Hommage à un sabreur, Antoine de Lasalle

« Un hussard qui n’est pas mort à 30 ans est un j’en-foutre »
(Général Antoine Charles Louis de Lasalle, mort à 34 ans à la bataille de Wagram)

Il aimait les combats, l’odeur de la poudre, la fête, le vin et les jolies femmes. Avec Antoine Honoré de Brack, il fut l’un des plus beaux sabreurs de l’Empire, époque qui ne manquait pourtant pas d’hommes courageux.

On raconte qu’il serait l’auteur de la Chanson « Fanchon » (« Elle aime à rire, elle aime à boire ») que je me plais à chanter, avec mes amis, les soirs de beuverie. Mais l’air de « Fanchon » était déjà célèbre au XVIIIe siècle. On le retrouve, en 1757, dans les poésies de l’abbé de Lattaignant. Les paroles de deux couplets figurent dans « Les contemporaines communes » de Restif de la Bretonne, publié en 1790. Dommage, j’aimais l’idée que « Fanchon » soit l’œuvre de Lasalle dont j’ai envie, aujourd’hui, d’honorer la mémoire : il a été tué le 6 juillet 1809, à la bataille de Wagram.

Antoine Charles Louis de Lasalle naît le 10 mai 1775 à Metz dans une famille de la petite noblesse lorraine. À 11 ans le jeune Antoine choisit la carrière des armes et, en 1786, il intègre le régiment d’infanterie d’Alsace. Le 25 mai 1791, il est nommé sous-lieutenant.
Alors que la répression s’exerce contre la noblesse, Lasalle doit quitter son régiment pour rejoindre Paris où sa famille a déménagé. L’ex-officier fait partie des volontaires en partance pour l’armée du Nord. En février 1794, il intègre le 23e  régiment de chasseurs à cheval et (re) gagne très vite ses premiers galons : il est maréchal des logis le 21 mars de la même année.

Le 10 mars 1795, le Comité de salut public le nomme lieutenant.
Peu après, Lasalle devient aide de camp du général Kellermann, général en chef de l’armée des Alpes. Intrépide et redoutable sabreur en Italie, le 7 novembre 1796, à l’âge de 21 ans, il est nommé capitaine. Le fringant officier entretient alors une relation amoureuse avec la marquise de Sali, qui habite Vicence. Une offensive autrichienne oblige les Français à abandonner la ville mais Lasalle n’hésite pas à prendre des risques pour aller honorer sa maîtresse. Dans la nuit du 16 décembre, avec 18 hommes, il franchit les lignes adverses et court chez la marquise qui a rassemblé pour lui des renseignements relatifs à l’organisation des armées autrichiennes.

L’alarme est donnée, Lasalle repart en sens inverse, bouscule un détachement de hussards autrichiens et parvient à se sauver. Une quinzaine d’Autrichiens sont tués, Lasalle ne perd que quatre hommes. Il rapporte à Bonaparte des renseignements militaires d’une importance telle que ce dernier ferme les yeux sur son incartade et le nomme aussitôt chef d’escadron, le 6 janvier 1797.
En janvier 1797, à Rivoli, Lasalle lance une charge avec seulement 26 chasseurs et refoule les assaillants, puis avise un bataillon isolé et le contraint à la reddition. À la fin de la bataille, un Lasalle épuisé se présente à Bonaparte qui désigne au sol les drapeaux pris à l’ennemi et lui dit : « couche-toi dessus, tu l’as bien mérité ». Plus tard, Bonaparte dira : « C’est Masséna, Joubert, Lasalle et moi qui avons gagné la bataille de Rivoli ».
Le jeune Mosellan va poursuivre ses exploits en Italie. Il s’illustre sur les rives de la Piave contre la cavalerie autrichienne et reçoit trois coups de sabre : « ce fou de Lasalle s’est laissé emporter par sa tête » juge Kellermann qui observe la scène en spectateur.

Après la campagne, Bonaparte écrira à Mme Lasalle au sujet de son fils :
« Ce brave officier s’est comblé de gloire à l’armée d’Italie ».
En garnison en Italie, le brillant chef d’escadron rencontre Joséphine d’Aiguillon, la femme du général Victor Léopold Berthier, qui devient sa maîtresse.
Le 26 mai 1798, Lasalle embarque pour l’Égypte, avec le général Desaix, sur la frégate « La Courageuse ». Le 1er juillet, les troupes françaises débarquent sur les côtes d’Alexandrie. La prise de la ville s’effectue sans grande résistance mais, pour atteindre Le Caire, l’armée doit entamer la traversée du désert sans eau, sans vivres et harcelée par les Bédouins.

Les Français arrivent à proximité des Pyramides le 21 juillet 1798.
Face aux mamelouks qui se sont retranchés dans le village d’Embabeh, Bonaparte forme ses cinq divisions en carrés et lance l’assaut. La cavalerie égyptienne vient se briser sur les formations françaises. Lasalle est à la tête de 60 hommes et s’empare de la redoute d’Embabeh, ce qui coupe la retraite de l’ennemi. Le soir même Bonaparte le nomme « chef de brigade provisoire » d’une demi-brigade de chasseurs à cheval.

Le 7 août il se lance aux trousses du bey Ibrahim qui s’est enfoncé dans le désert après la bataille des Pyramides. Lasalle est en pointe avec deux escadrons. Après cinq jours de poursuite, la cavalerie française rattrape le convoi égyptien à hauteur de l’oasis de Salalieh.
Une troupe de mamelouks se déploie mais Lasalle, qui n’a que 150 hommes à leur opposer, fait sonner la charge. Un combat furieux s’engage: « Lasalle a son sabre qui tombe en parant un coup terrible, il saute de cheval, ramasse son arme, combat à pied contre plusieurs mamelucks qui s’acharnent contre ce jeune chef, mais Lasalle en blesse trois, tue un cheval, remonte sur sa monture et continue le combat ». L’arrivée des dragons de Leclerc force les mamelouks au repli.

En 1800 Lasalle revient en France. Alors qu’il reçoit des mains de Bonaparte (décision du 17 thermidor 1800), une paire de pistolets et un sabre d’honneur, il aurait eu ce mot célèbre :
« Un hussard qui n’est pas mort à trente ans est un jean-foutre. »
Nommé colonel Lasalle fait figure d’enfant terrible dans la cavalerie légère et entretient soigneusement la réputation des hussards : grand amateur d’alcools forts, il fonde la « Société des Assoiffés », une initiative qui fait jaser la bonne société parisienne.

On lui confie le commandement du 10e  régiment de hussards, et c’est à la tête de cette unité qu’au combat de Vilnadella, le 27 nivôse an IX, il a trois chevaux tués sous lui et brise sept sabres. Il est fait commandeur de la Légion d’honneur le 25 prairial an XII.
Général de brigade le 12 pluviôse an XIII (1er février 1805), le 11 ventôse suivant, il commande une brigade de dragons stationnée à Amiens. C’est avec elle qu’il s’illustre encore à la bataille d’Austerlitz.

La prise de la forteresse de Stettin, le 29 octobre 1806, est un des ses nombreux exploits.
Il vient assiéger la ville défendue par les 10 000 hommes du général von Romberg. Les Prussiens sont retranchés dans la forteresse, bien armés et approvisionnés, et alignent plus d’une centaine de canons. Lasalle ne dispose que de deux régiments de cavalerie comptant 500 hommes au total. Il ordonne la confection de canons en bois et dispose sa troupe comme pour un siège. S’ensuit un échange de messages entre les deux camps : Lasalle menace de bombarder la ville et de ne pas faire de quartier, et gonfle ses effectifs. Le général von Romberg décide alors de capituler. Les Prussiens sont stupéfaits en rendant les armes de constater que les Français sont si peu nombreux.

Général de division le 30 décembre 1806, il est nommé commandant de la cavalerie légère en 1807. À la bataille d’Heilsberg le 12 juin 1806, le prince Murat est entouré par une douzaine de dragons russes. Lasalle se rue seul à l’aide de Murat. Il tue l’officier qui commande le détachement et met les dragons en fuite. Peu après, alors qu’il est enveloppé à son tour, Murat se précipite, dégage celui qui venait de lui sauver la vie et dit en lui serrant la main : « général, nous sommes quittes ».

En juillet suivant, l’Empereur lui confère la croix de Chevalier de la Couronne de fer.
Le 15 février 1808 il rejoint l’armée d’Espagne avec sa cavalerie.
Au mois de juin, à Torquemada, il défait un corps d’insurgés espagnols. Il se porte ensuite sur Palencia et marche sur Valladolid. Au village de Cabezon, trois lieues avant Valladolid, il rencontre un corps de troupes de 7 000 hommes. Il les attaque et les bat. L’ennemi abandonne son artillerie et laisse plus de 1 000 morts sur le champ de bataille.
Le 14 juillet 1808 à la bataille de Medina del Rio Seco, Lasalle, par une charge héroïque, apporte la victoire aux Français. 3 000 Espagnols restèrent sur le champ de bataille, tués ou blessés.

En septembre 1808, l’Empereur le nomma grand officier de la Légion d’honneur, et le fit comte de l’Empire.
Le 6 juillet 1809, au soir de la bataille de Wagram, séparé de ses hussards, il avise un bataillon d’infanterie ennemi et essaie, avec quelques cuirassiers, de le disperser. Il est tué, frappé d’une balle en pleine tête. La veille de la bataille, il avait dit à son aide de camp, le chef d’escadron Charles Cyr du Coëtlosquet : « Je ne survivrai pas à cette journée. »

Il meurt à 34 ans, en ayant dépassé de quatre ans la limite d’âge qu’il s’était lui-même fixée.
Dans sa dernière lettre à son épouse, il écrivait :
« Mon cœur est à toi, mon sang à l’Empereur, ma vie à l’honneur. »
Un décret impérial du 1er janvier 1810 ordonna que la statue de Lasalle soit placée sur le pont de la Concorde. Une rue de Metz prit son nom et son portrait fut placé dans un des salons de l’Hôtel-de-Ville. En 1891, une statue de Lasalle fut érigée à Lunéville. Il a son buste dans la galerie des batailles du château de Versailles et son nom gravé sous l’Arc de Triomphe de l’Étoile (pilier Est).
Et quelques « grognards », nostalgiques d’une époque révolue et héritiers en droite ligne de sa « Société des Assoiffés » lui rendent régulièrement hommage en entonnant « Fanchon ».

Éric de Verdelhan

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28 Commentaires

  1. Aujourd’hui , nous avons plus besoin d’hommes courageux que d’experts.
    Des hussards plutôt que des braillards.

  2. Tous les Valeureux morts à 30 ans ? Je comprends mieux la situation actuelle !

    • lasalle, le valeureux et preux guerrier.un homme, hors du commun des mortels.lasalle représente la france dans ce quelle avait d’héroïque,meme si je n’aime pas ,cette pantomime de franc-mac,qu’était napoléon.

  3. Un autre général se distingua particulièrement :
    l’alsacien Kleber. Alors qu’on le moquait parce qu’il parlait le dialecte, l’empereur remarqua :le
    principal est qu’il sabre en français.

  4. L’empire ……. que de bravoure et de vies gaspillées pour un arriviste de l’espèce de Macron !

    • Voyez la place qu’à laissé Napoléon ;toutes nos institutions relèvent de l’empire, et il est l’homme le plus prestigieux du monde.

      • Le corpus des réformes de Napoléon a été copié sur celles de René-Nicolas de Maupéou ministre de Louis XV. Il va de soi que ce n’est pas Michelet qui en parle.

  5. tout ça pour laisser des cimetières dans toute l’europe…toutes ces jeunes vies tombées dans l’hiver russe, toute cette misère à suivre dans les campagnes sans hommes, cette agonie impériale sur un ilot.
    mais on enfantait beaucoup à l’époque, et il n’a pas fallu longtemps pour revigorer l’esprit de conquête et se faire rétamer à nouveau en 1870, rebelote en 14 , cette fois victoire avec l’aide de nos alliés….puis 40 der des der sur notre sol avec l’humiliation nazie résultante de leur précédente humiliation de 18. et la pauvre europe morcelée à nouveau.
    Est ce pour le peu d’empressement de nos femmes à fabriquer “de la conquête” avec leur natalité faiblarde, qu’on importe des ventres “prêts à la conquête”
    on parle bien de la même conquête j’espère ? (sourire)

    • N’oublions pas que les soldats de cette époque étaient tous volontaires et professionnels.Lisez les “mémoires “du sergent Bourgogne en PD.F. Gratuit,et vous revivrez la campagne de Russie comme si vous y étiez.

      • Avant la révolution, les bretons ne faisaient pas de service militaire pour l’état français comme l’avaient signé les deux parties lors de l’union avec la France. Certains bretons, effectivement étaient employés comme mercenaires. Napoléon avait besoin de chair à canon (gratuite) pour boucher les trous, et ainsi la misère dans les campagnes s’est installée

  6. Pour magnifier encore ce portrait, je rappellerais qu’en parallèle à sa devise en trois points révélée par l’auteur (Mon coeur est à toi, mon sang à l’empereur, ma vie à l’honneur) résonne celle d’un grand soldat, et marin, Pierre Guillaume dit “le crabe-tambour”, qui l’affichait ainsi: “Mon âme à Dieu, mon corps à la patrie, mon honneur pour moi”

  7. On tombe de plus en plus bas . Vous idolâtrez là une période maudite de l’histoire de France, époque qui verra la France éliminée du jeu diplomatique après 1815 et le traité de Paris.
    Et ce mec-là, certes courageux, a sans doute plus combattu pour sa gloire propre que pour la France…

    • La Fronce, ça n’a pas l’air d’être votre tasse de thé, mon cher Mohammed.
      Donc qu’est-ce qui vous dérange réellement à propos des figures de l’épopée napoléonienne ? Avez-vous peur qu’il puisse rester encore quelques hommes avec autant de courage et de valeurs guerrières, ce qui serait évidemment un frein à la conquête musulmane de l’Europe ?
      Vous avez vos Saladin et vos Amirouche, souffrez que les ignobles français racistes aient des héros qui ne soient pas des gaucho pacifistes importateurs de migrants.

      • Napoléon a été un bon militaire et un piètre politique ! Il a pris l’Europe pour le centre du monde et à dilapidé là les ressources de la France, au lieu de concentrer ses efforts sur le Grand Large…

    • Et si au lieu de se flageller perpétuellement, on appréciait une période ou le mot honneur et patrie avait encore un sens?

      • Le hic, c’est que cette période, qui a commencé il est vrai dans la gloire des victoires, à fini en eau de boudin et à l’effacement politique de la France…(traité de Paris 1815).

        • Ce que nous avons de meilleur en France,nous le devons à Louis XIV et Napoléon..Rien d?étonnant a ce que ces deux illustres personnages soient detestes par les historiens vendus à l’antifrance.

      • La France est un pays qui aime à s’auto- flageller, disait un auteur peu connu du XIXe siècle, (Paul Gauthier), en référence à l’auto-flagellation anti-française emmenée par la baronne de Staël et son petit groupe d’intellos réunis autour d’elle à Coppet. Grande admiratrice de l’Allemagne et des Allemands , elle haïssait Napoléon, probablement en raison des dédains de l’Empereur à son endroit., et plaignait ces pôvres Teutons, si doux, si pacifiques, si tendres, que Napoléon avait molestés.Et sa cour d’intellos de répéter la même antienne. Seul Edgar Quinet,a commencé à comprendre , en …1836, mais s’est vu traiter de va-t-en guerre. Les autres ont mis du temps à comprendre que Bismarck armait l’Allemagne contre la France et préparait revanche et vengeance .
        Et la guerre de 1870 arriva.

    • Peut-on répondre à un tel imbécile? Cette période est la plus grande de l’histoire de France et vous un minuscule histrion dont ni le nom ni le souflle n’auront eu d’importance.

      On consacre à l’empereur un livre par jour depuis son règne, et des chinois ou japonais viennent en Sorbonne pour étudier son histoire.

      Vive l’empereur et vive Lassalle.

      • Si vous voulez mais voyons comment l’histoire s’est terminée ! Vos Chinois et Japonais sont ils au courant des conclusions du traité de Paris de 1815 ?

      • Exactement, si Napoléon n’avait pas Été trahi, la face du monde eut Été changée. On se remet d’une guerre perdue, mais jamais de la chute d’une civilisation. L’empereur est une référence pour le monde entier.

    • Vous faites un AFFRONT à ce Général de Lassalle, à la France et à Mr de Verdelhan. Vous êtes…MÉPRISABLE.

    • Heureusement que le “king” n’est pas roi de France. Au fait de qui peut-il prétendre être le roi?…. Trop facile .

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