Nîmes : justice très clémente pour l’imam escroc Hocine Drouiche
Vendredi 4 juin : jour du “jugement premier” pour l’imam de la mosquée de Nîmes, figure musulmane locale et nationale, membre de la Conférence nationale des imams, régulièrement pris en photo avec deux anciens présidents de la République française.
J’assiste à l’audience, qui se déroule quand même, malgré les pressions exercées par plusieurs hauts fonctionnaires de l’administration française sur le président de la juridiction (selon les propres déclarations du président Jean-Michel Perez) et sur la CAF Nîmoise afin qu’elle retire sa partie civile.
Hocine Drouiche comparaît pour escroquerie et abus de biens sociaux
Au menu d’une journée de débats : des faits d’escroquerie aux organismes sociaux (Caf, conseil départemental) et des faits d’abus de biens sociaux dans DIMA, une société qu’il gérait et spécialisée dans les fruits et légumes. Pas la menue monnaie dans les deux dossiers !
Il lui est reproché d’avoir indûment perçu des prestations sociales entre mars 2015 et février 2017 et entre mars 2019 et octobre 2020. Hocine Drouiche, 45 ans, membre de la Conférence nationale des imams, a fait l’objet d’une enquête du parquet de Nîmes début décembre 2020 et a reconnu les faits en garde à vue.
Il lui est par ailleurs reproché le délit d’abus de biens sociaux et celui de blanchiment dans une structure qu’il dirige, où il a reçu des aides de l’État pour près de 9 000 euros.
Dans l’affaire d’abus de biens sociaux, le président Perez considère que les achats personnels du quadragénaire constituaient des faits d’abus de biens sociaux.
Le magistrat demande au prévenu son explication. “Je pensais que cet argent était à moi”, répond le prévenu Hocine Drouiche. L’enquête a prouvé que cette société a reçu d’importantes aides de l’État français.
L’avocat de la partie civile demande au prévenu pourquoi monsieur Drouiche a tenté de réserver un voyage à la Mecque pour près de 1 500 euros. “Que vient faire un voyage à la Mecque sur les comptes de la société ?”, demande l’avocat Me Mourad Rabhi. “J’ai pensé que cet argent était à moi”, assure sans vergogne Hocine Drouiche, le prévenu.
Les organismes sociaux, pompes à fric de Hocine Drouiche
Deux organismes sociaux (la Caisse d’allocations familiales et le Département du Gard) sont constitués comme parties civiles dans le procès qui est normalement prévu ce vendredi.
Le président Perez aborde désormais la partie escroquerie aux organismes sociaux avec “un faux dossier d’aide au logement”. Le prévenu évoque en réponse son engagement républicain et la campagne de calomnie dont il a été victime”. “Ne mélangeons pas tout, ne mélangeons pas tout”, modère le président.
Le président Perez évoque aussi des sommes en provenance de l’ambassade d’Algérie qui n’ont pas été déclarées dans le dossier de même que le prévenu aurait indiqué ne pas vivre sous le même toit que sa compagne. À l’audience, le président Perez évoque “des pressions exercées sur les organismes sociaux par des hauts fonctionnaires pour qu’ils interviennent auprès de la Caf pour qu’elle renonce à réclamer l’argent indûment perçu”.
La représentante de la Caf confirme et indique que, pour le premier dossier, les sommes ont finalement été remboursées. La Caf réclame 2 500 euros (la Caf a précisé que les sommes avaient été remboursées car depuis 2017, l’organisme social ponctionne une partie de l’argent sur les allocations versée à l’épouse de monsieur Drouiche qui élève huit enfants). Au total, les sommes indûment versées atteindraient près de 44 000 euros entre 2015 et 2017. Le représentant du département réclame 14 000 euros de RSA versés à M. Drouiche.
Le vice-procureur de la République fustige les infractions de l’imam
Arnaud Massip, le vice-procureur de la République de Nîmes indique qu’il “trouve la défense de monsieur Drouiche déconcertante” et il estime que “le prévenu est une personne intelligente” qui comprend bien les enjeux d’une fraude aux organismes sociaux”. Le magistrat épingle le côté “beau parleur” du prévenu qui aborde son combat pour “un islam modéré” tout en positionnant son discours à côté des explications à donner au tribunal sur les faits reprochés.
En d’autres termes, le magistrat regrette l’amalgame entre les infractions reprochées et la position défendue sur le plan cultuel par le prévenu qui revendique une défense des valeurs de la République. “Les valeurs de la République, c’est la solidarité et la moralité”, martèle le magistrat du parquet estimant par ailleurs que le prévenu a tendance à rejeter la faute sur autrui. Il note que cet imam a régulièrement été pris en photo avec deux anciens présidents de la République
Malgré les réquisitions sévères du vice-procureur de la République, et suite sans doute aux pressions subies, après un délibéré, le président Perez déclare coupable le prévenu coupable pour toutes les infractions et le condamne à 12 mois de prison avec sursis ainsi qu’une interdiction de gérer de 5 ans. Le tribunal a rejeté la demande de l’imam de non-inscription au bulletin numéro deux du casier judiciaire. L’épouse de l’imam (défendue par Me Fahd Mihih) a obtenu une relaxe pour l’ensemble des infractions reprochées.
L’imam escroc, amis de deux présidents de la République, a donc bénéficié de la mansuétude du tribunal correctionnel de Nîmes et écopé d’une peine avec sursis. Là où un citoyen français moyen aurait sans doute été condamné à de la prison ferme et à de lourdes amendes. Cherchez l’erreur…
Francis GRUZELLE
Journaliste et écrivain
Carte de presse 55411