Je voudrais réagir à une partie des propos de Daniel Cabuzel sur le colonialisme

Je souhaiterais réagir au texte “Colonisation, faut-il culpabiliser ?”, publié par votre journal, sous la plume de Daniel Cabuzel.
http://www.ripostelaique.com/Colonisation-faut-il-culpabiliser.html
« …l’influence des rapatriés. Il s’agit d’un racisme de mépris… » en effet le mépris de l’auteur semble total pour la souffrance des français chassés de leur terre ! Certaines familles pied-noires sont restées 130 ans sur cette terre, celle de ben Bella, par exemple, 25 ans.
En quoi la colonisation française serait plus anormale que la turque (5 siècles) ou de l’arabe (qui perdure) ? La différence on la connaît ce sont des milliers d’écoles, de ponts, de ports, d’usine, d’égouts… Certes l’accès à la citoyenneté des « arabes » était difficile, mais loin d’être impossible, cependant les demandes étaient rares ; mais tous bénéficiait des protections que le droit offrait. Il n’a manqué guère plus d’une décennie pour que l’osmose se réalise, les radicaux portent une lourde responsabilité et le P.C.F. aussi.
Le racisme auquel Daniel Cabuzel fait référence à été inventé par Mitterrand, et par les crétins qui n’ont d’autres références que les États-Unis, rien de tel en Algérie ou en A.E.F. tout n’était pas parfait, ou juste, mais rien n’y était indigne, rien n’échappait à l’humanité simple.
« Le racisme est d’abord un prétexte à la spoliation et à l’exploitation et fut un des traits caractéristiques des milieux économiques coloniaux et même des milieux populaires de l’Algérie français » De quel racisme s’agit-il, celui qui consiste à libérer du triple joug de la féodalité, de la théocratie et de la misère intellectuelle ?
Faut-il rappeler l’accroissement des superficies de terres cultivées, même si, il est vrai, les meilleures furent souvent loties au profit des colons (mais au départ de petites parcelles) ; les routes et l’infrastructure mise en place permettait à tous d’atteindre des lieux préalablement déserts. Faut-il rappeler que la dernière famine est celle de 1871, faut-il rappeler l’augmentation démographique… comparez l’évolution de la situation des populations du Maroc (indépendant) et de l’Algérie entre 1848 et 1915, vous verrez, c’est édifiant.

« L’argent de la France pour la Corrèze pas pour le Zambèze » tonnait Clemenceau, et comme Colbert au XVIIeme. les ministres des colonies (ceux qui avaient une idée réelle …) eurent toujours du mal à convaincre de l’utilité et du rapport des colonies, je vous renvoi aux écrits de Lord Kitchner ou à l’affaire des chemins de fer d’A.F.N.
C’est au contraire dans les milieux populaires que le racisme au sens actuel était le moins présent, les pauvres finissent toujours pas s’entendre entre eux, voire à ce sujet l’intégration des Italiens.
« J’ai bien connu, pour des raisons familiales, les milieux coloniaux africains » moi aussi mais nous n’avons pas du connaître les mêmes ! il est douloureux de rompre avec ses habitudes de pensée, avec la « culture-camif » par exemple … « La France compte sur son territoire colonial presque tous les échantillons d’humanité, et les civilisations les plus neuves, et aussi les plus vieilles du monde. Elle ne peut pas appliquer une commune mesure aux villages canaques et aux ruines d’Angkor, à telle peuplade anthropophage du centre africain et aux lettrés annamites nourris de la philosophie chinoise qui a précédé le christianisme de trois siècles. Elle doit donc, semble-t-il, apprendre elle-même avant d’enseigner, et, chaque fois qu’elle rencontre dans une de ses colonies un effort de pensée humaine vraiment digne de son respect, elle doit composer avec lui, chercher en lui la formule de conciliation avec la pensée européenne.
»
Louis Salaun en 1911.
« Mais ce racisme-là est en voie de disparition, sauf dans les milieux rapatriés ou fascisants. » Fascistes, le mot manquait, Daniel Cabuzel devrait observer les résultats des élections en Algérie française, et se souvenir de la composition exacte de l’armée coloniale d’Italie et de Provence.
J’ai souvent rencontré des coopérants sortis de leur province, nourris de « Touche pas à mon pote », calquant leur conscience de bien nourri sur des réalités inaccessibles ; ils n’ont jamais rien compris ni à l’Algérie, ni à l’Afrique, ni même à l’islam. L’exotisme de l’expatriation tourne les sens, mais accrochés aux ressentis d’européens de gauche –en vérité le racisme réel est là !- il est difficile d’en tirer profit. Syndrome bien connu du tropisme oriental. Avec les voyages faciles et Internet on croit qu’il est aisé de s’approcher de l’autre, erreur, le tourisme n’a pas augmenté la compréhension entre les peuples, au contraire.
C’est aujourd’hui l’anniversaire de la mort de Camus, que de sottises avons-nous entendu et lu; j’ai parlé, il y a quelques années, avec Emmanuel Robles (un autre sale pied-noir raciste et pauvre) de Kateb Yacine et de Mouloud Feraoun, liberté que de crimes en ton nom, serait un résumé de sa pensée, mais autant il stigmatisait l’intolérance et la hargne du premier, autant il relativisait l’engagement du second ; son sentiment, que je partage, était celui d’un gaspillage humain et intellectuel de l’Algérie.
Si l’Algérie était demeurée française la prospérité, la laïcité et le droit y auraient triomphé, pour tous, est-ce le cas ?
Il y-a-t-il un seul exemple d’un pays musulman, ayant ou pas connu la colonisation, qui ait échappé à l’arbitraire politique, à l’écrasement intellectuel, au sous-développement ? un seul ! Il y-a-t-il un seul pays de l’A.E.F. dont la situation soit meilleure qu’il y a 50 ans, un seul !
Je n’insisterai pas sur l’amorce de relativisme que j’ai cru déceler dans ce texte, mais franchement ce genre d’analyse sommaire et conventionnelle nuit à ce que nous essayons de bâtir : une réaction politique et intellectuelle à l’islam.
Gérard Couvert

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