Des juges français inféodés à certaines religions ?

La question mérite d’être posée, après que la Ministre de la Justice Christiane Taubira a annoncé, le 27 avril 2015, aux journalistes accrédités auprès de son ministère, l’octroi de 2,7 M€ de crédits sur 3 ans “destinés à mettre en place des formations à la laïcité pour les magistrats et les personnels des juridictions”.

av taub

Certes, ce n’est rien à côté des 39,5 M€ annoncés le même jour et consacrés au renforcement de la sécurité des juridictions face à la menace d’attentats (vidéo protection, protection périmétrique, alarmes, gardiennage, portiques, système de badges, etc.) ou aux 7 M€ octroyés à 2000 magistrats et greffiers pour “les équiper fin 2015 de tablettes et matériels informatiques sécurisés…”.

Ces formations à la laïcité et ces nouvelles dépenses budgétaires, dont le coût peut être financé par la vente de quatre avions de combat Rafale (66 millions d’euros pièce) à l’Egypte, au Qatar ou à l’Inde, répondent-elles à une impérieuse nécessité ? Font-elles suite à un constat de l’inspection générale des services judiciaires ? A des dérives dûment constatées de magistrats dont la clémence irait à des justiciables arborant certaines religions ?

Point de précision de la part de la Ministre de la Justice qui, depuis son arrivée, multiplie les effets d’annonce, et n’est d’ailleurs ni meilleure, ni plus mauvaise que ses prédécesseurs à la Chancellerie. Et je m’arrête là avant d’être taxé “d’effronté” par une ministre à bout de souffle, qui oubliera volontiers ma liberté de parole à l’égard de ses prédécesseurs. Des prédécesseurs qui comprenaient la liberté de parole du débat contradictoire, à l’image du ministre de la Justice UMP Pascal Clement, que j’ai affronté en 2007 aux législatives dans son fief de la Loire.

av clement

Avant même l’ouverture de la campagne, je déclarais dans le quotidien le Progrès que “le Ministre de la Justice Pascal Clement était con et nul”. Le même ministre me répondait le surlendemain dans le même médias “Je suis peut être nul, mais c’est moi le Ministre”. Cet humour laïc et républicain ne se retrouve pas chez Christiane Taubira lorsqu’on critique son action publique.

Avec la même impartialité, j’avais dénoncé dans Lyon Capitale certaines pratiques de mon ami Michel Mercier (ministre de la Justice jusqu’en avril 2012) lorsqu’il donnait “des directives téléphoniques à des juges d’instruction pour les enquêtes Marseillaises” ou lorsqu’il procédait “à la mutation de 300 magistrats la veille de Noël”.

Image -3-

Le précédent de Rennes en 2009

En effectuant quelques recherches, on constate que le principe de laïcité a été mis à mal par plusieurs affaires qui ont eu un important retentissement. Si on se fie aux médias, toutes pourraient faire douter de la laïcité de la justice….

La plus célèbre est celle de Rennes, en 2009. Il s’agit du procès du «gang de Roubaix » (15 braquages très violents commis entre 2000 et 2001) est passé à la limite du crash judiciaire à la cour d’assises. Entre autres avatars, lorsque le procès prévu en septembre 2008 a été renvoyé à janvier 2009, un avocat a prétendu l’avoir obtenu pour cause de Ramadan. La polémique a enflé entre partisans du respect des droits de la défense et ceux qui dénonçaient une atteinte à la laïcité.

La fin des Juges 002-2-

Cette dernière annonce de Christiane Taubira ne doit pas provoquer l’amalgame. Car, dans une France où beaucoup de magistrats découragés diagnostiquent «La fin des juges », à l’image de Marie-Odile Theoleyre dans son remarquable livre, on a l’impression que certains serviteurs de l’Etat, dont les ancêtres se sont illustrés sur les champs de bataille, pour que «vive la France », tentent ici ou là de sauver le Pays réel, en incarnant cette laïcité et le sens de l’Etat que nous défendons.

Francis GRUZELLE
Carte de Presse 55411