La laïcité version Fourest : les références historiques catholiques doivent disparaître, place à l'islam !
Nous le savons, Caroline Fourest est une bien étrange amie de la laïcité. Et nous sommes sans doute quelques uns à même nous être dits parfois – en souriant, tant ses raisonnement peuvent être perfides, tant les cheveux dépassent de la perruque – qu’avec une amie comme celle-là, il faudrait dans le noir marcher derrière !
D’autant plus qu’elle a de l’imagination. Toutes les semaines par exemple, il lui faut trouver une idée pour sa chronique matinale du lundi sur France-Culture. En trois minutes, dire du nouveau, ce n’est pas un mince exercice, et plus d’une fois la pensée fourestienne nous surprend, et on se dit : diable, quelle adresse ! Diction claire, ton assuré, l’omniprésente, tout en ayant l’air de dire une chose, en dit en fait une autre, et ne joue à la rebelle que pour mieux se ranger du côté comme il faut.
Et donc, le 27 décembre, Caroline Fourest nous a confié sa nouvelle idée : pour être laïque jusqu’au bout, il faut, dans les écoles, « désacraliser les jours fériés ». « Faire le tri », c’est son expression, on ferait le tri. On jetterait toutes les fêtes qui ne servent à rien. L’Assomption, le 15 août, deviendrait la fête des vacances. La Toussaint serait remplacée par Halloween. Noël ne célébrerait plus la naissance de l’enfant Jésus et se muerait en fête de l’enfant-roi, etc.. Mais on en inventerait une : le 9 décembre serait la fête de la laïcité. Les écoles disposeraient d’une liste de fêtes religieuses. Chaque religion aurait son jour, librement choisi. Il n’y aurait pas d’examens ce jour-là. On note en passant que Caroline Fourest croit que les Français partent en vacances le 15 août et qu’elle n’a pas remarqué que Halloween ne fait plus recette depuis longtemps. Broutilles. Bon. Qu’est-ce qui cloche ? Un raisonnement de Caroline Fourest, ça se renifle. Quelque chose est pourri mais quoi ?
Prenons par exemple l’argument comme quoi en bonne laïcité, les enfants ne devraient pas avoir à « justifier leurs options spirituelles ». Certes. Les mauvais esprits diront qu’il ne devrait même pas en être question. Quels enfants ? Les « chrétiens » ? Non, puisque le calendrier actuel des fêtes – qui est le calendrier officiel – ne les y contraint pas. Qui alors ? Les autres. Quels autres ? Toutes sortes. Mais quelle est la communauté qui en la matière pose problème ? Qui réclame à grands cris la possibilité de célébrer « librement » ramadan et Aïd ? La pensée réelle de Caroline Fourest est toute en pointillés. En tout cas, une chose est sûre : la communautarisation de la population scolaire ne ferait que s’accroître. Sous couvert de faciliter la vie des enfants, en faisant semblant de n’avoir d’autre pensée que celle dictée par le bon sens, est-ce le but recherché ? Mais une proposition comme celle-là pourrait avoir des conséquences bien plus graves encore.
La question qui se pose en effet est de savoir comment d’une part réagiraient les différents groupes religieux, et les populations qui n’adhèrent que très vaguement à l’une d’entre elles, voire sont complètement indifférentes, agnostiques ou athées d’autre part. On peut assez facilement imaginer les dites réactions. Les confessions très minoritaires, les juifs, les bouddhistes, les sikhs, que sais-je, n’auraient guère de problèmes. Imagine t-on par exemple les juifs choisir un autre jour que Kippour ? Et les musulmans ? Les musulmans, comme un seul homme, choisiraient l’Aïd. Et les chrétiens, les agnostiques, les athées ? Il est fort probable, les avis divergents sans cesse, qu’ils se diviseraient en d’interminables palabres et que les propositions les plus diverses, voire les plus fantaisistes, verraient le jour. Dans un pays aussi sceptique, aussi déchristianisé que la France, aux opinons aussi nombreuses que ses fromages, parviendrait-on à s’accorder sur le jour de Pâques ? Rien n’est moins sûr. Dès lors, le calendrier scolaire rythmant la vie de la société, rien n’empêcherait, la célébration de la résurrection du Christ recueillant peu de suffrages que, face à Noël, survivant vaille que vaille, mais vidé da sa substance (et d’ailleurs rebaptisé « fête de l’enfant-roi »), voué à la mangeaille et à la consommation, l’Aïd devienne la fête religieuse la plus célébrée en France !
Foutaises et fiction, diront certains. Peut-être. Mais j’insiste. L’Aïd, cessant d’être la fête d’une minorité, devenant celle de la communauté la plus nombreuse et la plus soudée, deviendrait tout simplement la référence incontournable. Comme pendant des siècles, nous nous sommes situés, sous nos latitudes, par rapport aux fêtes chrétiennes, on se situerait désormais par rapport à l’Aïd. Et le tour serait joué. Aux conséquences incalculables. Je laisse le soin aux lecteurs de Riposte Laïque de les énumérer.
On est ici évidemment dans le domaine de l’hypothèse, du prospectif. Mais je remarque que Caroline Fourest limite sa proposition au cadre scolaire. Les enfants, c’est innocent, n’est-ce pas ? On ne peut que leur vouloir du bien. Il me vient un pressentiment : ne serait-ce pas là une façon astucieuse d’habiller une idée qui, proposée pour l’ensemble de la société, risquerait de choquer bien davantage ?
Le même 27 décembre, notre « militante laïque » rappelait que la commission Stasi avait recommandé de revoir le calendrier scolaire pour y inclure Kippour et l’Aïd mais que le gouvernement Raffarin s’étant attaqué au lundi de Pentecôte, par peur de déplaire aux catholiques, l’idée fut abandonnée. Déguisée en apôtre du bon sens, Caroline Fourest la ramène.
Quelques jours plus tard, le 31 décembre, très tôt le matin, une journaliste, sur Europe 1 cette fois, avait-elle aussi une idée étrange. Avouons que peu d’entre nous songeraient raisonnablement à associer produits halal et gastronomie. N’empêche, « le foie gras halal débarque », lance t-elle, « ce peut être un gage de qualité ! » Suivit une ode au halal et l’interview d’un directeur de je ne sais quelle marque qui enfonce le clou. N’est-ce pas là une idée originale ? Le foie gras, produit franchouillard entre tous, produit d’un terroir ancestral, gagnerait en qualité s’il était halal ? Foie gras halal pour tous lors du réveillon ! Etant donné qu’une réforme comme celle que préconise Caroline Fourest ne pourrait qu’en favoriser extraordinairement la vogue, après les cantines, ce pourrait même devenir la règle lors du réveillon de Noël. Dinde halal, bûche halal, etc. Le champagne non. A condition que Noël soit encore toléré… Mais je sens que mon imagination s’emballe ! Sans doute, est-ce un mauvais rêve…
Erik Laurent