Les enjeux de la situation malienne, après le coup d’Etat militaire

Des amis m’ont fait parvenir ce matin cette information : un groupe de militaires a mis hier soir en état d’arrestation le gouvernement malien. Ce matin le Président Cheik Modibo Diarra et son équipe démissionnaient. A cette heure (11 décembre 8h09), je n’ai pas plus d’information.

Comment interpréter ce geste militaire radical, nouveau brumaire qui pourrait ne faire que traduire l’impatience de la société malienne, face aux palinodies politico-militaires et diplomatiques devant le djihad qui s’est approprié les deux-tiers nord du pays, asservissant les femmes, militarisant les enfants, interdisant la musique et les activités culturelles traditionnelles, ruinant toute activité commerciale et industrielle, et précipitant dans le dénuement un demi-million de Maliens devenus des réfugiés, sans que les Nations-Unies ne lèvent le petit doigt pour leur assurer le quotidien ?

Il est trop tôt pour y répondre

Je voudrai seulement rajouter qu’au Mali se joue beaucoup de choses. Elles dépassent le seul destin de la collectivité historique d’hommes et de femmes qui sont fils et filles des hommes d’action qui avec Soundiata Keita ont formé l’empire mandingue, devenu aujourd’hui la nation et l’Etat malien.

Un front du djihad, visant à dissoudre peuples et nations dans la « Oumma » asservie à la charia, s’y est ouvert. Comme l’expliquera une jeune femme targui de Tombouctou, dans une réunion publique il y a quelques semaines, le Mali de 2012, c’est l’Espagne républicaine de juillet 1936.

Face aux femmes et aux hommes du Mali, quelle que soit leur ethnie, leur langue, leur clan, leur « caste », il y a des bandes armées qui ont pour mot d’ordre celui de ces généraux fascistes espagnols qui opposaient à la démocratie politique et aux revendications ouvrières et paysannes de mieux être social, ce seul slogan résumant tout ce qu’ils étaient, je cite la formule de l’un d’eux : « Viva la muerte » !

Vive la mort, c’est aussi le slogan principal du djihadisme oummiste.

Bamako est devenu Barcelone de 1936. Bamako ne doit pas finir comme Barcelone de 1937-1938, étouffé de l’intérieur par les agents provocateurs staliniens préparant des procès truqués et organisant des assassinats politiques, livrant la nation espagnole à la soldatesque et aux fusillades en masse ainsi qu’à quatre décennies de dictature.

Que va-t-il se passer ?

La nation malienne va-t-elle trouver ses Danton, ses petits tambours Bara, ses Lazare Carnot ?

Va-t-elle se dresser en masse et en armes, pour briser le djihad et mettre hors d’état de nuire les inconscients et/ou les aventuriers avides de butin sonnant et trébuchant et de butin humain ; aventuriers et inconscients assoiffés de pouvoir absolu se cachant derrière le prétexte de la volonté de Dieu ; aventuriers et inconscients avides de posséder des femmes réduites à l’état de poupée gonflable sur laquelle ils auraient droit de vie et de mort.

La « communauté internationale » continuera-t-elle de tergiverser, restant engluée dans la normalitude ?

Nous observions avec nos amis, le rôle peu reluisant des Qataris.

Vont-ils enfin cesser d’alimenter en carburant les quatre-quatre djihadistes ? Vont-ils cesser de leur apporter vivres, capitaux, armes et munitions, renforts en jeunes gens disciples de Mohamed Merha ?

Il est peut-être trop tôt pour se prononcer, mais l’exigence toute récente du Qatar, adressée au Hamas -au sujet d’Israël en tant qu’Etat national du peuple juif, concernant Jérusalem indivisible et capitale d’Israël, à propos de l’alignement sur l’Iran khomeyniste qualifié « d’ennemi de l’islam »- n’est-il pas un signe manifeste que les lignes bougent et un élément de réponse politique de première grandeur face aux bandes de brigands terrorisant les Maliens pris au piège et en incapacité de quitter Gao, Kidal et Tombouctou ?

Comment va réagir la normalitude benête et la « communauté internationale »?

Vont-ils, les uns et les autres, continuer de fabiuser et de se cantonner à des mièvreries opposant pouvoir civil et pouvoir militaire ou proposer de combiner l’un et l’autre?

De leur côté, que vont dire et proposer ces militaires ?

Alain Rubin

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