Limoges fut, longtemps, une sorte de forteresse isolée aux confins de l’empire. Peu à peu, cependant, le temps a fait son œuvre. La Terre est devenue un village planétaire, sans frontières, où il n’est nul lieu pour se mettre à l’abri. Même Limoges…
L’histoire de Limoges est passionnante à bien des égards. Elle éclaire, en prenant un peu de distance, d’une lumière oblique, celle de la France, voire du monde. La place manque, ici, pour tout traiter en détail.
ROME DU SOCIALISME
Par exemple, la découverte du Kaolin en 1768 (1) a entraîné une forme d’immigration « économique » de masse des paysans pauvres vers la pauvreté (moindre ?) de la ville industrielle, puis, par effet domino, luttes sociales, grèves, émeutes, création de la CGT (2).
La ville a été gouvernée par les socialistes pendant 102 ans, oscillant politiquement entre stabilité sociale subtilement organisée, d’un côté, ambiance parfois clochemerlesque, dans les coulisses, de l’autre. Puis « coup de théâtre » : le 4 avril 2014, Émile Roger Lombertie devient le premier maire issu de la droite limougeaude depuis 102 ans (3).
Tancrède Falconeri, le personnage interprété par Alain Delon dans « Le Guépard » (4) de Luchino Visconti, disait « si nous voulons que tout reste tel que c’est, il faut que tout change ». Dix ans après 2014, d’aucuns se demandent si ce ne serait pas le scénario en cours. « Le Guépard » : un film adapté d’un roman de Giuseppe Tomasi di … Lampedusa (5). Marrant, non ?
ANTONOMASE
Pourtant, la première chose qui vient à l’esprit d’un Français lambda habitant « ailleurs », c’est une antonomase (6). Le nom propre de la ville est devenu un nom commun synonyme d’exil : « limogeage » (7), avec son verbe corollaire, « limoger » (8).
Ainsi, à la fin de mes études supérieures, beaucoup d’amis se hâtèrent de fuir vers Paris, voire une autre capitale provinciale plus « riche en opportunités » : Bordeaux, Toulouse, Nantes… Puis, même, Berlin ! Pour « réussir » disaient-ils. Me voyant rester « en arrière » ils ne cessaient de m’écrire (oui, internet n’existait pas en ce temps-là !) pour m’enjoindre de quitter, moi aussi, cet exil intérieur (qualifié par eux, déjà, de « rance », c’est amusant) pour aller vers la lumière. Je suis resté sourd à ces sirènes.
LE REVERS DE LA MÉDAILLE
La nature de l’être humain est de transformer les contraintes en préférences. Je suis resté là par la force des choses, pas par choix, puis, au fil du temps, j’y ai trouvé des avantages. Limoges, pendant longtemps, a été une sorte de Fort Bastiani, cet épicentre du roman de Dino Buzzati (9), « Le Désert des Tartares » (10). Il y régnait une sorte d’ennui calme, de confort provincial, de tranquillité paisible, un pittoresque de (fausse) métropole ouvrière, c’était une ville à la campagne, avec des arbres, des forêts, des automnes magnifiques, avec ses règles strictes, aussi, son folklore politique, ses traditions syndicales…
Bien sûr, toute médaille ayant son revers, Limoges avait les siens. Capitale des bas salaires, l’immobilier y était alors abordable, le coût de la vie raisonnable, l’air plus pur, tout cela en échange d’espoirs étiques de promotion social, de plans de carrière verrouillés ad vitam aeternam, de maigre patrimoine. De plus, Rome du socialisme, lieu saint du syndicalisme, pour tout écart de la Ligne Générale la rumeur vous excommuniait aussitôt avec exil (presque) sans appel dans le clan des fascistes. Un système de liste noire capable de vous fermer toutes les portes. Sauf à faire amende honorable.
LA CATASTROPHE MONDIALISTE
Cette image d’Épinal a volé en éclats… après l’avènement de François Mitterrand le 10 mai 1981. Une sorte d’oxymore du destin, en somme, identique, d’ailleurs, dans toute la France : le grand soir était enfin arrivé, le bonheur pour tous allait pleuvoir, cet homme providentiel allait « changer la vie »…
Hélas, si beaucoup klaxonnèrent dans les rues, cette nuit-là, à Limoges comme dans toute la France, c’étaient surtout les futurs cocus de la gauche, ils allaient rapidement déchanter. Le mondialisme a suivi très vite, dès l’extinction des flonflons de la fête, donnant à tous une solide gueule de bois néolibérale. Le monde est alors passé du rose au gris.
GLISSEMENT PROGRESSIF
Par une sorte de « glissement progressif » (11)… du modernisme, dès lors, Limoges est devenue une ville « presque » comme les autres. L’immobilier a augmenté, en revanche, les salaires sont restés bas, le travail toujours aussi rare, la drogue a prospéré, les rodéos sont apparus, les violences urbaines aussi, les bus ont été caillassés, la police est tombée dans des embuscades, la ville a eu ses émeutes, son supermarché brûlé, bref, la capitale du Limousin s’est normalisée (12) par rapport aux standards du reste du pays.
Du coup, comme disent les jeunes, l’information « Limoges : il trouve son appartement squatté en rentrant du travail », publiée par France-Bleu sur son site sous la signature de Nathalie Col (13), n’a pas surpris grand monde dans la cité porcelainière. Les Limougeauds, depuis longtemps, ne se demandaient plus « si » ça se produirait un jour, mais « quand » cela allait arriver.
ÉTAT DE SIÈGE
Ainsi, en quatre décennies, Limoges est passé du statut de fort isolé sur la frontière à celui de ville assiégée par le reste de la planète. Dernier épisode : elle fut déchue de son statut de capitale régionale au profit de Bordeaux. En contrepartie, elle possède un magnifique réseau… de pistes cyclables.
La mésaventure arrivée à ce Limougeaud illustre bien les travers de notre époque : face à un mondialisme « dilaté comme jamais », il n’existe plus de refuge. Par le truchement de décisions prises par des élites (souvent autoproclamées) loin des réalités du terrain, à Paris, à Bruxelles, voire à Washington, le Français moyen se retrouve, au fond, ligoté face à une menace latente, planétaire, avec, de surcroît, au mieux, des moyens de défense légale limités (surtout face aux squatteurs !), au pire une injonction de ne pas se légitimement défendre. Le tout dans une ambiance d’avant-guerre. Civile ? Mondiale ? Rayez la mention inutile…
Dans l’ultime scène du film franco-germano-italien « Le Désert des Tartares » (14) réalisé par Valerio Zurlini, sorti en 1976, adapté du roman éponyme (de 1940, une date lourde de sens) de Dino Buzzati, le jeune lieutenant Drogo, devenu vieux commandant, usé à force d’attente infructueuse, s’apprête à quitter le Fort Bastiani à jamais. Soudain, un roulement de tonnerre : des cavaliers ennemis attaquent la citadelle.
Est-il trop tard ?
Augustin Meaulnes
SOURCES :
– 1 :
https://www.leguideduflaneur.fr/guide-tourisme/visites/le-kaolin-de-marcognac.html
– 2 :
https://www.cgt.fr/actualites/france/interprofessionnel/histoire/les-congres-moments-centraux-dans-la-vie-de-la-cgt#:~:text=Acte%20de%20naissance%20de%20la,premier%20congr%C3%A8s%20de%20la%20CGT
– 3 : https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89mile_Roger_Lombertie
– 4 :
– https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-chemins-de-la-philosophie/le-guepard-de-visconti-il-faut-que-tout-change-pour-que-rien-ne-change-9110495
– https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/la-transition/ne-rien-changer-pour-que-rien-ne-change-5177838
– 5 : https://fr.wikipedia.org/wiki/Giuseppe_Tomasi_di_Lampedusa
– 6 : https://fr.wikipedia.org/wiki/Antonomase
– 7 : https://fr.wikipedia.org/wiki/Limogeage
– 8 : https://www.cnrtl.fr/definition/limoger
– 9 : https://fr.wikipedia.org/wiki/Dino_Buzzati
– 10 : https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_D%C3%A9sert_des_Tartares
– 11 Pour paraphraser le ciné-roman d’Alain Robbe-Grillet :
– https://fr.wikipedia.org/wiki/Glissements_progressifs_du_plaisir
– http://www.leseditionsdeminuit.fr/livre-Glissements_progressifs_du_plaisir-1805-1-1-0-1.html
– 12 :
– https://www.marianne.net/societe/emeutes-a-limoges-les-pillards-ont-du-se-faire-un-max-de-ble
– https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/emeutes-a-limoges-nuit-calme-apres-de-violente-degradations-de-commerces-la-veille-7772843
– https://www.lepopulaire.fr/limoges-87000/actualites/les-commercants-vandalises-temoignent-suite-aux-emeutes-de-la-nuit-du-30-juin-a-limoges_14339546/
– https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/haute-vienne/limoges/limoges-ras-bol-conducteurs-bus-1563524.html
– https://www.lepopulaire.fr/limoges-87000/actualites/trafic-de-drogue-a-limoges-le-deal-a-pignon-sur-rue_14367011/
– 13 : https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/limoges-il-trouve-son-appartement-squatte-en-rentrant-du-travail-3323493
– 14 : https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_D%C3%A9sert_des_Tartares_(film)
Il n’y a plus une seule ville de calme et bientôt, même les grands villages seront condamnés si ce n’est déjà fait.
On recule jusqu’où ?
Limoges est une ville qui a toujours subi le mépris total des parisiens. (le fameux limogeage des généraux en 1915)
Ville d’ouvriers paysans c’était l’Usine ou la rue Jean Gagnant (la rue de l’ANPE), marquée par les bas salaires et le socialisme communisant. L’esprit devant le progrés était : de toutes facons cela ne marchera pas.
C’est oublier que Limoges c’est Jean Guinguoin le plus grand résistant de France https://www.youtube.com/watchv=SEek3xzF5b8&ab_channel=France3Nouvelle-
Aquitaine
C’est la Societé Legrand , seul grande société ayant son siège en province à Limoges.
C’est la Porcelaine de Limoges inégalable Porcelaine
Ce sont les chaussures Weston.
Ce sont les Emaux de Limoges c’est vrai aux thèmes trop rustique.
Une ville qui a toujours était méprisée par Paris et qui a reçu des flots d’immigrés dans son quartier De Beaubrueil et cela depuis les Boatpeople.
Georges Guingouin :)!
https://fr.wikipedia.org/wiki/Georges_Guingouin
Ouaip, j’ai eu un Guinguoin dans ma famille pendant l’occupation. C’était une ordure finie ! Sans doute ne s’agit-il pas du même…
Ahaahahah ! Une ville qui fut calme est devenue avec Montpellier, Besançon, Nimes…un centre du crime en France..Ah non ! Le Journal : le Populaire du Centre parle de sentiment d’insécurité à La Bastide, Beaubreuil et autres quartiers-dits sensibles- de Limoges.. Ils doivent vivre dans des quartiers dits protégés ou nier la réalité pour conserver leur job… Augmentation de 17% de la criminalité…Qui avait augmenté de 15% l’année d’avant de 18% l’année d’avant…Aller demander à celui ou celle qui a reçu un coup de couteau, s’il a un sentiment de blessure !!?? Un sentiment de mort !!???