Quimper et les bonnets rouges, de la révolte à la révolution…

Nous, qui ne sommes pas passés par les pseudos grandes écoles, ces écoles qui fabriquent de nouvelles élites incultes.

Nous, qui n’avons pas été formatés par les machines à décérébrer, produites, pour partie, avec l’aide du slogan du turlupin de Nanterre, -chassant de sa salle de cours le doyen Ricoeur-, au nom du « communisme libertaire » décliné dans le droit de visite réciproque des étudiants et étudiantes de la résidence universitaire de la faculté de Nanterre, -pour « s’aimer librement ».

Nous, qui avons pris au sérieux Lénine et Trotski, lorsqu’ils écrivirent, l’un comme l’autre : que le prolétariat révolutionnaire n’abolit pas la culture bourgeoise, mais veut y faire accéder l’ensemble de la société, même les plus opprimés, même les plus incultes, nous avons appris, et n’avons cessé de vouloir apprendre, en blanchissant sous le harnais.

Nous avons appris, -et nous avons aussi retenu-, ce que l’on enseignait à l’école communale française à propos du 14 juillet 1789 : « Mon ami –demanda le roi, apprenant la prise de la forteresse de la Bastille- c’est une révolte ? Non sire, répondit le conseiller, c’est une révolution ».

bonnetsrougesquimperUne Révolution ?

Oui une Révolution : une Révolution, universelle dans ses principes, nationale dans ses moyens et ses résultats pratiques ; une Révolution appelant « patriotes », ses plus ardents défenseurs.

Une révolution, ce mouvement hétéroclite d’ouvriers au chômage, d’artisans, de boutiquiers, de bourgeois aisés, de Gardes françaises passées de la protection du roi à celle du peuple de Paris, en lui fournissant même des canons pour prendre la Bastille?

L’Histoire le confirmera, ce n’était plus une révolte, c’était bien la Révolution, la grande Révolution, celle qui ébranlera en profondeur toute la société humaine.

Et pourtant, ces quelques milliers de parisiens et de militaires mutinés ne savaient pas trop encore ce qu’ils voulaient, concrètement.

Le 14 juillet 1789 n’était pas né de rien.

Le 14 juillet 1789 avait été précédé de journées, d’attentes diverses plus ou moins confuses et de déceptions multiples et évidentes.

Parmi les journées qui exprimeront ce qui surgissait alors et interpellait le Roi, le 7 juin 1788. Ce jour là, se produisit à Grenoble la « journée des tuiles ». Elle donna lieu à la reconduite du nouveau représentant du monarque, consécutivement à l’action de la population bourgeoise montée sur le toit de ses maisons pour jeter des tuiles sur l’escorte militaire de l’envoyé de Louis XVI .

Aujourd’hui, tout le monde s’interroge

Cela veut dire quoi cette seconde révolte des « bonnets rouges » ? Cela signifie quoi, ce mouvement de toutes les classes, couches sociales et organisations de la société bretonne, depuis le syndicat d’employeurs (le MEDEF), l’organisation agricole de la FNSEA locale, jusqu’aux organisations syndicales ouvrières et aux simples ouvriers eux-mêmes, en passant par plusieurs partis et groupements politiques, unis contre une nouvelle taxe, -une de plus, une de trop-, contre une taxe « écologique » (une « écotaxe », ils appellent cela) ressentie comme une nouvelle gabelle donnant lieu à la résurrection de l’institution des Fermiers généraux qui s’enrichissaient grassement de la collecte de l’ancienne?

En effet, outre son coût, cette taxe « écologique » sera privatisée, au plan des moyens de sa collecte.

Comme la Ferme générale et comme la gabelle, l’écotaxe enrichira certains personnages appelés à se substituer à un Etat se proclamant incapable de mettre lui même en œuvre sa décision fiscale.

J’évoquais Trotski et Lénine

Ce dernier brossera, dans une de ses brochures célèbres -« la faillite de la seconde internationale »-, les éléments caractéristiques d’une situation de crise se transformant en crise révolutionnaire.

C’est ainsi qu’il dira : qu’on y voit toute les classes de la société se détacher du pouvoir. Il rajoutera que la révolution fait que soit on y adhère, soit on s’y résigne. Il dira aussi, pour résumer son propos : que la révolution frappe à la porte de la société lorsque « en haut, on ne peut plus gouverner comme avant, tandis qu’en bas on ne veut plus se laisser gouverner comme jusqu’alors ».

N’est-ce pas ce qu’à l’évidence montre la Bretagne des nouveaux Bonnets rouges ?

N’est-ce pas ce que montre précisément Quimper ?

L’écotaxe n’est qu’une goutte fiscale de plus, une grosse goutte devenant une fiscalité de trop !

L’irresponsabilité gouvernementale et bureaucratique, -sous le manteau hypocrite et irresponsable, du point de vue économique, du point de vue de l’impact sur l’emploi, du point de vue de la remise en cause ou pas des conditions d’existence de la population, toutes classes confondues-, produit un surgissement populaire menaçant tout un ordre économique et social vermoulu.

LE PLAN DE RIGUEURJean-Marc Ayrault est nantais paraît-il ?

Le Premier ministre devrait se souvenir : ce ne sont pas les polissonneries de collégiens du « communiste libertaire » de Nanterre, s’agitant frénétiquement autour des revendications du « sexpol », qui ont produit l’onde de choc et la grève de dix millions de travailleurs salariés, entre le 14 mai et le 6 juin 1968.

Mai-juin 1968, la grève de masse, avait mûri, depuis la grève générale des mineurs de fer et de charbon des bassins miniers du Nord et du Pas de Calais commencée en décembre 1961 et se concluant en janvier 1962 après avoir imposé des négociations à un gouvernement qui n’en voulait pas.

Mai 1968, parti de Nantes, puisait aussi dans le passé régional breton, celui de la grande grève des métallos nantais et nazairiens de septembre 1955, longue grève réprimée brutalement.

Mais ce qui la mettra en branle, ce qui activera directement la plus grande grève ouvrière de toute l’Histoire, ce seront ces grèves ouvrières, -des grèves à répétition avec manifestations et recherche systématique d’en découdre avec les forces de l’Etat-, dans lesquelles se lanceront avec détermination les Paysans-ouvriers des usines de Redon et de sa région.

Redon, ce n’était pas bien loin de Nantes où, le 14 mai 1968, après avoir décidé de garder auprès d’eux le PDG venu en visite, les ouvriers de l’aéronautique de Bouguenais-Nantes (la SNIAS) voteront d’entrer en « grève générale », éliront un comité de grève incorporant les syndicats de l’usine (FO, CGT et CFDT), lanceront à tous les travailleurs de France, un appel à les rejoindre dans la grève générale totale : pour la satisfaction des revendications générales à toute la classe ouvrière et pour celles particulières à chaque entreprise, ainsi que pour la satisfaction des revendications universitaires opposées à la « réforme Fouchet » et celles de la paysannerie mise en cause dans son existence par les décisions bruxelloises (déjà).

Quimper sera-t-elle le Redon de 2013 ?

Les travailleurs de Doux, menacés dans leur emploi, comme ceux de la SNIAS de Nantes Bouguenais en 1967, seront-ils la SNIAS- Bouguenais de 2013 ?

Une chose demeure, indépendamment des résultats immédiats, quels que soient les résultats des manœuvres gouvernementales et bureaucratiques au sein des organisations syndicales ouvrières, paysannes et patronales, quelque chose de profond a commencé, quelque chose qui ne s’arrêtera pas.

En 1936, a surgi un grand mouvement gréviste. Il a entraîné dans les grèves d’occupation trois à quatre millions de travailleurs des usines et du commerce. Les grévistes d’alors voulaient ainsi aider le gouvernement du socialiste Léon Blum, pour qu’il puisse favoriser ou satisfaire leurs revendications et aspirations au mieux-être. Ils ne voulaient pas le combattre, Blum était « leur Premier ministre » ! En 2013, de qui JM. Ayrault est-il le Premier ministre ?

En 2013, l’indignation monte, monte, monte...

Cette fois, si le gouvernement persiste, restant l’esclave volontaire des décisions bureaucratiques bruxelloises, s’il s’obstine dans ses oukases « écologiques » et autres, la prochaine grève générale, -le mouvement social généralisé qui monte-, sera une grève nationale dont personne ne peut dire jusqu’où il ira.

Ce sera une grève « nationale », par son ampleur et son contenu ; ce sera un soulèvement de toutes les classes et couches de la société ; ce sera une action résolue de toutes les populations non liées, par la grosse gamelle, aux prébendes de l’ordre europoïde.

Ce sera une grève nationale, ce sera une action de toute la nation, pour aider le gouvernement en place à faire ses valises, -sans tarder-, l’invitant fermement à prendre un billet pour s’en aller trouver accueil ailleurs : hors de l’Elysée, hors de Matignon, hors des ministères et des administrations.

Alain Rubin

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