Les musulmans de France disposaient déjà de leur rassemblement annuel avec les Rencontres annuelles des musulmans de France au salon du Bourget. En avril dernier, ce fut la 28° rencontre organisée. Cette manifestation organisée par les intégristes de l’UOIF permet aux musulmans de France de renforcer leur solidarité communautaire et d’exercer chaque année une démonstration de leur montée en puissance.
Elle bénéficie dorénavant de l’adoubement d’une forte couverture médiatique et même parfois de la venue antilaïque de politiques français, comme la députée militante catholique Christine Boutin ou le ministre de l’intérieur Nicolas Sarkozy en 2003, qui avait d’ailleurs été conspué lorsqu’il avait rappelé que la loi française oblige les femmes à être photographiées tête nue sur les papiers d’identité.
Les organisateurs de ce rassemblement ont au moins la sincérité d’annoncer la tonalité politique de leurs objectifs (1) : « c’est avant tout le rendez-vous de tous les musulmans de France. Une occasion pour affirmer sa foi, son appartenance religieuse et expérimenter la fraternité musulmane dans un cadre agréable. » ; « cette rencontre est un moment fort permettant d’affirmer des positions et faire entendre notre voix et celle de millions de musulmans qui se reconnaissent dans notre discours. C’est un des moyens les plus efficaces qui nous permet de diffuser notre pensée et d’exposer nos choix religieux, stratégiques et politiques. » Leur dessein communautariste est clair et net.
Surfant sur ce succès communautariste, un autre mouvement islamique lance un rassemblement analogue, visant à compléter l’offre communautaire par une autre stratégie. Une Union des musulmans de France (UMF) a organisé un Salon international du monde musulman lors du week-end du 17 au 19 décembre. Cette association se présente sur son site (2) comme ne cherchant pas « à ressembler aux autres associations notoires déjà existantes ; elle a sa propre identité, ses propres valeurs. » Elle entend agir pour la défense de l’islam en contribuant « au bien-être (spirituel, matériel, intellectuel) des autres (musulmans et non musulmans). » Apparaîtrait donc, si on n’y prenait pas garde, un souci d’ouverture au non-musulman.
Un premier doute sur leurs réelles intentions était déjà apparu en apprenant la date de leur salon. La fixer le 25 décembre avait été ressentie par beaucoup comme une provocation (3). Rebondissant par une pirouette, les organisateurs avaient fini par modifier la date jurant leur grand Allah, qu’on s’était mépris sur leurs intentions (4) et qu’au contraire, en choisissant Noël, ils avaient souhaité « s’inscrire dans une logique d’échanges et favoriser un retour vers des valeurs humaines de partage et de tolérance » et que cette « période de paix et de fraternité [leur] semblait plus propice aux dialogues interconfessionnels » ; on sentait déjà poindre là le prosélytisme masqué.
Car, à l’inverse de l’UOIF, l’UMF reprend tous les poncifs et le vocabulaire de la bien-pensance occidentale : partage, dialogue interculturel, multiculturalisme, richesse de la diversité, etc… Toute une argutie pour convaincre de la modernité de l’islam, de son accès aux Lumières comme dirait Malek Chebel. Aussi est-il évoquée « une ambiance conviviale de partage culturel et sur une note spirituelle » (5) ; ce salon est un « lieu du mieux vivre ensemble » (6). « Ce salon se veut être un lieu de rencontre, de partage et de dialogue des culture. » (7) Pour justifier cet alibi, participeront quelques naïfs utiles comme les inconnus Père Michel Lelong, et rabbin Gabriel Hagaï, qui ne représentent qu’eux-mêmes.
Alors qu’en est-il réellement de l’application de ces beaux principes ? En fait de diversité culturelle, il s’agit de nous présenter « une multitude de cultures marquées par l’islam – arabes, turques, asiatiques ou nord-africaines – [qui] ont développé un patrimoine culturel et intellectuel d’une étendue exceptionnelle.. » (8) En fait de découverte des cultures du monde, le visiteur ne découvrira que celles du monde musulman. Le visiteur non-musulman sera convié à un bain conditionnant dans la plus pure tradition islamique, le pompon revenant indéniablement à la garderie d’enfants. « Tout au long de cet atelier, l’enfant sera amené à voyager, à travers une ambiance orientale et désertique, dans un lieu où tous ses sens seront mis en éveil (sic) ; il y découvrira, connaîtra et ancrera son amour, son admiration et son respect pour le Prophète Mouhammed (saaws), miséricorde pour l’univers. » (9) Une curieuse conception à l’éveil critique et à la diversité d’opinions !
Le mâle présent échappera à la découverte de l’autrui féminine, à cause de ses malsaines pulsions virilo-animales ; en effet afin de protéger les sœurs présentes et afin de favoriser un vivre ensemble ségrégatif, un « défilé Fashion Show, animé par la comédienne Samia Orosemane, [était] prévu dimanche à 18h. Que les hommes se gardent : seules les femmes pourront accéder à l’espace réservé où se déroulera le défilé » (10). Leur affirmation d’un attachement au multiculturalisme et à la diversité relève donc d’une totale arnaque.
La lecture de réactions sur des sites islamiques, de visiteurs de ce salon nous montre bien leur total désintérêt pour la diversité culturelle ; ainsi sur le site al-kanz (14) un blog professionnel, affirmant sa vocation à favoriser l’expansion d’un marché des consommateurs musulmans, peut-on lire la désapprobation de la présence de stands dédiés à la culture musulmane chiite, considérée comme hérétique, Un autre contributeur exprime « qu’Allah unisse les musulmans de France, d’Europe et du monde, et qu’il fasse que chacun se bouge un peu plus pour la oumma ». Aucune considération pour les autres cultures et tout pour l’islam.
C’est bien le reflet de cette religion profondément monoculturelle, et qui n’a aucune considération pour les autres cultures, si ce n’est stratégique. Le multiculturalisme envisagé par les bobos est totalement étranger à la culture islamique ; la coexistence de cultures sur un territoire peuplé par une large majorité de musulmans n’est envisagée d’un point de vue islamique que sous la perspective de la dhimmitude, c’est-à-dire la discrétion et la soumission des cultures non-islamiques à l’islam.
Heureusement, les médias furent rares à nous présenter ce simulacre de « partage culturel » ; peut-être parce que cela n’était que la première édition. Il est à craindre qu’ils soient plus nombreux les années futures. Ces 5 journaux (11) n’ont fait que reprendre le texte de l’AFP. Un texte cependant bien dégoulinant de complaisance, reprenant les arguments de l’UMF, et dénué de toute vision critique : « le premier “Salon international du Monde musulman” qui se veut apolitique et non communautariste » ; « une partie des 20.000 m2 dévolus au Salon sera occupée par des expositions, consacrées notamment à “Al-Andaluz” (l’Andalousie), “Les sciences arabes”, “L’islam ou les fondements de la religion musulmane” » ; « nous espérons qu’il drainera un public varié, non communautaire » On retrouve là aussi l’usuel compliment à l’apport de l’islam à la tolérance et à la pensée européenne, mystification toujours aussi peu remise en cause.
Preuve supplémentaire de l’efficacité de leur propagande, les organisateurs du salon ont obtenu le relais d’organisations commerciales ou administrati
ves chargées de promouvoir diverses manifestations. Ainsi, entre autres, le salon de paris, Tourisme 93, ou Foires info y ont contribué (12). Nous noterons donc avec consternation que le patrimoine culturel islamique est considéré aujourd’hui comme un attrait du département de la Seine Saint-Denis, au même titre que l’abbaye de Saint-Denis. Il est moins surprenant de constater que Télérama présente la visite de ce salon comme une possibilité de sortie en ce week-end de Noël (puisqu’ils n’ont toujours pas modifié la date du salon) (13) ; c’est tellement exotique mon très cher, n’est-ce pas ?
Avec 40 000 visiteurs sur deux jours, il est désolant, mais pas surprenant de constater que ce fut un succès pour les organisateurs. Ce salon paraît encore plus dangereux que celui de l’UOIF, car il avance masqué sous les habits d’un islam qui se déguise revêtu d’une apparence moderniste, et il est à craindre que les journalistes soient donc encore trop crédules et qu’ils en fassent de la publicité les prochaines années, en mettant l’accent sur cette pseudo modernité. Le multiculturalisme envisagé d’un point de vue islamique n’est pourtant qu’une vue de l’esprit.
Jean Pavée
(2) http://union-musulmans-france.org/umf.html
(4) http://www.saphirnews.com/Le-Salon-international-du-monde-musulman-change-ses-dates_a13319.html
(7) http://www.salon-monde-musulman.com/IMG/plq-UMF.pdf
(8) http://www.salon-monde-musulman.com/salon.php
(9) http://www.salon-monde-musulman.com/espaceenfant.php
(10) http://www.saphirnews.com/Coup-d-envoi-du-Salon-international-du-monde-musulman_a13616.html
http://www.20minutes.fr/ledirect/844296/salon-international-monde-musulman-week-end-bourget
(12) http://www.salonsparis.ccip.fr/manifestation-7/man-0000005842.htm
http://www.tourisme93.com/document.php?pagendx=815&engine_zoom=FMAIDFC930027330
http://www.foiresinfo.fr/Salon-International-du-Monde-Musulman-M6665/Le-Bourget.html
(13) http://sortir.telerama.fr/evenements/salons/salon-international-du-monde-musulman,65088.php
(14) http://www.al-kanz.org/2011/12/18/simm/
