Syrie : l’amateurisme de Hollande et le réalisme de Poutine

En matière d’amateurisme et de cafouillages en tout genre, la gestion calamiteuse du dossier syrien par François Hollande restera longtemps un modèle du genre. Gonflé à bloc par le succès de l’intervention française au Mali, enhardi par la position d’Obama, qui avait décrété en 2012 une ligne rouge en cas d’utilisation d’armes chimiques par le régime syrien, François Hollande s’est cru en position de force pour endosser précipitamment sa tenue de chef de guerre et mener une action punitive contre Assad, dès le lendemain de l’attaque chimique à Damas. Malheureusement, faute d’avoir analysé toutes les conséquences d’une telle opération et surtout faute d’avoir consulté au préalable ses partenaires européens, la France se retrouve aujourd’hui totalement isolée sur ce dossier. Espérant rassembler au G20 “la coalition la plus large possible”, Hollande n’a trouvé à Saint-Pétersbourg qu’une Europe unie derrière Angela Merkel et hostile à toute intervention militaire.

HollandeIL NOUS FAIT HONTEAprès la défection inattendue des Anglais et le lâchage de l’UE, la France, qui n’a pas les moyens militaires d’agir seule, se retrouve donc dans l’obligation de s’en remettre à la décision finale du Congrès américain. Quelle humiliation ! Quand on veut bomber le torse, il faut s’en donner les moyens. Ce résultat pitoyable est la conséquence d’un indéniable amateurisme, voire d’une certaine désinvolture de notre diplomatie. Une intervention armée dans le chaudron du Moyen Orient n’est pas un acte anodin. Non seulement François Hollande n’a pas attendu les conclusions de la commission d’enquête internationale envoyée en Syrie, non seulement il s’est affranchi à tort de l’aval de l’ONU, non seulement il a rejeté tout vote de l’Assemblée Nationale, mais il a surtout négligé d’analyser les conséquences d’un bombardement en Syrie avant de s’engager dans cette aventure des plus risquées. Punir Assad, c’est soutenir indirectement les islamistes et Al Qaïda, ennemis jurés de l’Occident et des chrétiens. C’est prendre le risque de représailles contre nos intérêts et contre nos 900 soldats de la Finul, stationnés au Liban, mais c’est aussi attiser la haine anti Israël. Car il est illusoire de penser que l’Iran et le Hezbollah, alliés d’Assad, resteront les bras croisés après une agression occidentale.

Quant au bilan des frappes ciblées et limitées, beaucoup d’experts s’accordent à dire qu’il sera quasiment nul et ne changera rien à la suite du conflit syrien. Dans ces conditions, où est l’intérêt de la France de s’immiscer dans cette guerre civile ? Si le but inavoué de François Hollande était de redorer son blason et de faire oublier le bilan calamiteux de sa politique intérieure, le pari est perdu. Plus les jours passent et plus le dossier syrien tourne au fiasco pour notre président. Les Français, hostiles à toute intervention, ont bien d’autres préoccupations à régler que de jouer aux gendarmes du monde. La France n’est pas l’Amérique. Et souhaitons que le bon sens et la sagesse s’imposent à tous, pour que les va-t-en-guerre se rangent enfin du côté de la solution politique que réclame Poutine à juste titre, seule issue durable de ce conflit.

Jacques Guillemain

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