Avec Hollande, on est bien loin de l’inoubliable discours de Villepin à l’Onu !

Les Français avaient mille fois raison. Dix ans après leur refus de s’engager dans une expédition hasardeuse en Irak, qui a plongé le pays dans une sanglante guerre civile, on ne peut que saluer la sagesse de Jacques Chirac, qui avait osé dire non à l’Amérique et pris la tête de l’axe de la paix, aux côtés de l’Allemagne, de la Russie et de la Chine. Et si le discours de Dominique de Villepin à la tribune de l’ONU, prononcé avec panache pour signifier le refus de Paris de soutenir la guerre, nous avait valu à l’époque les pires insultes dans la presse anglo-saxonne, il reste aujourd’hui un discours de référence en matière de politique internationale. Engagée sur un odieux mensonge d’Etat, accusant Saddam Hussein de posséder des armes de destruction massive et de soutenir Al-Qaida, cette guerre qui devait faire de l’Irak la vitrine démocratique du Moyen Orient, a totalement ravagé le pays et déstabilisé durablement toute la région.

Par leur méconnaissance totale de l’histoire, de la culture et des mentalités du peuple irakien, les faucons de la Maison Blanche et du Pentagone, pressés par les lobbies de l’armement et du pétrole jamais avares d’une guerre, ont renversé un régime laïc, seul rempart contre l’Iran des Ayatollahs. Le constat est accablant. Non seulement Saddam Hussein n’a jamais possédé d’armes de destruction massive, mais la nébuleuse sunnite Al-Qaida, totalement absente en Irak il y a dix ans, est aujourd’hui la principale responsable des attentats quotidiens.

Qui pouvait croire que les sunnites, au pouvoir depuis 80 ans, allaient accepter d’en être chassés par les chiites sans réagir ? Qui pouvait croire que la doctrine de la guerre contre insurrectionnelle, chère au général Petraeus, allait pacifier durablement le pays ? Certainement pas Jacques Chirac, fort de son expérience de la guerre d’Algérie. Dix ans après cette folle décision, qui a fait un demi-million de morts selon une récente étude publiée aux Etats-Unis, l’Irak est le champ d’affrontements interconfessionnels sanglants entre chiites, sunnites et kurdes, où les chrétiens et autres minorités paient un lourd tribut et où les femmes ont perdu toute liberté. Une véritable descente aux enfers, avec 6000 personnes tuées en 2013 selon l’ONU. Dépassé par les violences, le premier ministre chiite al-Maliki, qui règne sans partage, vient aujourd’hui réclamer l’aide des Etats-Unis pour combattre Al-Qaida, laquelle rallie de plus en plus de sunnites irakiens, exaspérés par un gouvernement jugé sectaire et autoritaire.

Reste à savoir quelle sera la réponse d’Obama, étant donné que c’est le même al-Maliki qui avait refusé que les Américains prolongent leur séjour en Irak et qui n’a cessé de se rapprocher de Téhéran depuis leur départ en 2011…. Près de 5000 soldats tués et 36000 blessés dans les rangs de la coalition occidentale, des centaines de milliers de victimes civiles et 1000 milliards de dollars partis en fumée, tel est le bilan décennal de l’aventure irakienne. Quel gâchis !

Jacques Guillemain

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