La France est à l’image d’un volcan – qui tantôt dort, tantôt gronde, tantôt explose : elle a dormi sous l’alternance gauche-droite/droite-gauche, gronde depuis que le Front National a conquis 14 mairies, et bientôt explosera parce que les manœuvres gouvernementales ne pourront rien contre la pression grandissante du mécontentement populaire. Les élections municipales sont derrière nous et le Pouvoir est en ébullition. Le chef de l’Etat y est pour quelque chose : en politique, l’ambiguïté ne saurait être une solution.
Pourtant, la classe dirigeante ne manque pas d’idées : elle lance un appel « fort », invite au « rassemblement », en appelle à plus de « justice sociale », invente le « pacte de compétitivité », le « pacte de responsabilité », le « pacte de solidarité », affirme être à l’écoute du « message des Français », et j’en passe. On l’aura compris : chacun est invité à se « retrousser les manches » !
Mais cela ne suffira pas, car de même qu’en de mauvaises terres les mauvaises herbes poussent toutes seules, de même en de mauvaises politiques fleurissent les formulations creuses, les propositions floues, les ordonnances cache-misère, les sentences moralisatrices et les inévitables imprécations contre le populisme.
C’est oublier, cependant, que ni les sentences moralisatrices ni les imprécations contre le populisme ne sauraient apporter les réponses attendues par les Français, le moralisme apparaissant comme la marque dérisoire d’une politique dépassée, et le populisme comme un détournement de sens émanant de cette même politique (1).
Quant aux formulations creuses, aux propositions floues et aux ordonnances cache-misère, leur appellation même dit clairement ce qu’elles sont.
Nous sommes donc au cœur d’une authentique « fracture sociale » opposant le peuple à l’Etat. Quand l’Etat moralise, l’impuissance est déjà là. Par contre, la puissance du peuple est la santé même de l’Etat. Il ne s’agit pas ici de puissance subversive, mais de puissance économique, seule solution au moralisme dévastateur. L’Etat devrait en tenir compte, au lieu de réduire son action à une feuille de route coupée du réel.
Or, pour n’être pas coupé du réel, l’Etat doit d’abord dépasser sa couleur politique, afin de retrouver les couleurs nationales. Qui a compris cela a compris pourquoi, désormais, aucune dérobade n’est possible.
Maurice Vidal
(1) Depuis les années 2010, le terme « populisme » a pris un sens péjoratif. En réalité, est « populiste » tout ce qui prône le « recours au peuple » et s’incarne, de ce fait, dans une critique des élites, dont la particularité foncière est de ne pas tenir compte de « la vie des gens ».