Un virage à droite ferait perdre beaucoup de voix au FN
J’ai lu le dernier article de Gérard Brazon consacré au projet de loi El Khomri.
J’applaudis sa critique concernant la porte ouverte aux surenchères religieuses dans l’entreprise qui renforcera le communautarisme musulman à coup sûr, d’autant que les entreprises céderont pour avoir la paix et éviter les contentieux juridiques, mais trouver pour le reste que ce projet de loi serait une bonne chose car plus libéral d’inspiration, on ne peut être que très sceptique. Les avantages supposés en terme d’embauche ne sont pas évidents. Un entrepreneur, quand bien même il aurait plus de facilités pour licencier, n’embauchera pas pour embaucher et les licenciements économiques facilités notamment dans les grands groupes ne seraient sans doute probablement pas compensés par de rares embauches précaires. Au mieux, ce serait une opération à somme nulle, avec pour les salariés une dégradation nette de leurs conditions d’emploi et de salaire.
C’est vrai, comme l’exprime Gérard, qu’on peut être exaspéré par un certain dogmatisme de syndicats tels que la CGT ou Sud et leur complaisance tant vis à vis des politiques migratoires que des pressions communautaristes de certains de leurs adhérents ou mandants, mais le fait que la CGT critique cette loi ne la rend pas pour autant plus défendable. Les accords d’entreprises à la place des accords de branche risquent de se faire systématiquement au détriment des salariés (réduction des salaires, flexibilité du temps de travail, chantage à la délocalisation etc).
Concernant le Front national, je ne suis pas certain qu’il soit bon, article après article, d’aller à la « chasse » au Philippot. Je comprends l’agacement de Gérard vis à vis de cet énarque « Monsieur je sais tout » et de l’influence peut-être trop forte qu’il a sur Marine Le Pen, mais ces critiques permanentes ne peuvent qu’affaiblir le Front national . Plus ennuyeux, au-delà même de la personne de Philippot on sent bien de l’intérieur ou de l’extérieur du FN, (notamment le Siel et tous les « bons amis » qui conseillent ce parti , genre Chauprade, Maynard de Villiers ou autre), la volonté que le Front national fasse une rupture avec son orientation « ni droite ni gauche » pour se recentrer clairement à droite.
Or je rappellerai à Gérard que la droite identitaire menée par Philippe de Villiers n’a jamais dépassé les 15% dans le cadre des élections européennes et que le Front national faisait en moyenne 16% dans les meilleurs cas avec une pointe à 18% avec l’apport des voix de Mégret lors du 2ème tour des présidentielles de 2002, mais n’avait jamais dépassé les 20% .
En plus n’oublions pas deux choses :
– Les gens préfèrent l’original à la copie : si c’est pour faire une politique très libérale sur le plan économique et sociale, la droite LR est bien mieux placé que le FN;
– Le FN perdrait toute crédibilité à changer du jour au lendemain les mesures sociales contenu dans son programme économique qui lui vaut beaucoup de suffrages dans le nord et l’est de la France, a fortiori s’il renonçait à toutes les mesures (smic, retraite )
– Même chose si pour obtenir les voix des cadres et des retraités qui lui manquent,t effrayés par l’abandon de l’euro, le FN « rentrait dans le rang européiste ». Il perdrait toute crédibilité à changer la donne économique et sociale car garder l’euro dans le contexte actuel, c’est de fait se soumettre à la politique conjointe de Bruxelles et Berlin, austéritaire mais aussi ne l’oublions pas immigrationiste. Par ailleurs cela donnerait raison a postériori à la droite européiste et dans ce cas, pourquoi aller voter pour le FN dont la dédiabolisation n’est que partielle.
La vérité c’est que tant sur sa droite que sur sa gauche le matelas des électeurs FN est convoité :
– A gauche, l’économiste Jacque Sapir proche de Chevènement envisagerait bien une majorité souverainiste incluant le FN à condition que ce parti fasse profil bas sur l’immigration et le prosélytisme religieux musulman et sur toute politique sécuritaire. Si le FN allait dans ce sens là, il perdrait une grande partie de ses électeurs;
– Quant à la droite « identitaire », elle guigne elle aussi les voix du FN en engageant toutefois ce parti à abandonner son nom, à renoncer à ses orientations sociales, à se définir exclusivement comme un parti de droite, à se mobiliser contre l’avortement et le mariage homosexuel et à mettre en veilleuse ses orientations souverainistes. Un tel virage ferait perdre également beaucoup de voix au FN.
Rigdebert Rinocero