Au sein de ma génération, la rupture est totale, il y a deux camps

banderolepoitiersidentitairesNotre fondateur, Pierre Cassen, a rencontré Damien Rieu, jeune Identitaire, à l’occasion des Bobards d’Or. Celui-ci a accepté de répondre à quelques-unes de ses questions...

Riposte Laïque : Le 20 octobre 2012, 70 jeunes Identitaires créaient l’événement, en occupant, une matinée durant, le toit de la mosquée en construction de Poitiers. Ce samedi, 130 militants de Génération Identitaire ont fait parler d’eux, en bloquant trois ponts, afin d’empêcher les clandestins-migrants d’entrer dans Calais. Quel est ton regard sur cette action, plus de trois ans après Poitiers ?

Damien Rieu : Cela faisait longtemps que nous cherchions à organiser quelque chose à Calais. Nous sommes révoltés par la manière dont les habitants de cette ville sont pris en otage à cause de la faiblesse de nos dirigeants politiques. Mais il ne fallait pas pour autant faire n’importe quoi. Pour que notre action soit efficace et notre mouvement pérenne, nous faisons très attention. Or sur place entre les migrants, les militants No-Borders et les forces de police aussi laxistes avec eux que fermes avec les patriotes, ce n’était pas évident. Je pense que nous avons néanmoins réussi à envoyer un signal fort : si vous refusez de rétablir les frontières nous allons dresser des barricades pour protéger les nôtres. Ce n’est certes pas suffisant, mais comme à Poitiers, nous voulions interpeller l’opinion et donner espoir par l’action à notre camp. Notons également que pour la première fois des cadres politiques du FN ont soutenu publiquement notre action et dénoncé la répression policière gratuite sur nos militants. C’est encourageant.

Sur un plan plus large, nous constatons que les problématiques identitaires sur lesquelles nous travaillons sont malheureusement plus que jamais d’actualité. Cette unanimité était moindre il y a encore quelques années. Mais qui pourrait aujourd’hui décemment condamner notre action de Poitiers avec ce contexte ? C’est peut-être pour cette raison que nous attendons toujours notre procès. L’Etat ne peut pas condamner des lanceurs d’alerte maintenant que nous sommes en guerre contre l’islamisme. Alors il fait traîner les choses depuis 4 ans.

Riposte Laïque : Quatorze jeunes identitaires ont été arrêtés, à Calais. Crains-tu qu’ils subissent le même harcèlement judiciaire que ceux de Poitiers ?

Damien Rieu : Trois de nos militants ont été condamnés à de la prison ferme pour des motifs totalement fantaisistes. En effet, nous avons résisté pacifiquement malgré un usage de la force gratuit et disproportionné de la part de la police, sous les ordres d’un commissaire de Calais particulièrement (et inutilement) agressif. La justice a donc pour l’instant choisit le camp de la fermeté. Cette position ne me paraît pas tenable en appel, surtout avec les vidéos qui prouvent bien que si poursuites il peut y avoir, c’est de notre part. Dans tous les cas, ces condamnations n’ont fait que renforcer notre détermination et l’indignation de l’opinion. Nous avons reçu énormément de soutien.

Riposte Laïque : Ivan Rioufol vient de publier un livre « La guerre civile qui vient ». Toi qui approche la trentaine, penses-tu que ta génération pourra échapper à ce funeste pronostic du journaliste du Figaro ?

Damien Rieu : Je pense que plus personne ne se fait d’illusion sur le futur de la France. Je n’entends plus, même chez les plus extrémistes bobos, de voix nous expliquant “ça va bien se passer vous allez voir”. Tout le monde est conscient que nous allons droit dans le mur, et que le logiciel politique dominant est incapable de nous faire changer de direction. Pour la suite, je suis incapable de faire un pronostic certain. Je ne ferme la porte à aucun scénario. Ce que je sais c’est que dans tous les cas ce sera douloureux. Et je ne m’en réjouis guère. Je ressens en tous cas une polarisation au sein de ma génération. La rupture est totale. Il y a deux camps. Et dans notre société, les quelques déconnectés qui, grâce à leur milieu social ou leur idéologie résistent encore à faire un choix, ne tiendront pas longtemps. Un jeune français de souche sur deux vote FN. Le différentiel avec les aînés est impressionnant. Je ne sais pas ce qui vient, mais ça vient.

Riposte Laïque : Que penses-tu de l’apparente passivité des Français, après les attentats de Charlie Hebdo et du Bataclan ?

Damien Rieu : Je pense qu’ils sont surtout tétanisés. La peur c’était pour les autres. Ils voient bien le problème mais ne savent pas encore comment réagir. On est dans une phase de questionnement et de désillusion. La pression médiatique et le politiquement correct retardent et anesthésient encore un peu. Mais les Français ont changé de cap, c’est le plus important.

Riposte Laïque : Quel est ton regard sur l’état d’urgence, et la politique socialiste, depuis ces assassinats de masse ?

Damien Rieu : Comme l’explique un ancien directeur des RG, l’état d’urgence est une mesure totalement inutile. C’est cosmétique. On rassure, on se montre. Mais cela mobilise des forces importantes qui seraient plus utiles dans l’action qu’en cibles.

Prendre des mesures efficaces serait renoncer au dogme de la bien-pensance. C’est en train de se faire progressivement. Un pas en avant deux pas en arrière sur la déchéance de la nationalité par exemple. J’ai bien peur que l’Etat n’attende les prochains massacres pour enfin réagir comme il faut. Pourtant nous savons tous que les mesures sont faciles à mettre en place. Notre ennemi n’est fort que de notre faiblesse morale et psychologique.

Riposte Laïque : Penses-tu qu’en 2017, une victoire patriote soit possible, et qu’il puisse y avoir, dans ce cas, une transition démocratique ?

Damien Rieu : Il est à mon avis trop tôt pour se prononcer. La victoire face à un candidat du système tel que Juppé me paraît quasi-impossible. Tout va donc dépendre de qui sera l’adversaire au second tour. Du contexte sécuritaire peut-être. Mais aussi de la stratégie, de la capacité, et de la crédibilité du FN qui doit se battre contre le Goliath de la désinformation et les mensonges de ses adversaires. Dans tous les cas, gardons espoir. Tout ne fait que commencer.

Propos recueillis par Pierre Cassen