Affaire Minute : l’idéologie antiraciste, dernier carré de l’Etat PS

TaubiraminuteL’hebdomadaire Minute, journal politique et satirique fondé en 1962 et diffusé dans la plupart des kiosques français dont un illustre rédacteur en chef fut le conseiller de Nicolas Sarkozy, Patrick Buisson, publie ce jour en « une », un titre et une photo qui font scandale dans les rédactions et le monde politique : on y voit une photo de Christiane Taubira, avec le titre suivant « Maligne comme un singe, Taubira retrouve la banane ».
L’association aux subventions contestées « SOS racisme » a aussitôt annoncé son intention de déposer une plainte contre le journal, tandis que Jean-Marc Ayrault, soutenu par l’Union des étudiants juifs de France, a décidé de saisir le parquet de la République.
Éternels résistants politiquement corrects, des personnalités politiques, issues du Front National comme du Front de Gauche, de l’UMP, ou du PS, sont montées au créneau afin de « “condamner quelque chose qui relève d’une bien autre dimension que la condamnation politique : il faut que la société fasse un rempart contre ces extrémismes, contre ces caricatures”. » selon Bruno Le Roux, chef de file des députés PS. Harlem Désir, premier secrétaire du PS, s’est dit, via un tweet, « révolté par l’ignoble une de Minute ». « Ça suffit le racisme et l’extrémisme. Ce numéro doit être saisi. Républicains debout. »
À droite, Eric Ciotti, député pourtant issu de la « droite populaire » dite décomplexée, s’estime « choqué » : « c’est une provocation, une dérive, je la condamne. Le racisme n’a aucune place dans le débat politique. » précise le député, oubliant que Minute n’est pas un journal de parti politique, mais bel et bien un journal d’opinion.
Marine Le Pen y est également allée de sa sortie, sans demander pour autant plaintes et poursuites pénales contre l’hebdomadaire : « Je suis heureuse de me faire cracher dessus chaque semaine par “Minute” quand je vois ce que c’est devenu. MLP »
Ce titre, dont les deux expressions principales relève du langage populaire et auront de toute façon du mal a être requalifiées autrement en justice,  joue évidemment avec les dernières insultes  dont a été récemment victime la garde des Sceaux, et peut apparaitre au mieux comme de l’humour satirique, au pire comme une provocation : il n’en demeure pas moins que l’indignation générale suscitée dans la classe politique, surtout à gauche, au lendemain de l’emballement médiatique sur les « incidents » du 11 novembre (mais uniquement ceux provoqués par des gens classés « à droite », les chants et insultes des « antifas » sur les Champs Élysées n’ayant pas suscité d’arrestations) et du discours convenu et militant du chef de l’État, montre à quel point le gouvernement PS se trouve aujourd’hui dans les cordes, avec pour seule alternative d’alerter le peuple sur une « menace raciste et fasciste », éternelle poudre de perlimpinpin pour bobos parisiens, mais qui ne semble plus mobiliser ni toucher grand monde en réalité.
Car derrière les réactions et les indignations en chaîne des personnalités politiques qui pour beaucoup y voient à nouveau là l’occasion de faire parler d’elle, la majorité des Français (qui ne lit pas Minute) est aujourd’hui avant tout inquiète sur son avenir économique, social et identitaire.

Des attaques contre Charlie-Hebdo aux futures plaintes contre Minute, en passant par les multitudes de plaintes et de condamnations de blogueurs et les lynchages de personnalités médiatiques jugées « anticonformistes » (Deutsch, Menard, Zemmour, Finkelfraut, Soral…), la bien-pensance, même en perte de vitesse, contrôle toujours de nombreuses ficelles, qui permettent encore, par la mort financière ou judiciaire, de neutraliser la contestation, y compris par l’écrit. Il est d’ailleurs sans doute regrettable qu’à l’heure où les Français sont de plus en plus inquiets et révoltés concernant leur avenir, quelques provocations, aussi drôles soient-elles, viennent donner du grain à moudre à des institutions et associations en perdition.
Dans un pays où l’éducation nationale mettait encore en avant récemment des polémistes qui ont donné à ce pays une littérature d’une profonde richesse comme Voltaire, Corneille, Zola ou encore Molière, il est ahurissant et inquiétant de voir que la République a en réalité donné naissance à des censeurs, des hussards et même des lois pour interdire la polémique, la satire, voire l’injure, qui pouvait encore se régler par le duel, comme en 1967 entre Gaston Defferre et René Ribière, alors députés.

Yohann Blevennec