Voici un peu plus de deux mois, Roland Dumas avait assimilé sur Canal Plus l’argumentation de Jean-François Copé en faveur du vote d’une loi destinée à interdire tout port du voile à celle des législateurs de Vichy. Raccourci pour le moins déjà on ne peut plus contestable d’un point de vue historique mais surtout douteux d’un point de vue strictement éthique.
Apparemment nostalgique du temps béni entre tous où, Ministre des Affaires étrangères (1988-1993) de François Mitterrand, Monsieur Dumas s’affichait dans toutes les réceptions des “grands” de ce monde, était vu et/ou entendu sur tous les écrans de télévision et ondes radiophoniques, cet ancien ministre devenu dès 1995 président du Conseil Constitutionnel dont il démissionna suite à sa mise en cause dans l’affaire Elf, ne manque décidément plus une occasion de tenir des discours parfois si nauséabonds qu’ils ne conduiront hélas à rien d’autre qu’à dégrader davantage encore l’image de la fonction politique en France autant qu’ils font honte aux valeurs de la République française.
Ainsi, au début du mois de juin 2010, Roland Dumas, invité dans l’émission “Ce soir ou jamais” de Frédéric Taddéi, nous a livré son analyse toute personnelle de l’Affaire de la Flottille de Gaza en des termes qui ont dû faire pâlir de honte ceux des francs-maçons attachés à l’esprit du Siècle des Lumières dont la France est l’héritière. Non pas que je conteste en quoi que ce soit à Roland Dumas le droit de s’exprimer sur ce sujet. Chaque citoyen de ce pays a en effet le droit de ne pas partager l’orientation ni les décisions politiques du gouvernement israélien en place. A la seule condition toutefois de les commenter de manière rigoureusement argumentée et sur la base de preuves incontestables et non d’allégations fallacieuses aux accents parfois diffamatoires de nature à alimenter, à encourager ou relancer les vagues d’antisémitisme et d’antisionisme qui sévissent en Europe et dans le monde depuis quelques années.
Mais avant même d’analyser les propos de Roland Dumas et afin que tout soit clair dans l’esprit de chacun, rappelons d’ores et déjà qu’Israël est la seule démocratie en place au Proche-Orient et qu’à ce titre, le gouvernement israélien fait également face à des manifestations de citoyens israéliens, à une opposition israélienne voire arabo-israélienne à la Knesset, laisse s’exprimer une presse qui est l’une des plus exigeantes au monde. Or, que je sache et comme cela prévaut dans toute démocratie digne de ce nom, les citoyens, les journalistes, les députés, les écrivains ou artistes israéliens en désaccord avec les mesures politiques de tel ou tel gouvernement israélien, ne se font pas emprisonner, torturer, violer, tuer pour délit d’opinion comme cela se voit par exemple en Iran.
Sur ce point, la moindre des honnêtetés serait que nombre de journalistes, commentateurs et élus politiques non seulement s’en souvinssent de temps en temps mais également eussent la déontologie de l’écrire, de le dire et de le répéter un peu plus souvent que ce n’est actuellement le cas en France. Car nombre de déclarations entendues, commentaires et articles lus depuis le 1er juin 2010 sont à bien des égards humiliants, voire dégradants non seulement pour les Juifs de France mais également pour les Israéliens eux-mêmes qui se voient finalement qualifiés directement ou indirectement de peuple appartenant à un pays “assassin” qui ne saurait procéder qu’à des opérations d’arraisonnement ayant abouti à un présumé “bain de sang” ! A partir de là, on se demande dès lors comment les mêmes commentateurs qualifieraient les massacres de kurdes, de chrétiens et autres exactions en tous genres commis dans nombre de dictatures qui ne sont du reste pas spécifiques au monde arabo-musulman. Exactions devant lesquelles notre presse observe pourtant parfois un bien lourd silence …
Enfin, je ne peux pas laisser Monsieur Sifaoui écrire comme ce fut le cas dans un récent article paru sur son blog que l’Etat d’Israël est un Etat “mi-théocratique”. Si nombre de peuples arabo-musulmans avaient la chance de vivre dans un Etat aussi “mi-théocratique” que ne l’est aux yeux de Monsieur Sifaoui l’Etat d’Israël, que personne n’en doute, leur situation ne serait pas aussi désastreuse que celle que les observateurs avertis du monde libre en connaissent aujourd’hui. Sur ce dossier, j’invite donc chacun à faire preuve de dignité, de maturité et d’intelligence. Le journalisme ne consiste pas à dresser des procès-verbaux noyés d’insultes envers une personne, une institution ou un Etat mais à argumenter sur la base de sources vérifiées et démontrées les thèmes abordés.
Alors que dit Roland Dumas dans l’émission “Ce soir du jamais” du 1er juin 2010 ?
1. « Ecoutez, c’est encore trop tôt mais les conséquences sont déjà visibles. Regardez ce qui vient de se passer avec la Turquie. La Turquie était le meilleur allié de la région d’Israël et rompt ses relations, rappelle son ambassadeur. Il annule ses manœuvres militaires, il devait y avoir des manœuvres militaires conjointes. …. c’est un pas de plus dans une direction qui est néfaste, nuisible et à mon avis, on va vers une situation extrêmement grave. »
Hélas, la politique menée par le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan n’est pas forcément le meilleur exemple qui soit en matière de politique des Droits de l’Homme. Ce que s’est bien gardé de remémorer Roland Dumas ce 01 juin 2009 !
Monsieur Erdogan s’est en effet engagé depuis le début de son second mandat dans une véritable politique de chasse aux opposants. Qui a oublié le sort réservé par exemple au journaliste Ergün Poyraz en prison depuis juillet 2007 ? Son crime ? Avoir été l’auteur d’un livre qui attaquait le gouvernement turc en apportant les preuves de la corruption de ce dernier. Ergün Poyraz est un exemple parmi d’autres de tous les opposants au gouvernement turc, au nombre desquels on compte aussi un certain nombre de journalistes placés en détention provisoire et sans aucune charge.
Autre exemple significatif : le 29.01.09, Monsieur Erdogan prend violemment à partie Shimon Peres lors du Forum économique mondial de Davos en ces termes “Vous avez la psychologie d’un coupable …. vous savez très bien tuer les gens”, en référence à l’intervention de l’armée israélienne à Gaza. Dès le lendemain, Emine Ayna, députée du Parlement turc, procédait à une piqûre de rappel en remémorant un épisode tragique au cours duquel des enfants kurdes avaient été tués en 2006 à Diyarbakir : « votre gouvernement aussi sait bien tuer … ».
Quelques années plus tard, Selahattin Demirtas, député de Diyarbakir, n’oubliera pas lui non plus et à juste titre, de rafraîchir la mémoire au Premier ministre turc en lui rappelant la mort de six personnes en 2008 en pleine période du Norouz, fête traditionnelle iranienne qui célèbre le nouvel an du calendrier iranien.
Enfin, dernière en date suite à l’épisode de la Flottille de Gaza : le 04.06.10, Monsieur Erdogan a osé déclarer ce que même beaucoup de journalistes n’affirmeraient pas en France : « Le Hamas a des résistants qui luttent pour défendre leur terre. Ils ont remporté une élection. ….. Je l’ai dit aux responsables américains. Je ne considère pas le Hamas comme une organisation terroriste. Je pense la même chose aujourd’hui. Ils défendent leur terre. »
Malheureusement et contrairement à ce que prétend le Premier ministre turc Erdogan, le Hamas est et demeure bel et bien un mouvement politique et religieux crée en 1987 par trois hommes issus de la mouvance des Frères musulmans, le Sheikh Ahmed Yassin, Abdel Aziz al-Rantissi et Mohammed Taha. Le Hamas est à ce titre un mouvement politique et religieux inscrit sur la liste officielle des organisations terroristes du Canada, des Etats-Unis d’Amérique et de l’Union européenne. A ces pays ajoutons le Japon qui considère également le Hamas comme une organisation terroriste. La Grande–Bretagne et l’Australie quant à elles ne confèrent ne reconnaissent le caractère terroriste que de la seule branche armée du Hamas.
Même si la présente déclaration de Monsieur Erdogan a été faite quelques jours après l’émission de Frédéric Taddéi, chacun peut aisément deviner que le Premier ministre turc semble en vérité avoir opéré un véritable revirement idéologique en vue d’un rapprochement avec l’Iran que ne pouvait ignorer Roland Dumas mais qu’il n’a à aucun moment condamné. Dans ce contexte, l’Affaire de la Flottille de Gaza ne devient ni plus ni moins que le prétexte idéal permettant à Monsieur Erdogan de rompre des relations qui n’étaient plus aussi privilégiées que cela avec l’Etat d’Israël. De fait, la situation “extrêmement grave” dont parle Roland Dumas ce 1er juin 2010 n’est pas née de l’épisode de la Flottille de Gaza mais couvait déjà depuis bien plus longtemps entre la Turquie et Israël. Situation extrêmement grave d’abord pour l’Etat d’Israël qui vit depuis des années avec le terrorisme sur son propre territoire. Quant au peuple palestinien, n’oublions pas qu’il a élu le Hamas le 26.01.06 à l’occasion des élections législatives palestiniennes qui ont permis au Hamas de ravir la majorité au Fatah et qu’en conséquence, il est également en partie dramatiquement victime aujourd’hui de ses propres choix !
Il est du reste stupéfiant que si peu de journalistes rappellent qu’Ariel Sharon, allant à l’encontre de son propre camp, avait fait procéder au désengagement de la Bande de Gaza au mois d’aôut 2005. Sept mille personnes habitants les colonies de la Bande de Gaza ont ainsi été évacuées. Et qu’a-t-on constaté une fois les élections remportées par le Hamas en 2006 ? Au terme d’une guerre civile qui a éclaté entre le Hamas et le Fatah et provoqué la mort de plus d’une centaine de personnes, le Hamas a évincé le Fatah et pris le contrôle de la Bande de Gaza en juin 2007. Donc, je le dis et je le répète, c’est témoigner d’une hypocrisie profonde que de ne pas avoir vu ou plutôt de ne pas avoir voulu voir que la situation était irrémédiablement amenée à dégénérer entre Israël et le Hamas.
2. « çà accroît les conséquences, çà accroît l’antisémitisme diffus partout en France, en Europe ; çà déclenche des réactions inverses de celles que l’on attendait. » :
A en croire Roland Dumas, ce serait donc l’intervention de la marine israélienne qui aurait accru l’antisémitisme en France et en Europe ! Cette fois-ci, le discours de Roland Dumas frise la propagande antisioniste.
En vérité, l’attaque sur les soldats israéliens a été préméditée comme le démontrent sans aucune ambigüité les propos d’Huwaida Arraf, l’un des organisateurs de la flottille qui prédisait la violence dans un communiqué : ” Ils (les Israéliens) vont devoir nous arrêter par la force.”
Mais arrêtons-nous quelques instants sur l’identité de ceux qui étaient derrière “la flottille de la paix”. Voici ce que l’on peut lire dans le dossier daté du 26 mai 2010 – soit quelques jours avant l’affaire de la Flottille de Gaza – du Centre d’Information sur les Renseignements et le Terrorisme au sujet précisément de l’IHH :
« Portrait d’IHH : Organisation islamique radicale fondée en 1992, elle a été enregistrée formellement à Istanbul en 1995. Elle est dirigée par Bülent Yildirim(….) Ces dernières années, elle a commencé à élargir ses activités aux pays européens, en établissant notamment des succursales à son nom(…) Ces dernières années, l’organisation a notamment apporté son soutien au Hamas (via la Coalition de Charité). De plus, selon des informations du Centre d’Information sur les Renseignements et le Terrorisme, IHH a dans le passé fourni un soutien logistique et financier aux réseaux du jihad mondial.
Relation d’IHH avec le Hamas : L’orientation d’IHH est radicale-islamique ainsi que anti-américaine et l’organisation est proche des Frères musulmans (le mouvement-mère du Hamas) (…) Ces dernières années, notamment depuis la prise de contrôle de la bande de Gaza par le Hamas, IHH a apporté sa coopération aux campagnes de propagande du Hamas en organisant des conférences publiques de soutien en Turquie. A l’occasion de ces conférences, auxquelles ont participé les hauts responsables du Hamas, les dirigeants de l’IHH ont exprimé leur soutien au Hamas et à sa stratégie (y compris la lutte armée qu’il prône) au mépris de l’Autorité palestinienne, rivale du Hamas. (…) IHH opère largement partout dans la bande de Gaza. ….. En janvier 2009, le dirigeant d’IHH Bülent Yildirim a rencontré Khaled Mashaal, le chef du bureau politique du Hamas à Damas et Mashaal l’a remercié pour l’assistance à son organisation.
Israël déclare IHH hors-la-loi et expulse un de ses activistes : L’organisation a fait partie d’une décision du ministre israélien de la Défense Ehud Barak en 2008 qui a banni 36 associations membres de la Coalition de la Charité (IHH figure à la 36ème place de la liste).
Le lien d’IHH au jihad mondial : Le Centre d’Information sur les Renseignements et le Terrorisme possède des informations fiables indiquant que dans le passé, IHH était lié au jihad mondial et à des éléments terroristes islamiques eu Moyen-Orient. Dans le cadre de ses liens avec le jihad mondial, elle a soutenu des réseaux jihadistes en Bosnie, en Syrie, en Irak, en Afghanistan et en Tchétchénie. Ce soutien s’est manifesté par une assistance logistique par le transfert d’armes et d’argent.
Le rôle central d’IHH dans la flotte humanitaire de Gaza : IHH a acheté trois bateaux : un bateau de voyageurs nommé le Mavi Marmaris et deux cargots. Le 7 avril 2010, le responsable de l’IHH Bülent Yildirim a déclaré à l’occasion d’une conférence de presse à Istanbul que la flotte serait “un test” pour Israël (…) Dans un discours ardent prononcé à l’occasion du lancement du Mavi Marmaris le 23 mai, il a déclaré à Israël : « Traitez bien cette crise. Si vous empêchez [la flotte d’atteindre Gaza] vous resterez isolé du monde et vous nuirez à vous-mêmes. » (Site Internet d’IHH en turc, 23 mai 2010) »
Après la lecture du précédent dossier, qui pourra encore affirmer que l’intervention de la marine israélienne ait aggravé en quoi que ce soit “l’antisémitisme diffus partout en France, en Europe” ?
Que devait faire l’actuel gouvernement israélien de Monsieur Netanyahu ? Rester les bras croisés et accepter sagement que les membres de l’IHH qui, chacun l’a désormais bien compris, n’étaient de toute évidence pas en “mission humanitaire” aient été malgré tout autorisés à décharger à Ashdod ?
Enfin, suite à cet épisode, comment ne pas être heurté par les déclarations du Ministre des Affaires étrangères français Monsieur Kouchner qui a mis en cause l’Etat d’Israël avant même de connaître exactement le nombre de morts, l’identité de toutes les personnes présentes sur le Marmara, leur armement et leurs intentions véritables : « Je suis profondément choqué par les conséquences tragiques de l’opération militaire israélienne contre la “Flottille de la Paix” à destination de Gaza ».
C’est du reste préoccupant d’entendre Monsieur Kouchner parler de la “Flottille de la Paix” quand on vient de lire ce que nous révèlent les extraits du dossier du Centre d’Information sur les Renseignements et le Terrorisme !
Evidemment personne ne doit jamais se satisfaire d’un bilan qui compte des morts et des blessés, quelle que soit la nationalité de chacun de ceux-ci. Mais ce qui est par ailleurs condamnable ici, c’est de laisser dire ou écrire, même au nom de la liberté d’expression, dans un pays qui se dit une démocratie comme la France que les soldats de Tsahal auraient eu une réaction “disproportionnée” ou pire encore qu’ils auraient commis “un massacre” délibérément après que les mêmes aient annoncé sans jamais l’avoir préalablement vérifié dès l’annonce de l’affaire de la Flottille de Gaza qu’il y avait eu 19 morts, là où chacun sait désormais qu’il y en a eu moins. Ce qui ne minimise évidemment en rien et en aucun cas les morts constatées. Eut-il encore fallu expliquer à l’opinion publique ce qui s’était réellement passé ou du moins faire preuve de réserve tant que la réalité des faits n’était pas clairement établie sans opter d’emblée pour le discours laissant imaginer “un massacre” perpétré par les militaires de Tsahal.
Sur ce point, j’invite nos lecteurs à relire l’excellent article de Max Leroy paru dans le numéro 147 de Riposte Laïque et regarder les vidéos qui l’accompagnent, dont l’une tournée depuis l’un des navires de la marine israélienne et qui ne laisse planer aucun doute sur les intentions des agresseurs. Max Leroy écrit à ce sujet : « Vidéo tournée depuis un navire de la marine israélienne, montrant les mêmes événements : les soldats israéliens descendent un par un et sont attaqués à coups de barres de fer, de couteaux, de chaises métalliques ; l’un d’eux est jeté par-dessus bord ; une dizaine d’islamistes turcs frappent avec des barres de fer un soldat israélien qui est sur le sol. »
Dans des circonstances analogues, la France aurait-elle accepté de demander à ses soldats en service par exemple en Afghanistan de se laisser tuer devant des commandos de talibans ?
3. Répliquant à Elisabeth Lévy qui parlait du blocus israélo-égyptien de Gaza, Roland Dumas prononce alors une phrase absolument stupéfiante : « Qu’est-ce que fait le Hamas ? Ecoutez, je ne suis pas tombé de la dernière pluie. C’est une création d’Israël pour lutter contre Arafat, souvenez-vous … »
L’Etat d’Israël a été crée en 1948.
Les Frères musulmans sont une organisation islamique fondée en 1928 en Egypte par Hassan el-Banna à la suite de l’effondrement de l’Empire ottoman.
En 1935, l’organisation s’associe avec le tristement célèbre Amin Al-Husseini, le grand Mufti de Jérusalem, et participe par la suite à l’insurrection palestinienne.
En conséquence, je pense que Roland Dumas devrait réapprendre l’Histoire d’Israël car par définition les faits démontrent que le Hamas dont les fondateurs sont issus des Frères musulmans, n’aurait de toute façon pas eu besoin d’Israël pour constituer une mouvance terroriste active en guerre permanente contre les intérêts des Juifs, qu’ils soient en Israël ou dans tout autre pays.
4. Roland Dumas, dans une diatribe scandaleuse adressée à Elisabeth Lévy, se met à comparer l’Etat d’Israël au nazisme.
R.D.: Vous savez ce que ça me rappelle, cette histoire ? […] Ça me rappelle – vous êtes trop jeune, vous ne l’avez pas connu – mais ça me rappelle l’avant-guerre, lorsque M. Hitler occupait le Saar et qu’il disait: c’est notre auto-défense ou que l’Italie occupait l’Ethiopie parce qu’ils voulaient un empire.
E.L.: Je crains de ne pas vous avoir tout-à-fait compris; c’est moi qui vous rappelle Hitler ?
R.D.: Mais évidemment, parce que vous ne savez pas l’histoire, mais je vous la raconte: les dictatures d’avant-guerre occupaient, allaient dans les eaux territoriales exactement comme…
E.L.: Mais la dictature, elle est où, là ?
R.D.: Vous n’avez pas connu Hitler, non ?
F.D.: Il ne compare pas la dictature, il compare le procédé.
R.D.: Oui, et donc vous avez des dictatures…
E.L.: Donc c’est moi qui vous rappelle Hitler ?
R.D.: Oui, oui. Et pour cause… la façon dont vous défendez Israël me laisse penser que vous avez quand même des bribes… et vous devriez quand même vous en souvenir !
Pour ceux qui comme Roland Dumas sont soudainement à court d’arguments dans un débat télévisé, c’est devenu un lieu commun que d’entendre l’Etat d’Israël comparé à l’Allemagne nazie ! C’est oublier les études menées depuis quelques années sur les liens entre l’islamisme et le nazisme. A titre d’exemple, je propose ici à nos lecteurs de relire ce que Paul landau écrivait à ce sujet dans son livre intitulé « Pour Allah jusqu’à la mort » :
« La convergence entre certains aspects de l’islamisme contemporain et le nazisme n’est pas fortuite, et elle permet de comprendre plusieurs dimensions largement occultées du mouvement islamiste. Le chercheur allemand Matthias Küntzl a observé que les deux mouvements – l’islamisme et le nazisme – sont apparus à la même époque, et qu’ils représentaient tous les deux une tentative de répondre à la crise économique mondiale de 1929 et à la crise politique du capitalisme libéral. Cette coïncidence historique s’accompagne d’une convergence idéologique, soulignée par Küntzel, mais très souvent passée sous silence par les spécialistes de l’islamisme.
Dans mon livre Le Sabre et le Coran, j’ai abordé le thème de la connivence idéologique entre le fondateur des Frères musulmans, Assan Al-Banna, le grand Mufti de Jérusalem Hadj Amin Al-Husseini, et le nazisme. Trop souvent, les liens entre le Mufti – organisateur de la “révolte arabe” en Palestine mandataire dans les années 1936-1939 – et l’Allemagne nazie sont attribués à une pure alliance de circonstance, en vertu du principe selon lequel “les ennemis de mes ennemis sont mes amis”. En réalité, comme je l’ai souligné et comme l’ont montré différents auteurs, ces liens traduisaient une profonde convergence idéologique et politique, qui s’est perpétuée depuis, alors même que le nazisme a été vaincu en tant que régime politique et que son idéologie a été apparemment éradiquée. Matthias Küntzel – auteur d’un ouvrage pionnier sur le sujet – et d’autres chercheurs ont abordé ce sujet tabou, en montrant comment l’idéologie nazie et son corollaire, la haine des Juifs, se sont perpétuées après 1945 au sein du monde arabe, et comment l’antisémitisme européen a été transféré au sein du monde musulman par la propagande nazie dont le Mufti Al-Husseini a été un facteur important (notamment par le biais de son émission en arabe sur les ondes de Radio Berlin). » [“Allah jusqu’à la mort”, Paul Landau, pages 277 à 278, éditions du Rocher.]
Conclusion :
Le 1er juin 2010, Roland Dumas a rejoint la longue cohorte des esprits cultivés mais qui néanmoins faussent délibérément et sans aucune vergogne le portrait d’un Etat, l’Etat d’Israël, mais aussi de tout un peuple sans jamais avoir vécu en Israël et donc sans avoir la plupart du temps une seule idée de la réalité du vécu des Israéliens. C’est tellement plus facile de se réfugier derrière un paravent en disant : « Oh ! Mais on critique l’Etat mais on n’en veut pas au peuple ». Malheureusement dans une démocratie, quand on condamne un Etat, on condamne aussi pour partie cette majorité d’Israéliens qui ont voté et donc porté au pouvoir un gouvernement quel qu’il soit.
Dans ce contexte actuel, les puissances de ce monde feraient beaucoup mieux de se poser les questions fondamentales qui permettraient d’avancer vers la voie de la résolution du conflit palestinien plutôt que de s’acharner à taper sur un Etat qui essaie, lui au moins, de lutter contre la progression exponentielle d’un fascisme islamique qui ne menace pas seulement Israël mais à terme également le monde libre dans son ensemble. Pour cela, plutôt que de désigner sans cesse du doigt l’Etat d’Israël comme le vilain petit canard qui ne voudrait jamais se remettre en question et ne songerait qu’à “persécuter les palestiniens”, les “grands” de ce monde seraient bien plus avisés de réfléchir et de proposer des solutions pour éradiquer le pouvoir de nuisance du Hamas et du Hezbollah dont chacun sait qu’ils vivent en grande partie grâce à l’Iran.
Les “grands” de ce monde seraient encore bien davantage inspirés de trouver les moyens de conduire le Hamas à renoncer à sa charte qui prévoit la disparition de l’Etat d’Israël, à reconnaître l’Etat d’Israël et accepter les Accords d’Oslo. Tant que le monde fermera les yeux sur les ambitions mortifères du Hamas à l’encontre d’Israël, aucun blocus ne pourra être levé sans laisser craindre à Israël la mise en place à ciel ouvert d’une base arrière de l’Iran au cœur de la Bande de Gaza. Tant que le monde fermera les yeux sur les dessins criminels du Hamas, du Hezbollah et de l’Iran qui sont aujourd’hui les principaux ennemis de l’Etat d’Israël, aucun dialogue, aucun espoir de voir s’ouvrir le chemin de la paix ne sera possible.
Pour que ce chemin là ne soit plus seulement un rêve, il faut que le monde adopte non plus une stratégie qui consiste à isoler moralement Israël du concert des Nations mais au contraire une stratégie qui lui permette de pouvoir combattre cet islam radical qui anéantit toujours toute idée de dialogue. Comment envisager de dialoguer avec un ennemi qui veut non seulement la mort d’Israël mais à bien des égards également celle d’un certain nombre de palestiniens ? Qui ne veut pas voir pas que le Hamas n’a pas hésité à utiliser des populations civiles comme boucliers humains lors de l’intervention israélienne à Gaza en janvier 2009 ? Qui ne veut pas comprendre que le Hamas déteste un Abou Mazen qui malgré l’épisode de la Flottille de Gaza a eu l’intelligence, contrairement la Turquie, de ne pas rompre le dialogue avec Israël ?
Pourquoi le monde est-il devenu aussi stupide ?
Pourquoi ce monde ne serait-il plus capable de faire se reproduire un épisode similaire à celui que vécurent l’Egypte et Israël le 19.11.77 où un Menahem Begin et un Anouar el-Sadate sont parvenus à se serrer la main en Israël, en dépit des parcours personnels de chacun que tout éloignait l’un de l’autre ? A bien y réfléchir en effet, rien ne permettait de penser que ces deux hommes là auraient un seul jour de leur vie accepté de se parler, de se rencontrer, encore moins de signer un accord de paix.
D’un côté, Anouar el-Sadate pas franchement connu jusqu’alors pour son “amour” des Juifs et de l’Etat d’Israël et qui au final, parce qu’il avait signé les Accords de Camp David le 17 septembre 1978 sous l’égide du Président américain Jimmy Carter, en paiera le prix de sa vie, assassiné le 06 octobre 1981 durant une parade militaire au Caire par des membres de l’armée qui appartenaient à l’organisation du Jihad islamique.
De l’autre côté, Menahem Begin qui avait été dès les années 1940 à la tête de l’Irgoun, une organisation armée sioniste connue pour ses méthodes pour le moins musclées. Menahem Begin unanimement respecté en Israël parce que les Israéliens savent ce qu’ils doivent à cet homme. Parce que les Israéliens savent aussi que Menahem Begin est le fondateur du Likoud qu’un certain nombre d’”élites” européennes mais pas exclusivement européennes non plus ne cessent de qualifier de “parti fasciste” au seul motif qu’il représente la droite israélienne sans avoir même une seule idée de ce que l’Etat d’Israël doit aux généraux du Likoud morts pour Israël. Mais pour comprendre cela et entendre les craintes actuelles des Israéliens, il faut connaître parfaitement l’Histoire d’Israël et savoir combien l’étoffe qui constitue la mosaïque de peuples qu’est le peuple d’Israël est solide et fragile à la fois. Et pour cela, il faut aimer passionnément Israël. L’aimer sans en devenir jamais aveugle pour être capable de lui dire comme à un homme qu’il a tort quand il a tort mais l’aimer néanmoins de manière tellement authentique que chaque geste d’amour permette de savoir aussi lui dire qu’il ne faut jamais se décourager dans les moments douloureux et que c’est souvent dans les crises les plus dures que la lumière jaillit.
Le monde aime-t-il suffisamment Israël pour parvenir à construire la Paix avec lui ? Voilà ce que le monde doit se demander en 2010.
Bonapartine