La Dame du Beffroi : du rififi chez les ch’tis

Violette Spillebout, députée macroniste du Nord et candidate malheureuse aux élections municipales de 2020 à Lille, a déposé une plainte sur l’éventualité que Licia Boudersa, quatre fois championne du monde dans la catégorie de poids super-plumes, ait pu obtenir un poste d’animatrice sportive à la mairie de Lille en échange de son soutien à Martine Aubry.

L’enquête lancée par le parquet de Lille révélera peut-être ce qu’il en est.

Pour avoir été candidat sur la liste d’union des droites aux municipales de Lille en 2014, j’ai connu cette ambiance qui nimbe la capitale des Flandres depuis que Pierre Mauroy en a confié les clefs à sa dauphine.

Élue « au Beffroi », ainsi que les ch’tis surnomment la mairie, le 25 mars 2001, Martine Aubry a réussi à conserver son fauteuil depuis plus de 22 ans malgré un tel nombre de casseroles qu’il lui serait possible d’ouvrir une quincaillerie.

Copinage avec les Frères musulmans

Celle qui avait déclaré « 30 % de Maghrébins c’est génial, sinon on est tous pareil et je m’emmerde » avait lié les meilleurs rapports du monde avec Amar Lasfar, recteur de la mosquée de Lille Sud et président de l’UOIF. Elle ne pouvait rien lui refuser, s’affichant avec son conseil municipal à toutes les réunions qu’il organisait.

https://youtu.be/EOTutE0y2DQ

Hélas, en 2013, enhardi par la confiance aveugle de Martine Aubry à son égard, Amar Lasfar a invité le prédicateur Salah Sultan, chef du Haut Conseil islamique d’Égypte, et Tariq Ramadan à la 9e RAMN (Rencontre annuelle des musulmans du Nord) organisée par la ligue islamique du Nord qu’il préside également. Or, outre ses propos très désobligeants à l’égard des femmes, Salah Sultan avait appelé les jeunes, sur une chaîne égyptienne, à « renforcer leurs corps dans la préparation pour le djihad ».

La mort dans l’âme, Martine Aubry avait rompu avec Amar Lasfar qui, presque instantanément s’est reconverti en offrant sa soudaine amitié à Jean-René Lecerf, sénateur UMP de Lille, candidat malheureux à la mairie de Lille et futur président du Conseil départemental du Nord.

Le « massacre de Reims »

François Hollande préparant sa candidature à la présidence de la République, le PS doit élire son nouveau premier secrétaire. Un congrès se tient donc à Reims du 14 au 16 novembre 2008 au cours duquel doit être fixée la ligne générale du parti.

Trois motions s’affrontent incarnées par Ségolène Royal, Martine Aubry et Bertrand Delanoë.
Dès les premiers votes dans les fédérations, il apparaît que, encore auréolée de sa campagne présidentielle de 2007, Ségolène Royale tient la corde. Qu’à cela ne tienne : Martine Aubry ordonne à ses sbires de procéder à un bourrage massif des urnes. Elle vole ainsi le poste de premier secrétaire à sa rivale (qui annonce porter plainte et y renoncera) et cocufie ses soutiens occasionnels Hamon Delanoë.

Rose Mafia

En 2009, éclate le scandale de la fédération PS du Pas-de-Calais. Le maire socialiste d’Hénin-Beaumont est mis en examen et emprisonné. Lâché par les siens, il refuse de porter le chapeau et balance tout le système de corruption mis en place par le PS. Son livre « Rose Mafia » est digne d’un roman de Harlan Coben et met à jour un montage au centre duquel agirait en chef d’orchestre le député PS Jean-Pierre Kucheida, déjà mis en examen pour une affaire de fausses factures.

La première secrétaire du PS désavoue Dallongeville : “J’attends de savoir ce que la justice va en penser. En attendant je gèle la circonscription”. Elle ajoute :”Je connais les dirigeants du Pas-de-Calais, je ne pense pas qu’il y ait le moindre problème dans cette fédération”. Mais un peu plus tard, elle exclut Kucheida du parti pour sa candidature dissidente aux législatives de 2012.

Espérant avoir fait le ménage en 2011 dans la fédération PS 62, Martine Aubry est empoisonnée par une nouvelle affaire de corruption dans cette même fédération qui sort en 2013.
Parallèlement à ce scandale, la même année sort à Marseille l’affaire Guérini. En mars 2022, au terme d’incessants recours, la cour d’appel d’Aix-en-Provence condamne Jean-Noël Guérini à trois ans de prison dont 18 mois avec sursis et cinq ans d’inéligibilité. La nouvelle passe inaperçue en pleine campagne présidentielle.
Le Roussillon sent le roussi.

Élu maire de Montpellier en 1977, au fil des années, Georges Frèche est devenu un véritable potentat qui règne sur la région Languedoc-Roussillon. Mégalomane, sanguin, malotru, il avait publiquement décrit Laurent Fabius avec « une tronche de faux chrétien » (sic), manière de lui répondre après que celui-ci ait déclaré qu’il ne voterait jamais pour Georges Frèche aux régionales s’il était montpelliérain.
Bien que Georges Frèche soit connu pour être un soutien d’Israël et de la communauté juive, Martine Aubry le fait exclure du PS, prétextant un propos antisémite.

En réalité, dans sa haine anti-Frèche, Martine Aubry ambitionnait de le remplacer par Hélène Mandroux, maire de Montpellier. Celle-ci fera un score pitoyable, malgré le déplacement de Martine Aubry à Montpellier pour la soutenir et qui fit un flop. Ce qui fit déclarer à Georges Frèche : ” Martine Aubry ? c’est rien ! ”
L’affaire trouva sa conclusion par l’exclusion de quarante élus et cadres PS de la fédération de l’Hérault, jugés trop « frèchistes » par la rue de Solférino et la première secrétaire.

35 heures ou 35 pleurs ?

Après la dissolution juppéiste de l’Assemblée nationale de 1997, s’ensuit une campagne pour les législatives. Lionel Jospin, certain de ne pas être élu, propose d’appliquer la semaine de 35 heures à tous. Première erreur.
Deuxième erreur : il nomme Martine Aubry ministre du Travail. Celle-ci fonce tête baissée pour imposer cette réforme dont elle espère qu’elle portera son nom pour l’Histoire. Hélas, sans concertation, sans analyse ni réflexion préalable, sans définir une méthodologie spécifique à chaque secteur professionnel pour mettre en pratique cette mesure, son application autoritaire crée des complications byzantines dans plusieurs domaines d’activité, notamment dans l’hôpital public désorganisé par ce cafouillage qui marque le début de la déliquescence de ce service public exemplaire.

No, we kahn not !

Ayant d’abord caressé le projet de se présenter à l’élection présidentielle de 2012, la maire de Lille décide finalement de soutenir Dominique Strauss-Kahn. Elle se lance dans une série de plans tordus avec ses amis DSK et Fabius pour dégommer Flanby.
Mais au Sofitel de New-York, la belle Nafissatou enflamme la passion du romantique DSK et s’ensuit une affaire peu glorieuse qui naufrage la candidature du favori des sondages d’alors.
Cette fois-ci encore, on ne peut vraiment pas dire que Martine Aubry brille par ses qualités de stratège.

Une première place pour Lille

Lille est-elle une ville sûre ?
À Lille, sur un an, la délinquance est en hausse de 14,8 %.
Hormis le cadre familial, le nombre de victimes de coups et de blessures volontaires, a progressé de 23 % en un an dans la ville. Le nombre total de plaintes est passé de 1 198 en 2021 à 1 473 en 2022.
Sur une année, les forces de l’ordre ont enregistré pour Lille 25 124 crimes, délits et actes de délinquance. Et si l’on rapporte ces chiffres au nombre d’habitants pour déterminer un classement, Lille est à la 1ère place de l’insécurité sur 373 villes de plus de 22 500 habitants en France métropolitaine. Lille a un niveau de délinquance beaucoup plus élevé que la moyenne des autres villes du département du Nord.

« Élections piège à cons » (slogan de mai 68)

Martine Aubry se maintient en place grâce aux nombreuses associations qu’elle subventionne généreusement et qui veillent à ce les électeurs lui en sachent gré.
Lors de la campagne des municipales de 2014, la maire sortante n’a pratiquement pas fait campagne. Elle a organisé des réunions de vœux pour la nouvelle année pratiquement jusqu’à la veille du scrutin. Et chaque samedi, chaque quartier après l’autre, elle invitait à déjeuner les personnes âgées.

Nous avions dans notre équipe d’union des droites des jeunes Maghrébins parfaitement intégrés socialement et professionnellement. Ceux-ci me racontaient que à peine avaient-ils achevé une opération de porte à porte dans un quartier à forte concentration d’immigrés que les associations passaient derrière eux pour rappeler aux électeurs : « Rappelle-toi qui t’a trouvé du travail, qui t’a obtenu un logement, qui paye la cantine pour tes enfants, qui leur offre le sport gratuit… ».

Malgré une campagne inlassable sur le terrain où l’on nous disait souvent : « Bravo pour ce que vous faites, mais ici ça ne changera jamais ! », en 2014 nous avons obtenu 30 % des voix. Le FN a fait 18 %. Et c’est l’abstention qui a réalisé le plus gros score : 51,36 %.
Plus que serré, le résultat de l’élection municipale de 2020 a encore permis à Martine Aubry de conserver son fauteuil de maire. Ira-t-elle au terme de son mandat ? Sera-t-elle reconduite en 2026 ?
L’avenir nous le dira.

Gilles Van Rijsel