La Nouvelle-Calédonie ne doit pas devenir la Kanaky

Avenir du « Caillou » :

Le décret du 30 juin 2021 relatif à la date de la troisième consultation de l’électorat (« restreint ») de la Nouvelle Calédonie doit être annulé !

 

A Monsieur le Pasteur Rodenstein, fondateur de l’association Espoir,

Il n’y a pas un mois où je n’ai l’occasion de rencontrer à Colmar, l’un de nos compatriotes canaques (ou métissés de canaques). Immanquablement, je pose la question : savez-vous qu’il existe ici un foyer Jean-Marie Tjibaou ? Las ! La réponse est toujours négative.

Je regrette encore d’avantage l’indifférence de la classe politique, des médias, et de l’ensemble de mes compatriotes quant au sort futur de la  population néocalédonienne.

Souvent les réflexions à ce sujet ne volent pas très haut : « Bon débarras ! » ; « La Nouvelle-Calédonie nous coûte plus chère qu’elle ne nous rapporte ! » Air connu ! Cela rappelle beaucoup l’Algérie de 1962, avec le piteux résultat que l’on connait (il y a aujourd’hui plus d’ « Algériens » binationaux qu’alors d’Algériens français – 1 –) !

Passons sur le cas de l’archipel dit des Comores – plus des 2/3 des originaires des quatre Îles sont français.

Une indépendance de la Nouvelle-Calédonie se profile-t-elle à l’horizon ?

Après tout – cela du-t-il me déplaire – pourquoi pas ?

Seulement voilà, que l’on m’explique sincèrement, comment dans les conditions présentes, l’on ne se dirige pas tout droit vers une République bananière – alors justement que les jeunes générations canaques s’ancrent de plus en plus dans la République française – !

Vous connaissez, comme moi, Emmanuel Tjibaou, qui est venu, il y a quelques années déjà, tout comme sa mère, honorer de sa présence le foyer dédié à la mémoire de Jean-Marie.

Le 17 septembre 2020, avec trois autres personnalités calédoniennes, il a quelque peu « chambré » un certain Edwy Plenel, « conscience » intellectuelle et morale, pas trop Charlie et proche, entre autres, d’un incertain « frère » Tariq.

Emmanuel a osé évoquer une posture anticoloniale venue de la métropole. Que n’a-t-il écrit ?

Pour ma part, je ne crains pas d’affirmer qu’avec quelques autres joyeux drilles de son espèce, Plenel va continuer à s’activer. Il espère enfin l’avènement de la Kanaky mono-ethnique comme son appellation l’indique bien. Le processus devra s’opérer implacablement, quitte à (on me passera l’expression) « saloper » les étapes.

Hélas ! Le risque de voir se dérouler un tel scénario n’est plus seulement du domaine du rêve (ou plutôt en l’occurrence du cauchemar).

Si encore, ce qu’on appelle pudiquement la pleine souveraineté des habitants du « Caillou » s’avérait réaliste.

Pour faire court, posons quelques questions qui bien sûr sembleront incongrues à ceux qui sont habités par des certitudes muries depuis des décennies :

  • Quid des magistrats ? Il y en aura-t-il d’avantage que ceux que j’ai pu repérer à la fin des années 90 sur la malheureuse Île d’Anjouan ?
  • Et les avocats d’affaires locaux, s’ils existent, pourront-ils tenir tête aux requins, aux appétits biens plus féroces que ceux de la Baleine tricolore, qui nagent dans le pacifique ?
  • Quid de la coexistence de la justice de droit commun avec la justice coutumière, de surcroit pas toujours clémente à l’égard du beau sexe ?
  • Quid du personnel de sécurité intérieure ?
  • Quid de l’armée de Kanaky ?
  • Verra-t-on ressurgir le fantôme de Bob Denard ?
  • Et la question de la double nationalité ? Sera-t-elle réservée aux apparatchiks du nouvel Etat Kanaky et à leurs familles ? Où en est la réflexion à ce sujet, a-t-elle commencé un seul instant ?

Le chef  de l’actuel gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, Louis Mapou, qui est certainement au moins partiellement conscient de ces problèmes, vient de déclarer que la date prévue de la consultation « n’est pas bonne du tout ».

La cheffe de file du camp dit loyaliste, Sonia Backes, adopte une position passablement incohérente, entre la tenue du référendum le plus vite possible et pas de référendum du tout…

Et l’actuel gouvernement français, conscient des limites du résultat de la session d’échanges et de travail, tenue à Paris du 26 mai au 1er juin 2021, que dit-il ? Il prône l’organisation d’un nouveau… référendum avant le 30 juin 2023, pour l’approbation des  nouvelles institutions calédoniennes, aujourd’hui des plus nébuleuses…

Tout cela relève de la plus sinistre farce ! Arrêtons les dégâts et œuvrons à l’annulation du décret paru au JO le 30 juin 2021.

Ce décret n°2021-866 porte « convocation des électeurs et organisation de la consultation sur l’accession à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie ».

Déjà, l’intitulé en lui-même doit être sanctionné :

  • Il omet de préciser qu’il s’agit de la troisième et en principe dernière consultation en l’espèce. Il est bien évidemment gênant de le mentionner et le gouvernement s’ingénie publiquement à le cacher.
  • Il est question unilatéralement de l’accession à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie, autrement dit de l’adhésion à la Kanaky – République Kanaque Socialiste – à base mono-ethnique ! (2)

Un intitulé à caractère neutre aurait dû plus judicieusement faire état de l’organisation d’un troisième et dernier référendum sur la question de l’indépendance éventuelle de la Nouvelle-Calédonie.

En fait, l’Etat français en vient à tancer les Calédoniens : Comment donc, vous ne voulez toujours pas saisir la perche de la « pleine souveraineté » qui vous est si généreusement tendue ?

Ajoutons, nonobstant toute autre considération, qu’on ne voit pas comment les Sages du Conseil d’Etat ne pourront pas annuler ce décret, car il contrevient à une des dispositions de l’accord de Nouméa de 1998. Cet accord prévoit expressément un délai de 2 ans entre chacune des consultations référendaires d’autodétermination.

Je termine en vous faisant part de mon extrême préoccupation ainsi que de ma détermination à me battre pour une cause noble.

Je sollicite aussi votre appui, ainsi que celui de toute personne de bonne volonté, pour ne pas laisser en déshérence un dossier qui, je le sais, vous tient à cœur.

Bien cordialement à vous,

Jean-Michel Weissgerber

Colmar, le 08 août 2021

Renvois:

(1) Un petit détail, révélateur entre des centaines d’autres, la porte-drapeau de l’équipe d’Algérie aux JO de Tokyo était française, de Lyon. Va-t-on vers la prolifération de T-Shirts DZ69 comme j’en ai vu récemment en Seine-Saint-Denis DZ93 ?

(2) D’ores et déjà le Ministère des Outre-Mer, chiffre à 70 000 les départs possibles. Très probablement le double avec certainement des camps de « harkis canaques » (originaires de Bélep et Maré notamment).