Jean Jaurès et Jules Guesde, le discours des deux méthodes, par Louis Mexandeau
C’est un débat essentiel, loyal mais sans aucune concession que rapporte Louis Mexandeau.
Jean Jaurès commence par définir très clairement la lutte de classe en indiquant la stratégie à suivre avant d’aborder devant une salle guesdiste l’affaire Dreyfus puis la question de la participation de socialistes à un gouvernement bourgeois.
Si pour lui la société est divisée entre capitalistes et prolétaires, elle est aussi menacée par des forces du passé, « par le retour offensif de la barbarie féodale , de la toute puissance de l’Eglise »… et pour appuyer sa démonstration, il montre à l’auditoire toute sa culture politique et ses références en citant Karl Marx : « Nous, socialistes révolutionnaires, nous sommes avec le prolétariat contre la bourgeoisie et avec la bourgeoisie contre les hobereaux et les prêtres »;
Jules Guesde lui répondra point par point et notamment sur les conséquences inévitables d’une participation ministérielle : « ce jour là il n’y aurait plus de socialisme; ce jour-là il n’y aurait plus de prolétariat capable d’affranchissement »…
Entre Jaurès et Guesde, aucun accord doctrinal n’est possible, le premier est particulièrement percutant quand il s’agit de montrer l’importance pour le prolétariat de ne pas déserter le terrain démocratique, de défenses des libertés, quant au deuxième il met en perspective la domestication d’une partie du mouvement ouvrier…
L’ironie mordante de l’histoire sera que Jules Guesde qui dénonce en ce mois d’octobre 1900 toute alliance avec la bourgeoisie et tout militarisme participera activement à un gouvernement d’union nationale alors que Jean Jaurès sera assassiné parce qu’il s’oppose à la boucherie impérialiste qui va commencer…
Ce petit livre est passionnant mais pourquoi Louis Mexandeau a t-il voulu absolument ajouter le texte : “Traîtres et Crétins” écrit par Philippe Val en 2005 ? Celui ci désigne le social-démocrate comme un trâitre et le révolutionnaire ou le communiste comme crétin. Il jette dans le même sac les révolutionnaires et les staliniens et s’étonne que l’on puisse classer plus à gauche les “crétins” que les traîtres !
Philippe Val possède quelque talent mais il devrait s’informer : dans son article paru dans Charlie Hebdo, il raconte que Jacques Doriot était un vieux militant socialiste exclu du Parti des traîtres!? Philippe Val semble ignorer que Jacques Doriot a été stalinien avant de passer à l’extrême droite!
Jean-François CHALOT
« le discours des
Deux METHODES
Jean-Jaurès et Jules Guesde
présenté par Louis Mexandeau
édition le passager clandestin
103 pages
7€
février 2007