Les architectes Godart et Roussel : les croque-morts de Notre-Dame

L’incendie qui a ravagé la cathédrale de Nantes, dont l’auteur, un réfugié rwandais que les autorités ecclésiastiques avaient chargé de fermer les portes de l’édifice ! et qui ne donne aucune explication à son acte criminel, tout en exprimant de vifs regrets ! ravive la polémique : il est clair que nos édifices religieux les plus significatifs de la spiritualité occidentale sont dans le collimateur des intégristes et autres excités si l’on songe au nombre d’églises chaque jour vandalisées. Mais que fait-on pour les protéger et pour punir sévèrement les coupables ? Rien, sinon les lacrymo-déplorations, les sempiternelles promesses et autres effets de torse.

Dommage pour les « rénovateurs » des édifices religieux incendiés ou vandalisés que la cathédrale de Nantes n’ait pas subi les mêmes dommages que Notre-Dame, même si, excusez du peu, un précieux vitrail du XVe siècle ait explosé et que les orgues historiques aient été réduites en cendres.

Car il existe nombre d’architectes croque-morts à tourner autour des bâtiments sinistrés pour proposer leur « vision futuriste » bien qu’esthétiquement poussive. Un exemple en était donné dans un article du JDD  du 19 juillet, nous offrant les « états d’âme » de deux architectes associés, Paul Godart et Pierre Roussel, sous le titre : « Notre-Dame méritait plus d’audace », tout en s’agenouillant par deux fois devant la décision du Président de reconstruire la flèche de Notre-Dame à l’identique et non, comme il l’avait annoncé après l’incendie, en proposant un concours international d’architectes pour une reconstruction contemporaine, ils déplorent pareille décision, précisant que leur intention « relevait moins de la mégalomanie que l’on prête à notre profession [seraient-ils donc lucides ?] que d’une véritable envie de faire renaître l’architecture sacrée de ses cendres ». Rien que ça !

Mais, que je sache, Notre-Dame n’est pas réduite en cendres, seulement la flèche érigée en 1859 par Viollet-le-Duc, copie de celle détruite à la Révolution. La prétention des deux architectes associés en dit long sur leur vision du patrimoine de la France. Pour eux, l’important c’est un patrimoine ruiné sur lequel les gens dits « de progrès » pourraient greffer leurs élucubrations architecturales. « Nous avions, poursuivent-ils, jeté les bases d’une réflexion consistant à accepter la disparition d’une œuvre d’art magnifique et la nécessité d’écrire une nouvelle page de l’histoire de la cathédrale. » Définir Notre-Dame qui, rappelons-le, n’a pas disparu, comme une œuvre d’art magnifique est un peu plat : ils auraient pu parler d’un chef-d’œuvre de l’art gothique, d’un sommet de la civilisation occidentale, de l’âme d’un pays, d’un haut lieu spirituel, d’un miracle architectural où la foi d’un peuple et d’une époque s’incarne dans le travail d’artisans de génie : charpentiers, maçons, tailleurs de pierres, sculpteurs, peintres, verriers… souvent anonymes.

À défaut d’œuvrer pour la sauvegarde du patrimoine auquel les Français sont tellement attachés (76 % selon un récent sondage) et dans lesquels se reconnaissent nombre d’étrangers admiratifs de la richesse et de la beauté de notre pays, nos deux compères préfèreraient le réinventer, le mettre au goût du jour. On retrouve ici la dévotion systématique au Progrès, tarte à la crème (rassie) où l’on joue la nouveauté contre la tradition, l’innovation contre l’obscurantisme, l’avenir radieux contre un passé poussiéreux. Une fois encore, on veut enterrer hier au bénéfice d’aujourd’hui et faire table rase de ce qui a fait notre histoire et de notre culture pour y substituer des utopies branchées.

Nos deux théoriciens déplorent que Notre-Dame leur soit passée sous le nez, occasion qui leur aurait permis de donner la mesure de leur talent ; qui en aurait fini avec ces monuments fossilisés, symbole de la France réac, pour y substituer un caca nerveux paré des plumes de la modernité.

Et nos visionnaires de déplorer que Macron, qui avait promis une cathédrale « plus belle encore » (il ne s’agissait pourtant que de la flèche !) ait cédé face au « large consensus » mis en avant par Roselyne Bachelot pour une réfection à l’identique. Ils regrettent que le Président à la « vision progressiste de l’histoire de la France » (il fut pourtant une époque où le candidat-Président déclarait qu’il n’y a pas de culture française) n’ait pas su résister à « la vox populi et à quelques conservateurs psalmodiant la charte de Venise ». À nouveau resurgit le mépris du peuple et des conservateurs, individus jugés bornés et incapables d’apprécier l’architecture contemporaine, l’art contemporain, la musique contemporaine, tout ce que l’élite branchée se doit d’admirer, sous peine d’excommunication. Au passage, nos architectes associés fustigent « la cohérence architecturale » célébrée par l’archiprêtre de la cathédrale, concept à leurs yeux désuet et ridicule. Et nos Trissotins de l’inviter à prendre conscience « des époques et des styles qui se sont superposés pendant des siècles sur cette bâtisse ».

Manque de pot, Notre-Dame fut construite à l’initiative de Maurice de Sully mort en 1196, entre 1163 et le milieu du XIIIe siècle, ce qui lui donne sa cohérence et sa grandeur. Les autres ajouts furent mineurs, jusqu’à Viollet-le-Duc qui répara les dégradations des XVIIe et XVIIIe siècles. Il semble échapper à nos deux visionnaires que Notre-Dame, cette « bâtisse » comme ils disent, a marqué l’histoire de France, a vu passer les rois et les grands hommes, de Saint-Louis à Charles VI, d’Henri IV à Louis XIII, de Napoléon à de Gaulle ; qu’elle fut le cœur battant de Paris, comme l’a si bien montré Victor Hugo. Le cœur de la France.

Pour les deux larrons arc-boutés sur leurs certitudes progressistes, « L’architecture, premier des arts, a-t-elle pour vocation de n’être qu’un instant figé dans le temps et l’espace jusqu’à ce que les flammes le détruisent ? » (Y aurait-il donc une fatalité incendiaire ?) Car pour eux, en reconstruisant à l’identique, « nous ne faisons que conforter l’opinion publique dans sa certitude que tout est éternel ». Pour cette prétendue élite, l’art est ludique, éphémère, alors que l’art nourri du passé mais sans cesse renouvelé, imprègne et façonne les générations successives. Leur art iconoclaste, quand il prétend faire acte de création, use de matériaux périssables sous leur déguisement révolutionnaire, art qui n’est, le plus souvent, que ridicule et affligeant. Art totalitaire car, dans sa volonté hégémonique, il invite à jeter aux oubliettes tout ce qui ne souscrit pas à son impérialisme.

La reconstruction à l’identique, définie comme « le pastiche d’un vestige déjà anachronique », est pour eux une injure à l’art contemporain. Pourtant, quand on voit ce qui a été proposé comme projets de flèche new look, on peut s’interroger sur la santé mentale de certains artistes ou concepteurs d’avant-garde. L’ego boursouflé d’artistes autoproclamés débouche rarement sur une grande œuvre capable de traverser les siècles, car ici l’individu, ivre de vanité, porté par la mode et la reconnaissance de la tribu, prime sur l’œuvre et prétend lui donner un sens qu’elle n’a pas.

Il est d’autres architectes qui ont entonné la même rengaine. Dans Le Parisien du 10 juillet, la question était posée : fallait-il reconstruire la flèche à l’identique ? Roland Castro que l’on a connu moins consensuel, se range, après avoir beaucoup hésité, dans le camp des traditionalistes, même si c’est avec des arguments puérils : le XXIe siècle n’étant pas religieux, Notre-Dame est devenue un bâtiment républicain qui fait partie de notre mémoire collective ! En revanche, le tant célébré Jean-Michel Wilmotte est violemment contre, y voyant « l’éternel clivage entre les traditionalistes et ceux qui se tournent vers le futur » À preuve, avance-t-il, on aurait pu installer la fibre optique sur la flèche avec un éclairage ad hoc, ou créer une troisième flèche symbole de notre époque ! D’autres avaient proposé des réalisations tout aussi absurdes, dont les gens de bon sens (le peuple inculte bien sûr) se sont gaussés à juste titre.

En désespoir de cause, ces bobos suffisants en appellent à l’esprit rebelle de la France qu’une construction radicalement provocatrice aurait pu mettre en avant. L’esprit rebelle ne serait-il pas plutôt de juger librement sans s’inféoder à une pensée formatée et ringarde ?

Max Chaleil

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31 Commentaires

  1. Cent sept ans pour construire Notre Dame de France.D’ou l’expression populaire”on ne va pas attendre cent sept ans…”

  2. Architectes ou … Archi technos sortis de l’Ecole Nationale d’Architecture (ENA) ? ?
    “Changer la Flèche, c’est déboulonner une Statue” !
    Une de plus….

  3. J’ai compris enfin pourquoi les cathédrales brûlent, la société des architectes futuristes veut les transformer en objets contemporains, car l’histoire ne leur suffit pas. Alors pourquoi pas la cathédrale de Reims en plug macronien ?

    • Reims a été restaurée en béton, au cas où vous ne le sauriez pas.

  4. Quand ces 2 bobos seront capables de construire un bâtiment aussi beau et qui tienne mille ans ils pourront revenir. En attendant qu’ils retournent se coucher. Tout ce qu’ils font commence à se dégrader sérieusement au bout de 5 ans. Mdr…..

  5. Jean Nouvel, architecte qui par le plus grand des hasards obtenait tous les appels d’offre a bien massacré l’Opéra de Lyon. La façade d’origine a été conservée (classée). Par contre, ce que Nouvel a fait de l’intérieur est honteux et consternant. Ce n’est pas possible d’avoir autant de mauvais goût. Le sol est couvert d’un genre de lino. L’escalator est bien en vue comme aux Galeries Lafayette. On accède à la salle où on est saisi par la désolation du lieu. Toujours une espèce de lino. Des fauteuils de salles de cinéma “premier prix”.
    Toute cette horreur a été couronnée pour plus de 10 ans de procédure du fait d’énormes mal façons !!!!!! Architecte Nouvel : suffisance et insuffisance.

  6. Quelle est la valeur ajoutée d’un architecte… Suffisance et insuffisances. Chier du béton partout et défigurer nos paysages, nos monuments, nos villes. L’art de paraître en essayant de s’en mettre plein les poches. Ni artistes, ni concepteurs et encore moins techniciens. Des farfelus inutiles qui vont tout particulièrement souffrir de la crise après avoir contribué à ruiner notre pays et trompé les maîtres d’ouvrages. Ils ne nous manqueront pas. Ces deux traines-patins n’ont pas de complexes: ils sont à notre Dame ce qu’un bâton de surgelé findus est à une bonne marmite de bouillabaisse. Ces deux idiots qui croient faire l’histoire alors que c’est l’histoire qui les fait… et qui les défera.

    • Quelle est la valeur ajoutée d’un architecte… Suffisance et insuffisances. Chier du béton partout et défigurer nos paysages/ dixit

      Votre message est risible ! Pour vous l architecture c est uniquement le corbusier, niemeyer ou boffil..

      Vous devriez vous documenter, il y a de belles choses a voir du cote de Frank Gehry, Steven Holl, ou par ex Gluckman Mayner…. pas que du beton !
      Le carrousel du louvre du chinois en est l exemple inverse

  7. Je reproduis ici une citation magnifique qui justifie pleinement que les élucubrations des pseudo-architectes d’avant garde n’ont rien à faire sur Notre-Dame; “le contemporain est le round-up du sacré!”

  8. Un minaret en guise de flèche aurait si bien symbolisé la soumission du peuple des religieux.

  9. À mon avis la flèche ne sera sûrement pas reconstruite à l’identique car il faudrait aussi que ce soit le cas pour cette charpente surnommé la forêt car édifié en chêne massif quasiment millénaire.
    Le savoir- faire de ces maîtres charpentiers de talent qui ont bâti ce chef- d’œuvre d’architecture est- il encore enseigné ? Si oui combien d’hommes peuvent prétendre à relever ce défi ?
    Ensuite la question des matériaux , ou retrouver du bois de chênes centenaires en quantités et en qualité nécessaire ?
    Ensuite vient le volet financier mais qui apparamment a été résolu par le don .
    Et pour finir comment faire confiance à l’imposteur poudré qui sciemment a cédé à la pression populaire pour des raisons électorales et qui nous ment pour la question réelle du temps de reconstruction.
    📯⚔️🇫🇷

    • Couper des arbres centenaires(Il en faudra mille) pour reconstruire la charpente de Notre Dame, au moment où nos forêts brûlent aussi,n’est ce pas une incongruité?

  10. “(…) nos deux compères préfèreraient le réinventer, le mettre au goût du jour.” Ou plutôt à leur goût tout court, ce qui n’est forcément pas de celui des 76 % de Français !
    Sauf erreur, un monument qui fait partie du patrimoine classé protégé par l’Unesco interdirait des “retouches” autres que celles à l’identique quelles que soient les causes des dégradations subies par lui. Notre-Dame-de-Paris en fait’elle partie ?

  11. Un petit conseil, allez voir leur site et leurs réalisations. Ces 2 pseudos architectes sont tout simplement des tocards de province sans aucun talent. Triste 21eme siècle.

  12. Je me demande combien de critiques acerbes a dû essuyer cet architecte (maçon, plutôt, on disait plutôt maçon à l’époque).

  13. La flèche de Viollet le Duc n’était pas à l’identique.

    Puisqu’on avait tous les dessins et les plans de l’ancienne flèche (détruite non pas “à la révolution” mais parce qu’elle menaçait de s’effondrer), ça aurait été intéressant de se poser la question de savoir si on reconstruisait l’ancienne flèche ou celle de Viollet le Duc.

    “cohérence” “Les autres ajouts furent mineurs” C’est totalement faux ! Les piliers intérieurs rehaussés des arcs-boutants sont une invention qui n’est pas de Maurice de Sully, mais d’un architecte dont on ignore le nom, et sans qui Notre-Dame ne serait plus qu’un tas de pierre depuis des siècles.

    Ne parlons pas du presbytère et autres ajouts ultérieurs…

    On se documente un peu avant de traiter les autres de cons, même quand on a raison sur ce point.

    • C est exact la premiere fleche est édifiée vers 1220-1230, fragilisée par les intempéries et démontée à la fin du XVIII siècle…
      a réinvente un Moyen Age de fiction imbecile… car cette fleche est une representation absolument pas historique du moyen age, donc une idiote du 19 siecle… Viollet-le-Duc a fait la meme betise graphique avec les tours de Carcassonne d ailleurs…
      Donc moi j estime que reconstruire une fleche du 19 siecle a l identique ou 21 siecle, est un non sens, j aurais aime plus d ambition dans un projet plus novateur et moins retrograde ou conservateur

      • Correctif de mon texte precedent

        Viollet le duc a réinvente un Moyen Age de fiction imbecile, assez peu de gens le savent.
        car cette fleche est une representation absolument pas historique du reel moyen age, donc une idiotie du 19 siecle…

        Vous avez le meme type de fantasmagories avec le chateau de DISNEYLAND… ( moitie chateau francais ou chantilly bavaroise… )

        • Victor Hugo,Walter Scott ,Violet le Duc ont plus fait pour la connaissance et l’amour du Moyen Âge que Lavisse ou Duby. Soyons leur reconnaissants.Le style Troubadour à aussi son charme.

          • P… de site de m…

            Encore un commentaire qui ne va pas se retrouver à la bonne place… Je le copie/colle ici.

            C’est vrai, Théodore et moi on pousse le bouchon un peu loin !

            Mais la question de restaurer la flèche d’origine ou celle de Viollet le Duc aurait dû être posée, à mon avis.

          • Encore un commentaire qui ne va pas se retrouver à la bonne place… Je le copie/colle ici.

            C’est vrai, Théodore et moi on pousse le bouchon un peu loin !

            Mais la question de restaurer la flèche d’origine ou celle de Viollet le Duc aurait dû être posée, à mon avis.

      • Violet le Duc,ne vous déplaise,a sauvé N.D.de Paris de la démolition,tant elle etait en mauvais état.De meme pour la Cité de Carcassonne,qui etait un gourbi,quand il a décidé de la restaurer.Qui aurait pu mieux faire?Je le considère comme un très grand artiste.Il a non seulement sauvé,mais sublime tous les monuments qui l’ont inspiré.

        • Attendeeeeeeeeeeeez ! Faut pas tout prendre au pied de la lettre !

          Bien sûr que oui, ce que vous dites est vrai.

          Mais certaines choses qu’il a fait, notamment Carcassonne, sont tout de même assez critiquables. Et je serais curieuse de savoir s’il n’a pas reçu à l’époque les mêmes critiques qu’on adresse à ces architectes. Il y a aussi de très belles choses dans l’architecture moderne, vous savez !

  14. “Notre-Dame méritait plus d’audace” . Je voudrais bien savoir ce que ces deux crétins ont déjà fait d’aussi audacieux dans leur vie !

    • Oh ben c’est très simple !
      Y z’ont obtenu un diplôme de merde et y s’sont associés pour mieux appréhender la merde de l’autre, y z’ont créé l’archi-scato-mégalo, on peut dire que c’est des vrais chef !
      D’ailleurs, suffit de zieuter leurs dégaines piur voir tout de suite qu’on a à faire à des Messieurs, des Cadors des Meneurs quoi !

      Sinon j’ai entendu dire qu’un chaoui saoudien bien blindé cherche des archis de renom pour revisiter ses chiottes, y devraient postuler nos deux clampins…

  15. Bravo Max Chaleil! ! Excellent commentaire que j’aurais bien aimé avoir écrit moi-même. Merci à vous d’avoir si bien saisi et exprimé l’esprit culturel français et de nous en faire part.

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