Lettre ouverte à M. Robert Badinter et à ses émotions sélectives

Monsieur, vous allez honorer de votre présence le colloque international commémorant les 20 français morts en Argentine entre 1976 et 1983. Je suis certain que les familles seront très flattées de cette attention.
En revanche, je ne vous ai jamais rencontré lors d’une manifestation commémorative des 3.800 torturés et assassinés entre le 19 mars et le 5 juillet 1962 en Oranie, ni des plus de 80.000 harkis massacrés par le FLN après l’indépendance. Cette indépendance que vous avez souhaitée ardemment.
Je n’ai jamais non plus aperçu votre nom à la suite des nombreux témoignages de personnalités en vue de la 5ème République telles que :
Maurice Allais : « Une des plus grandes ignominies, une des plus grandes hontes de toute l’Histoire de France. »
Raymond Aaron : « Les harkis pour la plupart livrés à la vengeance des vainqueurs sur l’ordre du général de Gaulle lui-même qui, par le verbe, transfigura la défaite et camoufla les horreurs. L’épisode des harkis constitue une des pages honteuses de l’histoire de France comme l’ont été l’instrumentation du statut des juifs ou la rafle du Vel d’Hiv. »
Georges-Marc Benamou : « La France a jeté les harkis dans les basses fosses de l’histoire. Il y a eu plus de 80.000 morts. Paris a systématiquement entravé leur sauvetage. De Gaulle est bel et bien complice d’un crime contre l’humanité. » Paris-Match le 30.10.2003.
Jean Daniel : « De Gaulle a abandonné les harkis : c’est son crime, et le nôtre. » Nouvel Observateur le 15.09.2009.
Et de l’aveu même du président du gouvernement algérien, M. Bouteflika, dans le journal La Croix du 17 juin 2000 : « Nous ne ferons pas les mêmes erreurs qu’en 1962 où, pour un harki, on a éliminé des familles et parfois des villages entiers. »
(Journal Daily Herald – USA) « La France a perdu la notion même de l’honneur. Il est inconcevable que les responsables et les complices de ce génocide se pavanent encore dans les salons, les ministères et les assemblées. »
Le 10 septembre 2001, dans le quotidien Libération, Michel Tubiana, président de la Ligue des Droits de l’Homme, écrivait : « La République a commis en 1962, en Algérie, UN CRIME D’ ÉTAT. En laissant les supplétifs algériens qu’il avait employés, le gouvernement français les a sciemment exposés aux massacres qui ont été commis. Harkis, Mokhaznis, membres des groupes d’autodéfense ou des groupes mobiles de sécurité, notables musulmans, sont massacrés dans des conditions effroyables, aux portes même des casernes où l’armée française reste l’arme au pied. Conformément à certaines clauses contenues dans les « accords d’ Evian », la plupart d’entre eux ont été désarmés, par ordre du gouvernement, comme les 150 harkis d’Edgar Quinet ou ceux de Bou-Hamama, assassinés à Kenchela avec leurs femmes et leurs enfants. Les familles, en effet, n’échappent pas à la vindicte : les bourreaux du FLN valent ceux du FIS aujourd’hui. Des villages entiers subissent aussi la loi du vainqueur. »
Et j’en passe de très nombreux… sauf vous !!
Apparemment, M. Badinter, il y a des morts qui vous déplaisent, celles des condamnés pour crimes de sang, récidive de viols, etc. et celles qui vous plaisent… ou vous laissent indifférent c’est-à-dire celles des Français d’Algérie et des Harkis morts pour ou à cause de la France.
Manuel Gomez