La démocratie selon Macron : cause toujours

En Mai/Juin  2017, on attendait Superman, Zorro,  ou le père Noël et on a eu Picsou, affublé d’une surdité permanente.

Au cours des mois, et après maintes péripéties, notre président  décide de passer à l’acte et de réformer la France. Louable perspective, mais son inexpérience (dont il se prévaut) va lui jouer quelques tours funestes : deux de ses célèbres ministres quittent le navire, les projets ambitieux sont mis de côté, les décisions fiscales prises à la va-vite se heurtent rapidement à un front de colères et de grognes.

Ce mécontentement se mue rapidement en fronde et génère une prise de conscience d’une grande partie de la population, notamment cette frange nommée « classe moyenne » (pas assez riche, pas assez pauvre).

La France a eu la jaunisse et en garde des séquelles.

Les partis politiques de l’opposition sont atones,  les syndicats absents,les élus de la république totalement disparus de l’horizon, de la presse et des médias, dans leur grande majorité anesthésiés.

Devant ce vide, le peuple de France a réagi plus ou moins violemment, et après des jours et des jours de mutisme assourdissant, notre président daigna s’adresser aux Français. Après quelques prolégomènes pompeux sinon abscons, quelques regrets puis : Je vous ai compris (formule célèbre prononcée  par le Général de Gaulle, à Alger en Juin 1958, pleine d’ambiguïté et de sous-entendu)… E. Macron, président de la République (60 ans après) a repris à son compte cette formule qui permet de calmer les esprits dans un premier temps, mais qui comporte un deuxième temps, celui de la continuation, la poursuite  du cap choisi sans tenir compte de ce qui a précédé… C’est une façon de contourner la grogne et les revendications, en somme, un gros mensonge, une falsification, une entourloupe… dont les politiques sont friands. Toute la panoplie de l’illusionniste : tours de passe-passe, escamotage, manipulation.
Peut-être le président a-t-il compris le mécontentement,  la colère du peuple de France, mais il poursuivra ses buts, quitte à irriter un peu plus le peuple.

La stratégie de notre président est  aussi simple que« machiavéliquement »  tortueuse, mettant au-devant de la scène son Premier ministre (considéré comme la voix de son maître), bousculant ses ministres, ne tenant aucun compte de sa majorité législative, ne modifiant en rien sa position, ses lubies, et ses ambitions.

Oui, E.Macron a peut-être compris l’exaspération des Français, mais ou bien notre président n’a pas mesuré la gravité des événements, ou bien il n’en n’a cure, ce qui signifie qu’il se fout des Français, de ce peuple qu’il appelle de ses vœux. Dans un cas comme dans l’autre, le problème reste entier.

L’action politique menée par notre gouvernement est quelque peu  désordonnée, passant d’une décision à une autre mais ne réglant pas au fond les difficultés présentes et à venir. Malgré les propos rassurants de certains ministres, il semble que l’orchestre ne joue pas la même partition, ce qui entraîne confusions, interprétations, qui sont des signes évidents d’un certain amateurisme.

Le plus désolant est de constater qu’aucune politique à long terme n’est engagée. Notre gouvernement navigue à vue, colmatant une fissure un jour, passant à autre chose le lendemain, sans aucune continuité ni logique.

S’il fallait s’appesantir sur notre niveau économique, fiscal, commercial… on serait en droit de crier « au secours, le navire prend l’eau, on coule ».

Certes, les temps sont difficiles, les revendications exigeantes, les demandes pressantes, mais n’oublions pas les promesses faites au lendemain des élections présidentielles en Juin 2017, où tout devait être réglé par un aréopage de brillants énarques, de têtes bien pleines, de lumineux et remarquables esprits découvrant l’univers politique comme de jeunes jouvenceaux  égarés dans une maison close.

Hélas, les lendemains furent pénibles et la « gueule de bois » pas loin.

Le pire, le plus grave, le plus déconcertant fut l’application de la CSG aux retraités.. Désolant, insultant, et franchement inique… Mais le gouvernement, dans sa plus sage posture apporte un bémol à cette application de la CSG aux retraités les moins « riches ».

En fait, E.Macron, sous la « pression de la rue » lâche peu à peu du lest tout en aggravant durablement la dette publique.

Est-ce pour autant la fin des revendications ? Certes non, car toutes les couches sociales, tous les corps de métier, toutes les professions…sentant une opportunité dans une pseudo-mansuétude de l’État, réclament  leur dû.

Nous traversons une zone et une période de turbulences, et les derniers événements ne vont pas apaiser un climat  délétère : l’affaire Benalla revient sur le devant de la scène et comme toujours les déclarations se contredisent, et l’Élysée reste muet.

E.Macron, premier magistrat de France est en partie coupable :

Coupable de couvrir certains faits pour le moins délictueux.

Coupable d’entretenir un silence pesant et de ne pas expliquer, éclaircir certains actes d’un certain protégé de l’Élysée.

Coupable enfin de ne pas écouter, de ne pas  comprendre et de ne pas tenir compte des réflexions des Français.

La France et son président sont malades, non pas tant de son taux de chômage, ou de sa dette abyssale, mais de son aveuglement.

Nous sommes gouvernés par des infirmes, par des handicapés.

Yves Rectenwald

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9 Commentaires

  1. Situation on ne peut mieux résumée. Bravo et merci pour la qualité de votre rédaction.

    • Oui !!! Mais où sont donc passés ses électeurs ? Ne pourraient-ils pas le soutenir en manifestant en gilet rose ? 🙂 LOL !

  2. Qu’on soit pour ou contre les gilets jaunes ,on doit quand même leur reconnaître le mérite d’avoir fait réaliser à 66 millions d’amnésiques volontaires: “zut ,c’est vrai ça ,je suis Français ,je l’avais complètement oublié”.
    On espère maintenant que chacun se l’est rentré définitivement dans la tête et ailleurs qu’à la CAF.

  3. cause toujours…
    hélas pour lui, la corde a cassé et les veaux ne veulent plus blablater.

  4. “Je vous ai compris” en fait, qu’est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire qu’on a compris mais certainement pas qu’on est d’accord avec ce qui est dit. Ça veut dire qu’on n’est pas sourd, c’est tout !

  5. C’est ce qu’a dit Woody Allen (de mémoire) : “La dictature, c’est “ferme ta gueule !” ; la démocratie, c’est “cause toujours”.”

  6. L’insurrection que craignent les politiques pointe son nez. Nos pyromanes continuent leur action néfaste et ne tentent même pas d’éteindre ce feu qui menace de s’étendre …

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