Ukraine : le grand bal des faux-culs progressistes

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En France, la machine médiatique à émouvoir – et à décerveler – tourne à plein régime. Elle sature les écrans d’images de bombes qui explosent, d’équipements détruits, de populations apeurées qui fuient. Les faits sont tragiques. Mais devant la tragédie, les médias ne pensent pas, ils font pleurer… Ils ne savent rien faire d’autre.

Chacun connaît, pour l’avoir l’entendu répétée partout et par tous, la fameuse saillie de Marx, Karl Marx, dans Le 18 Brumaire de Louis-Napoléon Bonaparte (1852) : « Tous les grands faits et les grands personnages de l’histoire universelle adviennent pour ainsi dire deux fois, la première fois comme tragédie, la seconde fois comme farce ». En Ukraine, l’histoire advient non pas deux fois, mais un nombre x et quasiment infini de fois, et chaque fois qu’elle se répète, ce n’est ni une comédie, ni une farce, ni un opéra bouffe, ni une opérette, même pas une tragi-comédie, mais une bonne et vraie tragédie. Les journaleux oublient, sans doute parce qu’ils ne l’ont jamais su (à Sciences sur le Pot, il n’est question que de genre ou de race), que l’Ukraine est un pays martyr. Les événements actuels se sont déjà produits x fois, sur le même mode tragique. Et pendant un siècle, les Élites d’Occident, les Progressistes et surtout la Gauche ont fait silence sur les malheurs ukrainiens.

La première fois, ce fut après février 1917 quand l’empire russe s’est disloqué, après que le tsar Nicolas II a renoncé à exercer le pouvoir. L’Ukraine s’est détachée de cet empire ; le journaliste et écrivain Simon Petlioura a fondé en 1918 la République d’Ukraine qui a duré à peine deux ans, jusqu’à ce que l’Armée rouge dirigée par Trotski n’oblige l’Ukraine à retrouver le giron impérial, rebaptisé URSS. Petlioura s’est réfugié en France, où il a été assassiné en 1926. Son assassin, un juif de nationalité néerlandaise, a été arrêté : c’était un agent soviétique. Son procès a eu lieu l’année suivante. L’assassin a reconnu les faits, mais les jurés, soigneusement choisis par la défense, l’ont acquitté au motif que Petlioura était ou aurait été antisémite et aurait organisé des pogroms quand il commandait l’armée républicaine. Tout cela n’est que pur montage des services soviétiques, qui ont trouvé des alliés chez les cocos (évidemment) et parmi les hommes de Progrès dont l’avocat Torrès, le futur mentor de Badinter, et la Ligue contre les Pogroms, esquisse de la future LICA, puis LICRA. Ce fut un déni de droit.

Revenue dans le giron impérial, l’Ukraine a subi un nouveau martyr entre 1931 et 1933, que les Ukrainiens nomment Holodomor (la Shoah paysanne) qui a fait entre 3 et 6 millions de morts : certains disent même 10 millions. Les Progressistes, la Gauche, les Élites ont réagi comme à leur habitude : faux, mensonges, désinformation. Si le mot fake news avait été à la mode, ils l’auraient prononcé. Même le correspondant à Moscou du très démocrate et très progressiste New-York Times a nié qu’il y eût famine et nié encore plus fermement que la famine eût été organisée. Le radical socialiste Herriot en visite en Ukraine n’a rien vu, rien voulu voir et a très pieusement fermé les yeux – ce qui est fort de café pour un anticlérical forcené.

Personne ne dit mot, tout le monde consent : le martyre peut se poursuivre. Ce sont les fameuses purges dites staliniennes qui ont fait entre 1 à 2 millions de victimes entre 1936 et 1938. Les purges (balle dans la tête ou deux décennies au Goulag) ont touché pour l’essentiel les populations vivant dans les marges de l’Empire soviétique : des citoyens soviétiques, certes (la citoyenneté ne servait à rien), mais de nationalité non russe, id est ukrainienne, biélorusse, balte, polonaise… Ainsi, des centaines de milliers d’Ukrainiens soupçonnés de nationalisme sont passés de vie à trépas ou sont allés mourir à petit feu en Sibérie arctique.

L’Histoire, avec une grande H, a poursuivi son œuvre de mort. En 1941, des Ukrainiens (des et non pas les) ont accueilli les Allemands en libérateurs : on peut les comprendre. Certains sont même allés combattre avec eux contre les Soviétiques, qui martyrisaient leur peuple depuis 1918. Le bilan des morts ukrainiens pendant cette guerre mondiale est l’un des plus élevés qui soit : 8 millions de morts. Personne, en Europe, n’a versé de larme sur la tragédie qu’ils avaient vécue.

En 1946, Victor Kravchenko, né en Ukraine, publie un témoignage poignant, courageux, admirable : J’ai choisi la liberté. Immédiatement, il est diffamé par les progressistes de L’Humanité et des Lettres françaises : menteur, falsificateur, espion au profit des USA, etc. Vous connaissez la chanson. Eux aussi, en 1949, bien avant Poutine, ils dénazifiaient la France et luttaient pour que les Français ne soient pas génocidés par les Ricains. Dans son livre, Kravchenko témoigne de la Shoah ukrainienne : haro sur le baudet ! Tout ce que la Gauche comptait alors de bien-pensants s’est ligué contre lui. Les asservis ont fait front commun contre l’Homme Libre.

Un siècle durant, la Gauche et les hommes (et femmes bien sûr) de Progrès, les Élites ont pris parti pour l’asservissement de l’Ukraine. Et ce sont les mêmes qui, aujourd’hui, vautrés devant la télé, retournent leur veste. En Ukraine, ils vénèrent le patriotisme qu’ils haïssent en France et en Europe ; en Ukraine, ils adorent un nationalisme qu’ils abhorrent en France. S’il est tricolore, le drapeau leur fait horreur, mais ils s’en couvrent s’il est bicolore. Ils font la guerre à la guerre, mais ils appellent à une guerre contre la Russie, quitte à risquer l’apocalypse.

Le conflit entre la Russie et l’Ukraine est séculaire. À quatre reprises au XXe siècle, les coups de knout ont obligé les Ukrainiens à courber l’échine : cela a mis en joie les hommes (et les femmes) de Progrès et de Gauche. La roue tourne. Une chose a changé : les Ukrainiens ont résolu de ne céder à l’ennemi aucun pouce de terrain. Puissent les Français prendre exemple sur eux, quitte à déplaire aux Progressistes, à la Gauche, aux Élites.

Etienne Dolet