quand elles nuisent au vivre-ensemble dans notre pays. Ou alors vous n’êtes ni un républicain ni un laïque.
Djamila GERARD

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