Nous avons prié pour la victoire de notre candidat Moul’chi, alias Mélenchon
La journée de ce dimanche risque d’être très stressante pour ma famille et nos proches.
Mon père invitait souvent des proches et des voisins et on se retrouvait entre une trentaine de bons et loyaux musulmans pour discuter de l’élection présidentielle. On analysait les candidats et leurs programmes afin de savoir pour qui voter.
A défaut d’un candidat pur musulman, on se demandait qui parmi les candidats en lice peut mieux représenter les intérêts de notre communauté musulmane.
Alors qui ?
Zemmour, bien sûr, dit quelqu’un. Tout le monde éclate de rire.
Plus sérieusement, c’est le nom de Moul’chi qui revient le plus souvent (prononcer Moul’chi en accentuant bien le « chi » comme dans « tu me fais chi/er »).
Il signifie le propriétaire, le maître des lieux, celui qui tient les choses en main, celui qui peut intervenir et régler une affaire, bref celui qui peut tout. Comme Zeus.
C’est ainsi qu’on appelle Jean-Luc Mélenchon dans notre petite communauté. C’est depuis qu’il a proclamé « C’est moi la république ». On l’avait cru.
On lui a aussi décerné le titre honorifique de « Moulay ».
Au Maroc, ce titre est porté par les descendants du roi et la noblesse. Il équivaut à « Monseigneur » ou « Altesse ».
On a pensé que quelqu’un qui repousse des policiers et des magistrats, comme Moul’chi l’avait fait, ne peut être que de sang royal. Moul’chi méritait bien son titre.
Moulay Moul’chi nous paraît être le plus proche de l’islam et des musulmans. Il est toujours de leur côté, les défend et les protège. Il aime notre culture, plus que la française. Il adopte nos traditions et nos coutumes. Il est pour le port du voile. Il a, en plus, un grand atout. Il est du bled. Il est né à Tanger. S’il est élu, la France se hissera au rang de nation islamique dès la première semaine de son pouvoir.
La France viendra à Allah et à son Messager sans qu’on soit obligés de mener le djihad pour cela.
Moul’chi est le leader de la France insoumise. Des insoumis comme nous. Nous n’accepterons jamais les lois scélérates de ce pays. Il n’y a que la loi d’Allah qui prévaut.
Tous réagissent avec un « Allahou Akbar », comme dans un recueillement.
On a parlé du respect dont il jouit dans les médias et on a maudit les personnes qui l’appellent « La Meluche » en priant pour qu’Allah les punisse en leur envoyant des flics confisquer leurs permis de conduire.
D’autres noms sont cités, dont Hidalgo. C’est quelqu’un qui respecte notre culture et organise, chaque année, un grandiose iftar pour nous pendant le mois du Ramadan.
Mais on ne va quand même pas voter pour une femme. Le Coran ne le recommande pas. En plus, elle n’a aucune chance. C’est un tocard.
La candidature de Hidalgo est rejetée.
On aborde la candidature de Marine.
Marine va nous aimer si elle passe, c’est moi qui vous le dis, intervient quelqu’un. Donnons-lui une chance. Je suis en France depuis 45 ans. J’ai vu passer plusieurs présidents et tous nous ont choyés, aidés, encouragés et aimés.
Marine nous aime déjà, fait observer un autre.
Normal, toutes les Françaises nous aiment, réplique le premier. Rappelez-vous ce qu’on nous disait au pays avant de venir ici. Tu n’auras pas la peine de travailler avec tes mains, utilise juste ton zob, qu’on nous conseillait. Les Françaises aiment ça et vont te payer pour. Tu pourrais devenir riche comme tant d’autres le sont devenus.
Chacun évoque ses exploits sexuels et combien il a gagné et on revient à Marine.
On ne peut malheureusement pas voter pour elle. Hidalgo pourrait nous faire un procès. On ne peut pas rejeter sa candidature et accepter celle de Marine.
Quelqu’un évoque Macron, mais c’est un « jamais » qui fuse à l’unisson. C’est un gosse qui n’a jamais pensé venir prier avec nous à la mosquée, qui n’a donc pas d’égards pour les musulmans et qui, en plus, défend la liberté de caricaturer notre prophète Mohamed.
Il ne reste donc plus que Moulay Moul’chi.
Il est adopté comme le candidat idéal et unique pour nous.
Cette décision est saluée par une longue standing ovation conclue par un feu d’artifice avec des Allahou Akbar de toutes les couleurs.
Il fut convenu de faire un couscous, d’appeler des hommes de religion pour lire du Coran et de faire des prières pour que Moul’chi puisse passer.
On a demandé aussi à l’imam de la mosquée de notre quartier de faire une prière spéciale pour Moul’chi
Je ne peux pas, a-t-il refusé, il n’est peut-être pas circoncis. Allez lui demander et revenez me voir.
On n’a pas osé.
On peut demander à sa compagne, suggère quelqu’un. C’est une musulmane. Elle doit savoir distinguer un zizi circoncis d’un zizi non circoncis.
Pas la peine, objecte un autre. Elle dirait qu’il est circoncis sans nous fournir de preuve. Elle aurait peur de passer pour une femme qui couche avec un mécréant non circoncis.
L’imam a quand même accepté de faire une prière en off.
Il nous a expliqué qu’une prière en off est une prière prononcée à voix basse. Il n’y a qu’Allah qui l’entend.
Le mode off existe dans la pratique islamique. Il y a des versets qui sont lus à haute voix et d’autres à basse voix dans les prières.
Nous sommes certains que Moulay Moul’Chi passera.
Nous sommes certains que les voix de notre petite communauté peuvent faire pencher la balance de son côté.
Avec un coup de pouce d’Allah, il pourrait même devenir président ce soir même.
Ne serait-ce qu’en off.
Messin’Issa
NB / Je n’y suis pour rien dans ce texte.
Je ne fais que relater ce que m’a rapporté un cousin de Saint-Denis.