Sauver Taïwan au risque de voir Los Angeles rasée ? Un délire de faucon

La menace chinoise agite de plus en plus la classe politique américaine et divise les stratèges.

Car le sujet majeur, c’est Taïwan. Les Chinois ne lâcheront jamais ce morceau de Chine qui, historiquement, leur appartient. C’est leur droit.

https://ripostelaique.com/lapocalypse-nucleaire-pour-sauver-taiwan-peu-probable.html

Si les Japonais en ont pris le contrôle après la guerre sino-japonaise de 1894-1895, ils l’ont restituée en 1945. Et ce n’est qu’à la suite de la guerre civile en Chine, entre communistes et nationalistes, que cette île fut séparée du continent en 1949.

À la Chine communiste de Mao s’opposait la Chine nationaliste de Tchang Kaï-chek.

Taïwan (ex-Formose) fut d’abord la seule Chine officielle reconnue par l’ONU.

Et ce n’est qu’en 1971 que la Chine communiste rejoignit  l’ONU, contraignant Taïwan à quitter l’Organisation.

En fait, Taïwan n’a aucun statut. Elle n’est pas véritablement indépendante. Pour Pékin, toute velléité  d’indépendance de la part de Taipei serait un casus belli. Taïwan reste la 23e province de Chine quoi qu’en pense le monde entier, Américains en particulier.

Pour ma part, je partage l’avis de ce général chinois qui déclarait dès 1996 :

“Je ne pense pas que les Américains feront quoi que ce soit au bout du compte. Ils ne voudront pas échanger Los Angeles contre Taipei.”

Mais chez les stratèges, les avis divergent.

Les faucons veulent se préparer à la guerre pour défendre Taïwan, les “réalistes” refusent cette option irresponsable qui mènerait au clash nucléaire. Les esprits s’échauffent.

Du 31 octobre au 2 novembre à Orlando, en Floride, trois stratèges américains se sont affrontés sur le sujet.

Pour l’analyste David Goldman :

“Si on essaie d’imposer l’indépendance de Taïwan, n’importe quel gouvernement chinois, communiste ou non, recourra à l’action militaire.”

Mais pour Michael Pillsbury, un faucon ex-conseiller de Donald Trump :

“Nous nous rapprochons de la guerre nucléaire avec la Chine… Certains appellent à lâcher Taïwan, ils ne veulent pas faire la guerre à la Chine, mais c’est de l’apaisement !”

Question de Michael Anton, politologue opposé à la guerre :

“Si les Chinois coulent un porte-avions, si le seul moyen d’empêcher une invasion de Taïwan est d’envoyer un porte-avions et peut-être un ou deux autres, et si les Chinois coulent ces hippopotames de 12 milliards de dollars avec 6 500 hommes à bord, quelle sera la réponse américaine à ce stade ?

Réponse de Michael Pillsbury :

“Eh bien, nous pourrions nous tourner vers vous, et dire : je me rends !”

Michael Anton :

“Que feriez-vous si vous étiez le secrétaire à la Défense, le président ou le commandant des forces Pacifique à Pearl Harbor ?”

Michael Pillsbury :

“Nous savons exactement quelles cibles pourraient être frappées en Chine. Ce qui se passerait le premier matin. Mais des deux côtés, militaires chinois et américains en arrivent à la conclusion que ce serait une longue guerre.”

Michael Anton :

“Les Chinois n’ont pas de doctrine nucléaire. S’ils estiment que la survie de l’État est en jeu, ils utiliseront leurs 300 têtes nucléaires contre des villes américaines. Cette histoire finirait par une guerre nucléaire.”

“De plus, quel serait la réponse du peuple américain à la perte d’un porte-avions ? Ce serait un choc immense, pire que celui du 11 septembre. Quant à subir une attaque nucléaire sur l’une de nos villes, ce serait le plus grand choc psychologique de toute notre histoire.”

Et David Goldman de clôturer cyniquement le débat :

“Qui est est volontaire pour être la première ville à subir le feu nucléaire chinois ? Des candidats ?”

Comme le disait ce général chinois, les Américains ne prendront jamais le risque d’échanger Los Angeles contre Taipei. Et on les comprend !

Que Taïwan retourne dans le giron de Pékin, puisque cela va dans le sens de l’histoire.

Taïwan ne vaut pas une troisième guerre mondiale, à plus forte raison une guerre atomique.

Une guerre froide s’est achevée en 1989 avec la Russie. Une autre a commencé avec la Chine. Puisse l’équilibre de la terreur qui a fait ses preuves depuis Hiroshima, continuer à calmer les esprits.

(source Figaro)

Jacques Guillemain