Les 600 maires choisis par Macron ne représentent pas la France
La première réunion des Français pour le débat national a été au départ faussée : les 600 maires triés et invités à rencontrer Macron ne représentent en aucun cas la France. Ils ne sont que des élites locales qui, et beaucoup l’ignorent, peuvent agir en petit chef. Leurs décisions peuvent être prises sans consultation, sans négociations et apparaît alors un sentiment de favoritisme. Dans mon livre « Maires à la dérive » je cite l’exemple des subventions souvent distribuées selon l’opinion politique de l’association. Dans une commune au maire communiste, les abonnements aux journaux seront pour « l’Humanité » mais pour un maire républicain, ce sera le Figaro. Une activité contraire aux opinions politiques du maire ne sera pas financée tandis qu’une autre plus « appropriée » le sera.
Dans ce village au nom sortant d’un conte de fée, Grand Bourgtheroulde, Macron se sentait à l’aise : le maire (aussi député), Bruno Questel, un turncoat du PRG (Parti Radical de Gauche) l’a accueilli à bras ouverts comme une divinité. Au milieu d’un parterre de la vieille France, car les invités dépassaient pour beaucoup les 60 ans et étaient retraités, comme une large majorité de maires des zones rurales. Qui veut passer des heures souvent saugrenues lors de gros problèmes pour une misérable récompense d’un millier d’euros ? Les emmerdes sont trop importants pour les jeunes et cela fait un complément de revenu pour améliorer leur situation financière. Personnellement comme adjoint de mairie (j’ai refusé d’être maire, faute de temps), ma compensation était de 420 euros par mois, non imposables.
Difficile de croire que ces 600 maires représentaient toutes les couches de la société française.
Dans le livre « Maires à la dérive », dans le dernier chapitre, je suggère de réduire le nombre de communes de 36 000 à moins de 10 000. Ce qui en fait est le cas de Grand Bourgtheroulde, « nouvelle commune de France » depuis 2016, d’après Wikipédia. C’est un regroupement de trois villages : Bosc-Bernard-Commin, de Thuit Hébert (300 habitants chacun) et de Bourgtheroulde-Infrevillle (2 500 habitants). Ce processus devrait être accéléré car il permet d’éviter certains problèmes présentés à Macron. D’abord comment un village de 150 à 500 habitants peut-il offrir les services réclamés par les Français : où trouver l’argent pour garder une épicerie, surtout lorsqu’un centre commercial s’est implanté à 8 kilomètre, un café-restaurant, une école, une poste ? Plus aucun petit « commerce » n’est rentable et par conséquent doit disparaître.
De tels services ne peuvent être offerts qu’à des communautés d’au moins 15 000 habitants, d’où la nécessité de former des centres administratifs, commerciaux publics et privés dispersés un peu partout dans les régions rurales. Ce qui est compliqué, c’est le transport vers ces centres.
Ainsi au cours de ce marathon rhétorique pendant lequel certains illustres inconnus ont eu leurs « minutes de gloriole en passant à la télé », Macron s’est senti comme un poisson dans l’eau. Il a écouté, a pris des notes et avec verve et un énorme sens du spectacle (lorsqu’il tombe la veste à la Kennedy), a déployé une farandole de réponses souvent incompréhensibles ou tout à fait à côté des problèmes qui préoccupent les Gilets jaunes.
Sa cote est remontée et il est apparu, comme au début de sa campagne électorale, flamboyant, plein de morgue, éblouissant de termes équivoques. Il a certainement retourné l’opinion de plus de 400 maires qui lui ont donné une « standing ovation » (merci à Shakespeare de nous aider dans notre vocabulaire).
Ce début est très mauvais pour Wauquiez qui nage dans les contradictions et l’effacement personnel. Sans parler de Mélenchon, collé sous la moquette médiatique à part quelques remarques stupides crachées entre deux virées aux urinoirs. Parler de Faure et du PS, de Jeunot et des Verts, du « j’sais plus » qui au PCF est une perte de temps. La seule et implacable opposante est Marine Le Pen. Elle fait peur aux LREM car elle mène encore dans les sondages. Si Macron veut obtenir 25 % des votes (souhaitait Macron), il lui faudra encore mouiller la chemise.
Mais tout peut basculer encore avec une montée des partis traditionnels laminés : ils présentent un éventail de solutions allant de la gauche à la droite et les Gilets jaunes peuvent montrer leur force et détermination en NE VOTANT PAS LREM.
Attention aux résultats : si Macron l’emporte comme premier parti aux Européennes, il deviendra encore plus arrogant et passera en bolide ses réformes sur le chômage, les retraites et tout ce qui touche (à leur désavantage) les classes populaires et les classes moyennes. Les retraités (oui, les 16 millions de retraités) seront touchés de plein fouet et subiront des contraintes inadmissibles. Évidemment, à la façon de tourbillonner de Macron Premier, beaucoup auront du mal à résister aux sirènes de néo-libéralisme de Macron.
Pour les mois qui restent, chacun à sa manière, chacun dans son milieu, il faudra persuader ses contacts que la seule leçon que pourra recevoir notre semi-dieu est une défaite en mai.
Un travail en profondeur, au niveau local sera plus efficace que des mirobolantes flambées politiques au milieu d’un public amorphe.
André Girod