Survie d’Israël : la méthode Liberman ?

Israël est de nouveau sorti vainqueur lors du récent conflit qui l’a opposé au Hamas. Depuis le 10 mai dernier, les groupes armés de Gaza ont lancé environ 3 000 roquettes vers Israël, soit sensiblement moins qu’en 2014, lors de l’opération israélienne Bordure protectrice, au cours de laquelle le mouvement islamiste avait tiré 4 500 roquettes et missiles en territoire israélien, ce qui semblerait indiquer un certain « essoufflement » des milices djihadistes opérant depuis Gaza.

D’autre part, les pertes essuyées par le Hamas sont importantes et le mouvement islamiste n’est certes pas prêt de se lancer dans de nouvelles opérations militaires contre l’Etat hébreu.

Est-ce à dire qu’Israël est assuré à l’avenir d’une victoire pérenne de son armée contre toute attaque des groupes djihadistes, que ce soit depuis la bande de Gaza ou depuis le nord-Liban ? Il faudrait être dans la foi absolu du destin eschatologique du peuple élu pour le croire. Les données géostratégiques à plus ou moins long terme sont sans doute d’un augure moins optimiste pour l’avenir d’Israël.

***

Izz al-din al-Qassem, la branche armée du Hamas dispose de plusieurs filières rôdées d’approvisionnement en armes : ces armes proviennent essentiellement d’Iran et de son allié le Hezbollah. Elles transitent entre autres par la frontière sud avec l’Égypte, en provenance de la Libye.

La chute du colonel Kadhafi en 2011, si elle a été un coup d’éclat pour un Sarkozy et son âme damnée BHL, n’a certes pas été une bonne opération pour l’Etat hébreu, puisqu’elle laisse désormais le champ libre aux trafics d’armes en provenance du Soudan. Le Hamas entretient en effet les meilleures relations avec le régime islamiste de Khartoum.

***

Lors de la prochaine confrontation armée entre le Hamas et Tsahal, l’Iran s’apprête à fournir au mouvement djihadiste ses missiles les plus sophistiqués, qui ont portée de plusieurs centaines de km, disposent d’une charge explosive de 200 à 300 kg et ont une précision de quelques mètres. C’est déjà ce que laissait entendre le journaliste Adnane Abou Amer dans un article pour le site Al-Monitor du 16 septembre 2020.

Le 15 mai dernier, le chef de la branche armée du Hamas a d’ailleurs annoncé que ses unités avaient testé une de ces roquettes iraniennes  – nom de code : Sejil – d’une portée de 250 km, en direction de l’aéroport d’Eilat, situé à plus de 200 km de la bande de Gaza. Pour l’instant le Dôme de Fer semble protéger les populations israéliennes de bombardements massifs. Mais pour combien de temps, face à des missiles de plus en plus performants ?

Par ailleurs, le Hamas se dote d’une flotte de drones, dont la technologie est également fournie par l’Iran. Une arme qui, elle, pourrait sans difficulté passer entre les mailles du Dôme de fer israélien.

Le mouvement islamique dispose également d’un stock de missiles anti-char russes de type Kornet, qui ont fait leurs preuves dans la guerre de 2006 entre le Hezbollah et Israël, occasionnant de lourdes pertes dans les unités blindés israéliennes. Ces missiles antichars n’ont été d’aucune utilité pour le Hamas lors du conflit récent, puisque Israël ne s’est pas aventuré dans une opération terrestre en zone gazaoui, laissant – habilement et efficacement – son aviation faire la totalité du travail de destruction des infrastructures du Hamas.

Selon le journaliste Adnane Abou Amer, le Hamas est en passe d’acquérir des missiles chinois terre-mer de type C-704 d’une portée de 35 km, ainsi que des systèmes radars de guidage.

***

A plus ou moins long terme, la suprématie militaire « classique » d’Israël sur les mouvements djihadistes de Gaza et du nord-Liban semble relever de la gageure. Reste une arme qui pour l’instant est l’apanage de l’Etat hébreu vis-à-vis de ses voisins arabes et perses : l’arme nucléaire.

***

Le 13 janvier 2009, le Jerusalem Post reprenait la déclaration suivante d’Avigdor Liberman, faite à l’université Bar-IIan de Tel Aviv :

« Nous devons continuer à combattre le Hamas exactement comme les États-Unis ont combattu le Japon lors de la Seconde Guerre mondiale. Ainsi, l’occupation du pays n’a pas été nécessaire ».

En clair : l’Etat hébreu est fondé à utiliser l’armement nucléaire dont il dispose, dès lors que sa survie est en jeu.

Alors qu’il pouvait compter sur l’intransigeance de l’administration Trump face l’Iran, il n’est pas sûr que Biden ne soit pas tenté de reprendre en l’espèce la politique laxiste du gouvernement Obama, laissant l’Iran se doter « à bas bruit » de l’armement nucléaire.

Auquel cas, le Proche Orient risque de ressembler sous peu à un jeu de massacre. Et sans doute le monde avec lui…

Henri Dubost

« In girum imus nocte ecce et consumimur igni »