Hommage à la langue de ma mère, Emma, décédée durant la période de confinement, à cette langue française dont je revois encore les lettres qu’elle écrivait dans son jeune temps, dans un style d’une sobriété et d’une limpidité étonnantes, langue désormais rejetée de partout, surtout de ses propres locuteurs, comme « lingua non grata », et qui est en passe de la rejoindre six pieds sous terre.
La Langue d’Emma, c’est cette langue belle à l’agencement unique dans le paysage linguistique mondial, cet idiome révolutionnaire qui, jadis, s’est complètement émancipée de la complexité et de la lourdeur latines, bousculant radicalement tous les codes de langue en vigueur à l’époque en s’appuyant sur une syntaxe à la fois simple, logique et directe ; c’est cette langue qu’étaient pourtant censées protéger les dispositions de la loi no 94-665 du 4 août 1994, dite loi Toubon, lesquelles ont été, depuis, subtilement détournées et vidées de leur contenu.
La Langue d’Emma, c’est cette langue féconde qui a façonné et donné l’anglais tel que nous le connaissons, et que nos amis québécois mettent judicieusement au service des applications les plus pointues… langue qui est cependant mise en charpie par les décideurs de la sphère économico-financière de l’Europe francophone, ce avec le précieux renfort de locuteurs à la fois complices et acteurs d’une effroyable pollution langagière et qui confondent ouverture à l’autre avec le plus lâche aplatissement.
La Langue d’Emma, c’est ce vivier inépuisable dans lequel tant d’artistes ont puisé pour donner vie à un répertoire époustouflant de chansons qui ont enchanté les oreilles de plus d’une génération, florilège exceptionnel qui ne viendra plus égayer nos commerces et nos boutiques où défile à longueur de gondoles la tonitruante et déshumanisante variété anglo-saxonne qui fait marcher au pas une clientèle complètement apathique dans son inféodation… La Langue d’Emma, c’est ce parler pétillant dont l’évolution a été stoppée nette par l’intrusion des « silures » *anglo-saxons qui absorbent toutes les possibilités de son champ lexical ; c’est sur cette langue que se joue pourtant la plus surréaliste des farces dans nos ministères et les tours d’ivoire d’une élite bien-pensante où l’on fait encore des tonnes de projets mirifiques pour un idiome qui n’est plus que l’ombre de lui-même.
La Langue d’Emma, c’est cette langue qui, dans les instances européennes, tenait naguère encore la dragée haute à l’anglo-américain que toute une arrière-garde occulte tentait déjà de mettre en place pour assouvir ses desseins de prédation à l’échelle planétaire ; c’est cet idiome qui, aujourd’hui, à l’heure du Brexit, fait bien pâle figure au sein d’organismes « anglolâtres » où un Président français en plein déni s’apprête à faire du français un patois de plus au sein de l’Union européenne.
La Langue d’Emma, c’est une des langues d’une Confédération helvétique où l’on vante « cohésion sociale » et « paix des langues… dans un pays qui est pourtant dévasté linguistiquement ; c’est ce parler qu’un scandaleux sectarisme constitutionnel, une malhonnêteté intellectuelle et des garde-fous inexistants condamnent à l’exil… et les citoyens à un illettrisme ahurissant, la classe politique helvétique n’étant plus que de bien piètres marionnettes ligotées par les zélateurs du « tout-à-l’anglo-américain » de la finance et consorts lesquels tiennent le pays tout entier sous leur coupe.
La Langue d’Emma, c’est ce langage tout en délicatesse qui ne séduira plus les visiteurs francophones de passage désormais accueillis comme des hôtes indésirables à Nice, Genève, Bruxelles, Paris ou Lausanne… et qui s’en retournent chez eux humiliés et choqués ; c’est elle dont les étudiants non francophones, dépités, se détournent, les « natifs » eux-mêmes l’ayant rendue méconnaissable pour avoir simplement oublié leur appartenance à un ensemble géopolitique de plusieurs centaines de millions de francophones à travers le globe.
Le mot de la fin
La Langue d’Emma, c’est cette immense langue française refusée au locuteur lambda de langue française et qui s’effiloche au fil des jours, assassinée en pleine course à cause justement de sa grâce et de la pensée universelle qu’elle laissait apparaître en filigrane dans tout son discours, c’est cette langue qui savait prendre le contre-pied d’une idéologie anglo-saxonne dévoreuse d’humanité. Qu’en restera- t-il une fois que le credo du tout-à-l’anglais aura eu raison d’elle ?
Rien, si ce n’est qu’une écrasante majorité de ses locuteurs auront cessé d’exister dans ce qui faisait leur être original, leur vérité, et qui verront s’insinuer au plus profond d’eux-mêmes une plaie béante, souvenir d’une perte irrémédiable qui les poursuivra pendant longtemps encore, comme ont été marqués au fer rouge d’autres peuples à d’autres époques…
Philippe Carron
*Silure : gros poisson carnassier, appelé aussi poisson-chat
Les journaleux de la télévision et de la grande presse ont une lourde responsabilité en la matière, ainsi que toutes ces mauvaises traductions des films et séries américains, sans oublier les publicités !
ma belle mère, à 92 ans ne faisait ni faute de français ni d’orthographe, bien qu’elle n’ait été à l’école que trois ans, en guyane.
*langue désormais rejetée de partout, surtout de ses propres locuteurs*, ce n’est pas vrai!nous sommes très nombreux a aimer et pratiquer notre langue.Dans le monde entier, la langue française est connue et utilisée.
*qu’une écrasante majorité de ses locuteurs auront cessé d’exister*, nous éduquons nos enfants, nous transmettons!
Votre défaitisme est irritant, c’est une forme de dénigrement et vous vous presentez comme animateur du collectif langue française!!Dans un prochain article, decrivez nous tout ce que vous avez mis en place pour transmettre notre langue fraçaise.
Je sais bien que mon commentaire est hors sujet, mais je tenais à apporter des précisions sur la différence entre le silure et le poisson-chat.
Quant à la langue d’Emma, elle disparaît de plus en plus des programmes des radios nationales au travers le monde. Il nous reste en ondes courtes, Radio Chine Internationale, Radio Sophia Bulgarie, Radio Roumanie Internationale, VOA (Voice Of America), Alger chaîne 3, et j’en passe, mais beaucoup d’émetteurs dans le monde ont abandonné la langue française.
Pas d’accord, parce que le poisson-chat mesure 15 à 20cm, tandis que le silure peut faire 2 mètres avec une mâchoire aussi ouverte qu’un seau d’eau. Le silure se faufile, mine de rien, il suit un groupe de canards, ils ne se rendent compte de rien.
Quand on assiste à cette chasse, on voit la proie partir sous la surface de l’eau, aspirée, et on ne l’a revoit plus. Le silure est un poisson de territoire. Celui que j’ai repéré avait ses heures de repas, et une fois il s’est montré en chopant un insecte volant à la surface de l’eau. C’est très impressionnant quand il surgit. Le poisson-chat, malgré sa taille, est très combatif quand il est pris ; on a l’impression d’avoir “un gros” au bout de sa ligne. Pour s’en débarrasser c’est “Tintin”. Videz votre étang, laissez le au sec 2 ou 3 mois, et le remplir, eh bien il reviendra parce qu’il survit dans la vase de fond, même si celle-ci est sèche en surface. C’est du vécu.
Bravo !