Hommage au colonel François de La Rocque

« Notre idéal de liberté et de défense de la civilisation chrétienne repousse également le joug hitlérien et la tyrannie moscovite » (Colonel François de La Rocque, dans un discours de 1937)

Je présume que, comme chaque année, les médias nous parleront des émeutes du 6 février 1934. En période préélectorale il ne faudrait surtout pas rater une aussi belle occasion de faire peur au bourgeois en lui expliquant que la « peste brune » est à nos portes et que le danger fasciste nous guette. Et, une nouvelle fois, on nous racontera que les « Croix-de-feu » du colonel de La Rocque ont voulu mettre à bas la République, ce qui est… totalement faux.

Le 6 février 1934, dans l’émeute provoquée par le pseudo-suicide de l’escroc Stavisky, les colonnes du colonel de La Rocque, disciplinées, prennent à revers la Chambre des députés que la grosse masse des manifestants attaque par la Concorde. Elles bousculent les barrages et ont le palais Bourbon à portée de la main quand un ordre de La Rocque, en personne, les détourne et les envoie déambuler, inoffensives, du côté des Invalides tandis que les salves des gardes mobiles continuent de coucher sur le pavé parisien des centaines de manifestants.
Le colonel de La Rocque pensait, et il avait raison, que la prise d’un édifice public ne signifiait pas la prise du pouvoir. Mais il réussit, ce jour-là, à s’attirer la haine de l’extrême-droite, pour n’en avoir pas fait assez, ainsi que celle de l’extrême-gauche pour cette tentative avortée de coup d’État.

Mais qui était le colonel François de La Rocque que beaucoup d’historiens présentent comme un fasciste ? C’était un brave dans tous les sens du terme : il sert sous Lyautey au Maroc, s’illustre au feu pendant la Grande Guerre. Puis, après avoir quitté l’armée, il prend la tête des « Croix de feu », association qui regroupe les seuls anciens combattants décorés au combat.
Dans cette IIIe République – dite « République des francs-maçons » (1) – on voit naître des ligues patriotiques et/ou d’extrême-droite. Certaines regardaient d’un bon œil le fascisme italien.

Mais François de La Rocque ne saurait être fasciste, il est même résolument contre car il est catholique convaincu. Il est républicain mais totalement antiparlementaire et anticommuniste.
La crise économique de 1929, puis les scandales financiers du début des années 30, gonflent les effectifs des « Croix de feu », qui s’adjoignent les « Fils de Croix de feu », puis les « Volontaires Nationaux », trop jeunes pour avoir combattu (et dont le plus célèbre sera l’aviateur Jean Mermoz).

Les « Croix de feu » dissoutes par le Front Populaire en 1936, il crée aussitôt le « Parti Social Français » et adopte une devise qui fera son chemin : « Travail, Famille, Patrie » appuyée sur un programme un peu simpliste et quelques formules qui font mouche : « Ni blanc, ni rouge mais bleu-blanc-rouge ». Le mouvement a un épouvantail : le Bolchevique, le « Moscoutaire », le Rouge.
Le brave colonel est à son affaire dans les grands rassemblements : défilés martiaux, grands meetings, immenses « grand-messes » ; car il veut, avant tout, intimider les Rouges.

Le chef-d’œuvre de ce Kriegspiel eut lieu au printemps 1935 : les adhérents, convoqués aux portes de Paris, y trouvent des centaines de cars et de voitures dont chaque conducteur ouvre au dernier moment une enveloppe contenant des instructions précises et un itinéraire.

« Par des chemins différents, sans embouteillage, guidées par des agents de liaison aux carrefours, les colonnes s’égrènent vers l’ouest. Peu avant la nuit apparaît la flèche de Chartres. C’est presque la route de Péguy … » dira un témoin. Belle démonstration de force, totalement inutile !
Il n’empêche que 25 000 hommes ont été transportés sans heurt à 100 kilomètres de Paris.
Le colonel va les haranguer, dans une prairie, perché sur une charrette. Une fois de plus, ses militants les plus virulents se retireront avec le sentiment d’avoir été menés au bord du Rubicon pour… y pêcher à la ligne. C’est l’époque où un chansonnier ironisait en disant : « l’immobilisme est en marche et, désormais, rien ne l’arrêtera ». La droite nationale, qui n’a pas oublié le demi-tour gauche des « Croix de feu » le 6 février, ne les appelle plus que les « froides queues ». Dans la presse d’Action Française, le colonel de La Rocque devient               « Ronronnel de La Coque ».

Le colonel de La Rocque était en fait un Boulanger mâtiné de Pierre Poujade : il drainait les déçus, les râleurs et les mécontents. Il ne savait pas ce qu’il voulait mais il l’a dit avec sonorité.
Il avait le patriotisme cocardier (et un peu naïf) d’un Déroulède, qui n’a rien à voir avec le nationalisme chrétien de Maurice Barrès (2) ou le « nationalisme intégral » de Charles Maurras.

Pourtant, dans ce pays qui réécrit régulièrement, souvent de façon fallacieuse, « les heures les plus sombres de son histoire », qui se souvient encore que le colonel François de La Rocque fut aussi un authentique résistant et qu’il est mort des suites de sa longue captivité ?

Dès le 16 juin 1940, donc avant le discours du maréchal Pétain du 17 juin, La Rocque signait un éditorial intitulé « Résistance », dans le quotidien du « Parti Social Français » :
« Après avoir adressé aux Parisiens nos exhortations de courage et de fermeté, nous voulons maintenant crier à tous les Français le mot d’ordre de Résistance. Le gouvernement au pouvoir a été désigné, soutenu à cause de son programme essentiel : tenir, ne jamais faiblir. Ce gouvernement ne saurait capituler sans se renier lui-même. Il ne saurait mettre bas les armes par une simple décision. Sa décision ne saurait sortir de la ligne choisie, convenue, adoptée, sans que le pays soit d’abord, consulté, prévenu. Ou bien ce serait une escroquerie morale dont aucun Français n’a le droit d’accuser un autre Français, ce dernier fût-il son pire adversaire politique. Tous les citoyens doivent donc être prêts à la résistance totale, et jusqu’au bout. La famille PSF au seul service de la nation entière doit donner l’exemple… Une seule consigne, quoi qu’il arrive : Résistance ! »
Le colonel de La Rocque est arrêté par Hugo Geissler, chef de la Gestapo de l’Auvergne, le 9 mars 1943, ainsi que 152 dirigeants du PSF. Il est interné successivement, durant les six premiers mois, dans les cellules de la prison de Moulins, de Fresnes puis du Cherche-Midi.

Il est transféré le 31 août 1943 et déporté en Tchécoslovaquie au camp de concentration de Flossenbürg ; puis en Autriche au château d’Itter, où il a la surprise de retrouver Édouard Daladier, Paul Reynaud, Jean Borotra, Léon Jouhaux.
« La Rocque est en piètre état. La détention fut pour lui particulièrement rude d’autant qu’il souffrait des suites d’une blessure reçue lors de la Grande Guerre. C’est dans un état de cachexie, avec un œdème des deux jambes, qu’il arrive le 10 janvier 1944 à Itter, où il est examiné et soigné par un médecin de Dachau ». Après une opération chirurgicale, François de La Rocque entre en contact avec des parachutistes américains. C’est la 103e Division américaine qui le libère, le 7 mai 1945, ainsi que les autres personnalités détenues à Itter.

La Rocque revient en France le 9 mai 1945 et se voit immédiatement placé… en internement administratif jusqu’au 31 décembre 1945 afin de l’éloigner des affaires politiques, notamment des négociations du Conseil national de la Résistance.
La commission de vérification des internements administratifs réclame sa libération, mais le gouvernement ne tient pas compte de cet avis. À sa sortie d’internement, il est assigné à résidence et décède quelques mois plus tard, le 28 avril 1946, des suites de ses mois de détention.

Le colonel François de La Rocque, héros de la Grande Guerre, du Rif et de la Résistance, sera décoré à titre posthume, en… 1961, de la         « Médaille de la Déportation et de l’Internement pour faits de Résistance » et se voit attribuer la carte de déporté-résistant, qui lui avait été refusée de son vivant. Et de Gaulle rend enfin hommage, en tant que chef de l’État, « à la mémoire du colonel de La Rocque, à qui l’ennemi fit subir une cruelle déportation pour faits de Résistance et dont, je le sais, les épreuves et le sacrifice furent offerts au service de la France. » Puis le gouvernement de Michel Debré présenta « les excuses du gouvernement pour une injustice dont il mesure la profondeur.»

Pourquoi l’histoire officielle ne raconte-t-elle jamais ces choses-là ?
Le 6 février, ayons une pensée, mieux une prière, pour le colonel François de La Rocque, ce patriote qui, quoi qu’on raconte, n’a jamais voulu renverser la République.

Eric de Verdelhan

1) À cette époque, on évaluait à 30 000 le nombre des francs-maçons dans les instances politiques, parmi lesquels 250 députés et 200 sénateurs.

2) Même si Barrès a fait ses premières armes à la « Ligue des patriotes » de Déroulède.

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18 Commentaires

  1. Avec sa grosse centaine de milliers de Croix de Feu, La Rocque n’a pas osé chambouler la république le 6 février 34. Dommage mais la gueuse, elle, ne l’a pas raté par la suite après une déportation allemande qui tombait à pic.

      • Verro, tout de suite les insultes mais lisez donc les trois gros tomes issus de l’enquête de la commission parlementaire crée sur les évènements du 6 février et vous y apprendrez l’histoire de cette période et arrêtez de traiter d’infamie les gens qui ne pensent pas comme vous, le si grand démocrate.

    • D’accord avec vous Anton. Mon père, étudiant à l’époque, a participé à la manif du 6 Février avec les Croix de feu (Il y avait de jeunes patriotes avec eux) D’après mon père ces jeunes et beaucoup de Croix de Feu voulaient continuer et s’emparer du Palais Bourbon pour renverser la République “pourrie”. Ils ont été écoeurés par la décision de leur chef. Toute sa vie mn père a regretté cette décision, qu’il considérait comme un coup de poignard dans le dos de la France. Pour lui ce fut un acte crimonel qui amena le Front Populaire au pouvoir et ensuite la défaite de Juin 40.

      • On voit comment l’extrême gauche et l’extrême droite se rejoignent sur les moyens pour détruire la démocratie, et la société qu’ils haïssent…
        La violence de la rue ne donne jamais rien de bon ; les exemples historiques sont légion pour argumenter ce oint de vue !
        Pas étonnant qu’avec de telles déclarations on nous traite de fascistes…

        • Il ne s’agit pas de “déclarations” mais de vérité historique que vous ne voulez pas entendre.
          Quelle était belle la démocratie de la Troisième ! Nos grands-parents nous l’ont racontée…
          Quant au vrai fascisme, vous en ignorez certainement la teneur.

  2. quoi, il n’a pas rejoint zemmour? il a été interné par les nazis, en est mort juste après…

  3. Merci pour cet article, toutefois un peu orienté idéologiquement à mon sens. Je tiens à préciser que mon père fut très proche du colonel de La Rocque et qu’à ce titre j’ai bénéficié de certains témoignages. François de la Rocque dérangeait beaucoup de monde : les maurrassiens (qu’il ne suivit en 1934 ; et à ce titre on peut dire qu’il sauva la république) et plus tard les collabos pétainistes parce qu’il avait organisé un réseau de résistance : le Klan (lequel lui valut les inimitiés des gaullistes parce qu’il opérait de la France en liaison direct avec L’Angleterre au titre du renseignement), les socialistes qui voyaient d’un mauvais oeil le caractère social de ses oeuvres (création de mutuelles, de bourses etc.) qui leur faisaient de la concurrence, les communistes (A SUIVRE)

    • qui lui avait accolé une bonne fois pour toutes l’étiquette d’aristocrate réactionnaire et fasciste (on appréciera le stratagème classique du renversement des valeurs avec le pacte germano-soviétique) et enfin bien sûr les nazis (qu’ils déportèrent d’ailleurs) puisque c’était un grand patriote. Comme l’auteur le dit il n’avait pas manqué de bravoure pendant la Grande Guerre mais il avait surtout été imprégné de la doctrine Lyautey qui consistait à respecter les coutumes des autochtones dans leur mode de vie (et à ce titre il aurait certainement pour jouer un grand bénéfique dans le cadre de l’occupation de l’Algérie s’il n’était pas décédé de chagrin et d’épuisement (il fut dégradé et rayé des cadres ; à son retour d’Allemagne il pesait 45 kilos !). (A SUIVRE).

    • qui lui avait accolé une bonne fois pour toutes l’étiquette d’aristocrate réactionnaire et fasciste (on appréciera le stratagème classique du renversement des valeurs avec le pacte germano-soviétique) et enfin bien sûr les nazis (qu’ils déportèrent d’ailleurs) puisque c’était un grand patriote. Comme l’auteur le dit il n’avait pas manqué de bravoure pendant la Grande Guerre mais il avait surtout été imprégné de la doctrine Lyautey qui consistait à respecter les coutumes des autochtones dans leur mode de vie (et à ce titre il aurait certainement pour jouer un grand bénéfique dans le cadre de l’occupation de l’Algérie s’il n’était pas décédé de chagrin et d’épuisement (A SUIVRE).

      • Désolé pour ce doublon, la SUITE :
        (il fut dégradé et rayé des cadres ; à son retour d’Allemagne il pesait 45 kilos !).
        Cette double injustice d’avoir à la fois été traité de fasciste puis dégradé, donc injustement et atrocement calomnié, lui valut d’être réhabilité par le général de Gaulle et deux de ses ministres : André Malraux et Michel Debré. Son funeste destin, de mon point de vue, se rapprochait de celui Alfred Dreyfus mais hélas aucun journaliste-écrivain de talent ne prit sa défense. Mais il faut savoir pourquoi cette rédemption fut si tardive : on la doit aux historiens français qui, englués dans leurs approches marxisantes ne pouvaient que raisonner en termes de lutte des classes… (A SUIVRE)

      • (il fut dégradé et rayé des cadres ; à son retour d’Allemagne il pesait 45 kilos !).
        Cette double injustice d’avoir à la fois été traité de fasciste puis dégradé, donc injustement et atrocement calomnié, lui valut d’être réhabilité par le général de Gaulle et deux de ses ministres : André Malraux et Michel Debré. Son funeste destin, de mon point de vue, se rapprochait de celui Alfred Dreyfus mais hélas aucun journaliste-écrivain de talent ne prit sa défense. Mais il faut savoir pourquoi cette rédemption fut si tardive : on la doit aux historiens français qui, englués dans leurs approches marxisantes ne pouvaient que raisonner en termes de lutte des classes… (A SUIVRE)

        • Encore un doublon ! Je vais certainement trop vite pour poster…
          Et c’est grâce à l’Ecole américaine d’Histoire, plus rigoureuse et indépendante, qui se mit à explorer toutes les archives à disposition le concernant, que cette indignité et cette forfaiture furent redressées.
          Ces dérives culturelles persistent encore aujourd’hui puisque mes suggestions de réaliser une œuvre télévisuelle à son sujet furent toutes savamment écartées.
          « Casimir », comme l’avaient surnommé par dérision ses détracteurs* (A SUIVRE)

          • * Les jugements, toutefois, divergent. Pour la gauche, cet ancien officier de cavalerie à particule pérenne une France contre-révolutionnaire qui a toujours une revanche à prendre sur 1789. Pour l’Action française de Charles Maurras, il est au contraire, en raison d’un manque d’énergie dû à son loyalisme républicain, le coupable de l’échec des émeutes de février. Cela lui vaut le surnom de « Casimir », emprunté à un âne de la comtesse de Ségur. Le quolibet, récupéré du côté communiste et transformé en « Raccourcir Casimir », est l’un des slogans des défilés du Front populaire. (Source : Jean-Luc Pouthier, 1996). (A SUIVRE)

            • Les jeunes générations aujourd’hui feraient bien de prendre modèle sur Casimir qui, lui, avait créé la Parti Social Français (PSF), un parti politique français de droite conservatrice à tendance nationaliste, d’obédience chrétienne et adversaire de l’antisémitisme qui, À la veille de la Seconde Guerre mondiale, fut le premier parti de France, en nombre d’adhérents : il compta dans ses rangs plus de 500 000, plus d’un million selon certains historiens…

              • Nota : Le PSF refusa d’intégrer la Fédération républicaine de M. Louis Marin, député puis ministre après 1918 ; celui-ci avait interdit de séjour en France, pendant vingt ans, de sa propre main et sans raison apparente, mon grand-père maternel, ingénieur allemand de Dresde, très pro-français…

  4. Le programme social du PSF était très en avance sur son temps. Il inspira celui de l’Etat français (Vichy) mais aussi celui du CNR qui est encore en vigueur. Celui que les mondialistes voudraient voir jeté aux oubliettes.

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