Le mépris du peuple par nos politiciens prépare le fascisme
Lettre ouverte aux femmes et hommes politiques
Mesdames et Messieurs les politiciens,
« Toute forme de mépris, si elle intervient en politique, prépare ou instaure le fascisme ». Albert Camus (L’Homme révolté – 1951)
Les élections régionales de 2015 peuvent être considérées comme un bon cru eu égard au taux de participation au second tour qui s’est élevé à 58,53 % des inscrits alors qu’il s’établissait à 51,08 % en 2010.
Il n’a pas échappé à nos concitoyens que ces élections étaient la dernière consultation de niveau national avant les élections présidentielles de 2017 et avaient, par conséquent, valeur de test.
C’est pourquoi ceux-ci se sont fortement mobilisés, tout d’abord en raison de l’intérêt qu’ils portent au développement de leur territoire et ensuite de la menace qui pèse chaque jour un peu plus sur leurs conditions de vie ; aussi, face à la faillite de la classe dirigeante, ils ont souhaité au premier tour crier leur désarroi et leur désapprobation et appeler au changement.
Chaque parti politique aurait dû logiquement, tout d’abord, se féliciter du bel élan démocratique de premier tour puis tout aussi démocratiquement, en tirer des conclusions non moins démocratiques pour préparer le second.
Mais c’était sans compter sur le cynisme de nos élites parisiennes, de droite comme de gauche, qui, sentant le vent du boulet, ont fait une toute autre analyse de ces premiers résultats qui venaient de porter le Front national en tête, au premier tour, de ces élections régionales.
Ils en ont déduit que le système était menacé et qu’il fallait le défendre coûte que coûte. Non pas pour nous, les citoyens, mais pour eux, leurs postes et leurs privilèges ; le gâteau est trop bon.
Dès lors, leur priorité n’était plus la lutte contre le chômage et l’immigration de masse, la paupérisation et le terrorisme grandissant, mais… seulement contre le Front national et ses électeurs.
Alors ils se sont tous mobilisés ! Et de quelle manière !
Dans un show insensé, nous avons vu nos dirigeants fustiger à l’unisson ce parti composé, à leurs yeux, de « chemises brunes » et se métamorphoser en rabatteurs de voix au profit de la droite ; avec à la baguette leur Premier ministre, pour qui le Front national allait nous conduire à une guerre civile, rien que cela.
Et comme si cela ne suffisait pas, les dirigeants socialistes sont allés jusqu’à contraindre leurs adhérents à boire le calice jusqu’à la lie en livrant, à l’ennemi de toujours converti soudain en ami de circonstance, les fiefs de Pierre Mauroy et Gaston Defferre.
Cette bronca parisienne a malheureusement trouvé aussi son écho jusque dans nos provinces, leurs villes et leurs villages comme en témoigne le courrier adressé par certains maires à leurs concitoyens. Je constate que, droit dans leurs bottes, le petit doigt sur la couture du pantalon, au premier coup de semonce, ils ont fait bloc derrière leurs édiles et n’ont pas hésité à sommer instamment leurs administrés d’en faire de même et de faire « barrage » au Front National.
Mais dans quel pays sommes-nous ?
Je ne vais pas avoir l’outrecuidance de faire un cours de droit constitutionnel, mais puisque vous semblez l’avoir oublié, en cédant sans résistance aux sirènes de votre parti, je me dois de vous rappeler que nous sommes dans un pays démocratique où le droit de vote est précisément à la base même de cette démocratie. Et que pour être démocratique, ce vote doit être égal pour tous et secret, afin d’éviter toute pression sur le résultat.
Je ne saurais trop vous recommander de vous rapprocher de monsieur MASSERET, candidat de la future région ALCA, homme politique d’expérience et aussi de terrain qui manifestement n’a pas voulu être complice d’un tel déni de démocratie : « Quand on me demande de me retirer, on me manque de respect, on manque de respect au mouvement socialiste en disant allez, retire-toi, tu gênes » — , ni qu’on se moque de lui : « La responsabilité, elle n’est pas sur ma pomme. Vous voudriez, comme ça, que l’on abandonne le terrain en rase campagne ? Ce n’est pas mon socialisme ». D’ailleurs le résultat du deuxième tour lui a donné raison.
Oui, Mesdames et Messieurs, je suis profondément déçu par votre attitude, non seulement parce qu’elle est antirépublicaine, mais encore parce que vous vous trompez de combat.
D’autre part, comme élu, vous savez pertinemment que la voix des citoyens quelle qu’elle soit doit être respectée ; dans notre village, comme dans tous les autres d’ailleurs, aucun parti ne peut nous conduire à la guerre civile ; mais, en revanche, nous avons besoin de la participation de tous les habitants pour avancer et tenter d’améliorer chaque jour les conditions de vie matérielle et sécuritaire que chacun d’eux est en droit d’attendre.
La confiance des Français dans leurs femmes et hommes politiques continue de reculer, y compris maintenant pour les maires.
Je vous prie d’agréer, Mesdames et Messieurs, l’expression de ma considération la plus distinguée.
Johan Zweitakter