Ce que disait le dangereux islamophobe Laurent Fabius, en 2003…

Rassurez-vous, Riposte Laïque n’est pas devenu fabiusien. Mais j’ai retrouvé, en faisant quelques recherches, le discours que Laurent Fabius prononça au congrès de Dijon du Parti socialiste de 2003. Il était principalement axé sur la défense de la laïcité, et sur la nécessité de se montrer ferme devant l’offensive islamiste. Huit ans plus tard, le-dit Laurent Fabius signait la pétition de Respect-Mag, relayée par Le Nouvel Observateur, demandant à l’UMP d’annuler le débat prévu, le 5 avril, sur l’islam…
Lucette Jeanpierre
Le discours de Laurent Fabius
Les principaux extraits :
Les valeurs qui sont notre drapeau, nous les partageons tous :
– la justice sociale, bien sûr, qui implique plus de démocratie sociale ;
– l’école, et pas n’importe quelle école, l’école de l’égalité des chances, l’école deformation toute la vie ;
– le développement durable, à condistion que ne soit pas un mot vide sens, mais quelquechose de profond tel que nous l’ont proposé nos amis écologistes ;
– et puis la solidarité européenne, et puis une autre conception du monde face à l’hyperpuissance et à l’hyper myopie du marché.
Et l’ajouterai, car c’est un point que je veux traiter, la laïcité, parce que face aux intégrismes de toutes sortes, et aujourd’hui encore, ils ont frappé au Maroc de façon dramatique, face aux intégrismes de toutes sortes dont la France n’est pas exempte, il faut que nous sachionsréaffirmer que la valeur fondatrice unitaire, c’est la valeur de laïcité.
Or, à cet égard les signes d’inquiétude sont nombreux.
Je veux en citer quelques uns :
L’autre jour j’ai rencontré une institutrice de maternelle, qui me disait, et c’est à peine croyable, que des enfants de sa classe avaient refusé de faire la ronde parce qu’un des parents avaient dit qu’il ne fallait pas que les filles et les petits garçons se touchent la main.
Je connais comme vous des enseignants qui, au moment de faire cours sur l’affaire Dreyfus, sur l’égalité des droits, sur la situation au Moyen- Orient, voient quelqu’un se lever dans leur classe, porté par un fanatisme qui ne vient pas de lui-même, et qui les menace, et qui leur interdit defaire ce cours, ce qui les conduit parfois à se censurer eux-mêmes.
Dans un autre ordre d’idée, j’ai vu comme vous ce ministre de l’Intérieur tenir des paroles pertinentes sur la laïcité, mais le faire benoîtement devant une salle ( on n’a pas assezremarqué ce détail) où il y avait deux entrées séparées : l’une pour les femmes, l’autre pourles hommes, et où chacun siégeait physiquement séparé dans la même enceinte.
Et puis, comme vous, je vois ce débat à propos de la future commission européenne où certains proposent, sans que cela semble choquer, sauf nous et heureusement quelques autres, que l’on définisse l’Europe par sa filiation religieuse.
Et en très haut lieu, que répond-on à tout cela ? “Il faut faire preuve de sagesse, il ne faut rien brusquer, il faut voir les problèmes au cas par cas.” Nous, socialistes, nous disons que la République ne se défend pas au cas par cas.
Il est temps, mes camarades, il est temps de redire un certain nombre de choses de choses simples.
D’abord la République, qui n’est pas un lieu, un régime où chacun vient pour mettre en avant sa confession, mais qui est un lieu et un régime où les citoyens sont à égalité de droit et de devoir, et parmi ces droits et ces devoirs, il y a la laïcité.
Ensuite, la laïcité qui n’est pas une opinion parmi d’autres, mais, Bertrand l’a fort bien dit, ce qui permet à toutes les opinions de coexister et non de se combattre, avec cette grande loi surlaquelle intervint jaurès en 1905, de la séparation de l’Eglise et de l’Etat . Oui, l’Etat c’est la société des hommes et des femmes entre eux. Oui, l’Eglise, c’est la société des femmes et des hommes qui le veulent avec Dieu, et il n’est pas question de mettre en cause, si peu que ce soit, la séparation de l’Eglise et de l’Etat.
Puis l’école, qui n’est pas un lieu parmi d’autres, mais un lieu où l’on forme les petits citoyens. Et ce trépied, République, école, c’est un trépied auquel nous tenons.
Il est donc temps de préciser et de dire notamment deux règles :
La première, c’est que, dans la République française, chacun est libre de pratiquer son culte et sa foi.La République ne reconnaît aucun culte, mais elle ne méconnaît aucun culte. Et il est exact et honnête de dire que certains cultes, certains je pense en particulier aux musulmans, ne peuvent pas aujourd’hui pratiquer dans des conditions dignes. Il faudra donc, ce sera notre honneur de socialistes, que, dans le strict respect de la loi de 1905, nous trouvions les modalités pratiquespour qu’ils puissent exercer leur culte dans des conditions dignes.
Mais de la même façon, et symétriquement, le temps est venu, je crois, de clarifier notre position sur le port des insignes religieux.
Il y a plus de dix ans, dans un autre contexte, et en toute bonne foi, nous avons cru pouvoir confier au Conseil d’Etat le soin de décider de cette question. Le Conseil d’Etat, malgré la qualité de ses membres, n’avait pas cette fonction là. On est arrivé à une sorte de casuistique finalement peu tenable où l’on met en première ligne les enseignants et les chefs d’établissement, qui doivent, malgré qu’ils aient au premier rang leur appréciation subjective, je dis qu’il faut changer cela, et qu’il est temps que les politiques, c’est à dire nous mêmes prennent leurs responsablilités.
Je prends ce matin les miennes. Je crois qu’autant il est fondamental que, dans la sphèreprivée, chacun puisse exprimer sa foi, autant, il est fondamental que, dans la sphère publique, et, d’abord à l’école publique, il ne puisse plus être exhibé d’insigne religieux, ni voile,ni kippa, ni croix. Bref, qu’après les consultations nécessaires, une loi vienne préciserce point : la foi dans le domaine de l’espace privé doit avoir libre exercice, mais la foi ne remplace pas la loi.
On me dira : cela soulèvera des difficultés. Peut-être. Moins de difficultés que si on laissait se développer les germes de l’intégrisme que l’on observe ici ou là avec les conséquences de tous ordres que cela aurait, y compris mes camarades au plan politique car le développement de l’intégrisme d’un côté aurait comme conséquence inéluctable le développement de l’extrême droite de l’autre.
On me dira : vous risquez , par cette position, au fond, de nuire au droit des femmes et des jeunes filles que vous prétendez défendre. Je ne le crois pas. Le voile, quoi qu’en dise,est une atteinte portée à l’égalité entre les femmes et les hommes. Et si on laisse porter cette atteinte là, alors les libertés des femmes seront emportées.
On me dira enfin : encore une fois c’est la spécifité de la France. Moi j’accepte, et même je revendique, cette spécificité si c’est la spécifité de la liberté. Nous connaissons toutes et tous, en particulier des femmes, des militantes qui, dans d’autres pays, ont été exilées, lapidées, assassinées, parce qu’elles ont défendu la liberté, pour elles quand elles ne le voulaient pas, une attitude autre que le voile. Nous n’avons pas le droit d’abandonner ce combat là.
Mes camarades, derrière ce débat, il y en a un autre qui est la question suivante : oui ou non, voulons-nous que la République, notre mère, intègre toutes ses filles et tous se fils, quelle que soit leur religion, quelle que soit leur origine sociale, quelle que soit leur couleur de peau ? Le voulons-nous et croyons-nous que la France en est capable ? Certains disent non. Et pour augmenter leur emprise sur les communautés , ils développent précisement le rôle de ces communautés. Pour nous la République ne peut pas reconnaître une autre communauté que la communauté nationale.
Mais pour réaliser une vraie intégration, il ne suffit pas de prononcer des interdits, il faut aller beaucoup plus loin, il faut faire en sorte que cessent les discriminations nombreuses qui continuent à s’exercer sur à l’égard de beaucoup d’autres sur le logement, l’emploi et la culture, et s’agissant en particulier de nos amis, de nos frères issus de l’immigration, il faut, et je regrette que sur ce point la gauche ait été devancée par la droite, qu’il y en ait davantage au gouvernement du pays, qu’il y en ait dans les grandes écoles, dans les grandes entreprises, et à la télévison, bref partout où l’on détient une parcelle de pouvoir, parce que c’est ainsi que nous ferons reculer l’intégrisme et que nous montrerons que nous avons une haute idée de l’égalité, quelle soit l’origine, quelle que soit la couleur de la peau, et quelle soit, au fond, la religion dont on se réclame.
Le pacte laïque, il est là. Et plus la société française sera diverse et plus le principe émancipateur de la laïcité devra être respecté.
(…)
PS. Voilà l’homme qui, 8 ans après, refuse de voter la loi sur la burqa, et demande l’annulation du débat sur l’islam…

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