L'émouvant hommage de Benoît Raisky à Christian Jelen

christianjelenC’est tellement rare les êtres qui reconnaissent s’être trompés que je ne résiste pas à  porter à votre connaissance ce passage des pages 59-60 du dernier livre de Benoît Rayski Comment je suis devenu un sale Français:
J’avais un ami. Il était juif comme moi. Polonais comme moi. Mais pas rouge. A l’époque où nous nous gargarisions de Jean-Paul Sartre, lui, tenait pour Raymond Aron. Il avait raison et nous avions tort.
Il allait, défricheur infatigable, là où nous ne voulions pas aller. Dans les banlieues. Il avait raison et nous avions tort. Il voyait ce que nous ne voulions pas voir: des êtres déstructurés, des familles abîmées par la polygamie, un condensé de violence sans cause. Il avait raison, et nous avions tort. Alors, il entendait ce que nous ne voulions pas entendre: “Nique la France!” Il avait raison et nous avions tort.
C’était il y a vingt ans. Christian Jelen, c’était son nom, avait tout vu et le racontait avec passion dans ses livres et ses articles. Imbéciles que nous étions, nous décrétâmes qu’il apportait de l’eau au moulin du Front National. Et ce fut la rupture. Il était “facho ” et “réac”. Aujourd’hui, c’est moi qui suis “facho” et “réac”.
Christian Jelen est mort en 1998,* l’année de la parution de son dernier livre, La Guerre des rues, la violence et les jeunes. Il suffit de changer les dates et nous sommes dans la France d’aujourd’hui. La même, en pire, que celle d’alors. Quel éditeur oserait aujourd’hui republier son livre? J’ai une dette à l’égard de Christian Jelen. Et je vais tenter de m’en acquitter. En nommant plus fort que lui, et avec plus de hargne (je n’ai pas peur de ce mot), les coupables, les vrais coupables de ce désastre.”
En relisant avec émotion la dédicace de son livre La France éclatée ou les reculades de la République, j’ai retrouvé la date exacte de sa mort: le dimanche 25 octobre. Martine, sa femme, que j’avais rencontrée avec mon compagnon lors d’un déjeuner dominical à Vendôme, m’avait téléphoné le lendemain : nous perdions un ami, un inlassable pourfendeur du communautarisme, un vrai amoureux de la France, un défenseur de l’école et de la méritocratie républicaine et de l’intégration. Je ne suis pas la seule à considérer, au CVDL, que sa mort a été une perte irréparable pour les défenseurs de l’intégration et de la laïcité.
J’ai donc écrit à Benoît Rayski dont j’apprécie les analyses et le style aussi bien dans ses papiers sur le site Atlantico que dans Causeur pour le remercier de son honnêteté intellectuelle et lui dire pourquoi nous aussi, à Vendôme, nous avions une dette envers lui. Pour les adhérents récents qui ne connaîtraient pas son article sur l’affaire du lycée Ronsard en 1993-1994 et pour les adhérents anciens qui ne les retrouveraient pas dans leurs archives, je mets en P.J. et l’édito de Claude Imbert et l’article de Christian.
Jelenimbert
C’est grâce à lui que Bayrou a pris conscience à l’époque de l’ampleur du phénomène du voile islamique et de l’offensive communautariste musulmane dans les collèges et les lycées, c’est grâce à lui que le ministre pour la première fois a commencé à réagir avec la circulaire Bayrou, pas suffisamment toutefois car le docteur Abdallah (Thomas Milcent) publiait quelques mois après aux éditions Intégrité (!) son petit livre vert: Le voile islamique et la République : mode d’emploi, enfin un mode d’emploi un peu spécial, puisqu’il s’agissait de montrer les manières de contourner la circulaire. Dans la deuxième motié de l’opuscule il détaillait d’ailleurs un cas exemplaire: je vous le donne en mille, celui du lycée Ronsard à Vendôme.!……
Oui, nous avons une dette envers Christian et aujourd’hui, il nous manque plus que jamais.
Christine Poisson
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