Quand le sabordage résonne comme un hallali !
En politique, le dépit est un sentiment bizarre qui peut vous conduire à faire le choix du suicide afin d’éviter ce qui vous parait mortel.
Il n’est pas nécessaire que l’alternative soit réellement fatale. Il suffit seulement que vous soyez confronté à une situation qui vous fuit et vous laisse impuissant même si elle vous incombe en propre et implique la responsabilité pleine et entière de vos actes passés.
Au lendemain de ce que d’aucuns ont nommé une nouvelle fois, de manière plus instinctivement désappointée que réellement romantique, « le choc », Manuel Valls a parfaitement donnait l’image de ce trouble convulsif qui conduit à l’irréparable. Tel un bélier prenant un gros chien de garde vigilant pour un loup, il fut prit d’une folie autodestructrice qui le poussa à conduire son troupeau dans le précipice. Submergé, en effet, par la nature et l’ampleur du résultat, il choisit le sabordage en offrant « ses voix » à l’adversaire.
La défaite n’en est pas moins grande. Elle en sera peut-être plus douloureuse. Il le savait mais il l’a fait, quitte à s’en mordre les doigts, plus tard et même si sa démarche s’inscrit dans une optique à long terme. L’objectif était une idée fixe et la méthode un tic obsessionnel compulsif.
Mais hélas nous n’avions pas encore tout vu ni tout entendu.
24 heures plus tard, comme dans un mauvais roman, un hoquet ahurissant du processus de second tour allait se produire, aussi inattendu que stupéfiant.
Martine Aubry, la grande prêtresse gardienne de l’orthodoxie idéologique, la reine du mythe socialiste, sortit du temple où elle s’était enfermée en état de solitude, pour montrer la voix du nord et peut-être aussi celle du sud. Elle appela tous ses « biloutes » à se ranger comme un seul homme derrière Xavier Bertrand, le grand Satan d’hier devenu, par miracle le Saint protecteur du jour.
Alors là, savez-vous, ce fut plus qu’un choc, une espèce de tremblement de terre doublé d’un tsunami.
C’est comme si l’on avait entendu le Pape, berger des Catholiques, recommander à tous ses fidèles d’opter pour le tourisme sexuel… Comme si on avait entendu un Pasteur demander à sa fille de se lancer dans la prostitution afin d’éviter l’expulsion pour loyers impayés…Comme si une épouse délaissée avait poussé son mari volage dans les bras de la bonne afin d’éviter qu’il ne finisse dans ceux de sa cousine Ségolène.
Alors, voyez-vous, je ne sais pas ce que les encartés socialistes vont faire dimanche dans le secret de l’urne et dans le recueillement de leur âme d’électeurs. Ce que je sais, en revanche, c’est que lundi matin, quel que soit le résultat, ils auront un profond sentiment de dépit. Ce désappointement sera dicté soit par la défaite malgré tout augmentée du sentiment d’avoir été pris pour des billes, soit par une victoire de Trafalgar où il auront vu bruler leur honneur et leur espoir de résurrection.
Jean-Jacques Fifre