Faut-il juger les juges ?
Faut-il juger les juges lorsqu’ils se sont trompés ou lorsqu’ils ont été désavoués ?
A la fin des années 70, près de 90 % de l’activité des juges était consacrée à la lutte contre la criminalité, la délinquance. Depuis 20 ans, de plus en plus de magistrats se veulent les « censeurs » de la vie politique, de la presse, et ce sont autant de moyens humains qui font défaut dans la lutte contre la criminalité organisée, la petite délinquance. Le « mariage de raison » (et non d’amour) qui prévalait entre les magistrats et les journalistes dans les années 80 a volé en éclat. Alors même que l’impartialité des juges est mise en cause, chaque jour. Certains juges ont même jeté le discrédit sur des commissaires de police efficaces, en reprochant à ces flics de terrain d’avoir « franchi la ligne rouge dans leurs recherches d’informations au sein du grand banditisme ». Mais, personne n’ose sanctionner, de manière exemplaire, les magistrats qui dérapent, à l’image de l’affaire d’Outreau.
Plusieurs magistrats se sont même interrogés sur l’indépendance de certains juges vis à vis de certaines religions (lire aussi http://ripostelaique.com/des-juges-francais-infeodes-a-certaines-religions.html ). La question méritait d’être posée, après que la Ministre de la Justice Christiane Taubira ait annoncé, le 27 avril 2015, aux journalistes accrédités auprès de son ministère, l’octroi de 2,7 M€ de crédits sur 3 ans
«destinés à mettre en place des formations à la laïcité pour les magistrats et les personnels des juridictions ».
La rentabilité domine aussi l’institution. Avec un management à la japonaise. Du coup, plusieurs magistrats découragés diagnostiquent «La fin des juges », à l’image de Marie-Odile Theoleyre dans son remarquable livre.
Au pénal surtout, mais aussi dans une moindre mesure au civil, les juges français ont un pouvoir plus important que leurs homologues des autres démocraties (en particulier les pays anglo-saxons de Common law), qui doivent s’effacer beaucoup plus souvent qu’eux, dans la prise des décisions, derrière des jurés populaires, qu’on ne trouve en France que dans les cours d’assises (encore dans celles-ci les juges professionnels ont-ils une influence importante, voire prépondérante, à en croire des confidences de jurés).
Ce constat est partagé par Benoît Garnot, agrégé d’histoire et docteur ès lettres, qui enseigne l’histoire de la justice à l’université de Bourgogne depuis 1988 et est l’auteur de nombreux ouvrages. Son dernier livre Histoire des juges en France, de l’Ancien Régime à nos jours est aux éditions Nouveau monde est meilleur qu’un diagnostic médical.
L’image du juge au XIX ème siècle : dépassée ?
L’auteur y décrypte les caractéristiques des magistrats en France. Il estime que les justiciables doivent être en droit de demander des comptes aux juges. Car le pouvoir des juges concerne le quotidien des procès, et donc le quotidien des Français.
Certes, les juges ont toujours été décriés, quels que soient l’époque et le lieu. La critique de la justice, et par conséquent des juges, était déjà très importante dans l’Antiquité : voyez Aristophane! Dès lors, pour Benoît Garnot, « La critique des juges n’a jamais cessé depuis. On a accusé les juges d’incompétence, de partialité, de concussion, de cruauté, d’insensibilité…, le plus souvent à tort (pas toujours cependant). Alors pourquoi une telle hostilité? Parce que tout procès fait au moins un mécontent, le perdant, et le plus souvent deux, quand le gagnant estime qu’il n’a pas reçu assez ou que l’autre n’a pas été suffisamment puni, ce qui est la réaction la plus fréquente.
« Après, il est très facile, mais trop courant, de reporter son mécontentement ou sa déception sur le juge. Quand en plus on se trouve, comme actuellement, en période de crise économique et sociale, les juges constituent des boucs émissaires idéaux… surtout quand des élus en rajoutent en contestant des décisions de justice… ».
Le plus gros problème demeure une judiciarisation de notre société Française, qui donne l’impression que les magistrats veulent se mêler de tout. Et Benoit Garnot a le mérite de rappeler « On oublie que les juges sont faillibles et ont droit à l’erreur, mais ils ont souvent du mal à la reconnaître… ». Et personne n’ose, à l’arrivée, sanctionner tous les magistrats qui ont commis des erreurs, qui ont ruiné des vies, qui ont massacré des enfances, qui ont détruit des entreprises, des commerces, des exploitations agricoles, en ordonnant ici une faillite, là une expulsion agricole, sans avoir vraiment pris le temps d’étudier le dossier.
Ces juges poursuivent leur carrière, un blâme administratif dans le pire des cas, une mutation dans les îles de la République lorsque l’affaire est moins grave mais alimente les médias.
Certains magistrats se placent sous la coupe du pouvoir politique, sous l’emprise de certaines loges maçonniques, ou prennent des engagement associatifs d’un tout autre plan, mais cela mériterait un trop long développement. S’ajoute à cela le recrutement et les carrières, au XIXe siècle et pendant une bonne partie du XXe siècle. Ce phénomène s’est atténué aujourd’hui pour les recrutements, mais beaucoup moins pour les carrières. Dans le traitement des affaires banales, qui constituent l’immense majorité du contentieux, la liberté des juges du siège est totale (évidemment dans le cadre de la loi et de la jurisprudence). La sujétion au pouvoir politique concerne surtout les magistrats du parquet, et de nombreuses affaires à connotation politique ou financière, qui s’avèrent souvent très médiatisées.
Les juges de l’ordre judiciaire sont-ils trop puissants en France ? Et que dire des juges constitutionnels, dont les décisions infirment de plus en plus souvent les lois votées par le Parlement ?
Dans une France où beaucoup de magistrats découragés diagnostiquent «La fin des juges », on a l’impression que certains serviteurs de l’Etat, dont les ancêtres se sont illustrés sur les champs de bataille, pour que «vive la France », tentent ici ou là de sauver le Pays réel, en incarnant cette laïcité et le sens de l’Etat que nous défendons.
Francis GRUZELLE
Carte de Presse 55411
Lire aussi ces articles qui constituent un complément d’information :
http://ripostelaique.com/ardeche-le-maire-dannonay-interdit-lislamiste-integriste-omar-erkat.html
http://ripostelaique.com/exclusif-orphelinats-galere-de-noel-enfants-places.html