Un dessinateur ose se moquer de Taubira : le Mrap le traîne à la 17e chambre !

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Il fut un temps, pas si lointain, où la France se riait des caricatures politiques et des dessins satiriques, une tradition très française dont elle était friande. En effet, jusqu’à il y a peu, les politiques se voyaient dépeints comme un bestiaire selon les traits physiques ou de caractère qui s’en rapprochaient le plus, afin que tout un chacun puisse facilement les reconnaître. Ainsi le Bêbête Show de Stéphane Collaro a t-il fait les grandes heures de TF1 sans que cela à l’époque ne prête à censure.

Le dessin satirique est utilisé depuis plusieurs siècles pour critiquer le roi ou plus généralement le politique qui commet des actions nuisibles au peuple, et constitue une forme de vengeance bon enfant, un exutoire sain et nécessaire pour n’avoir pas à utiliser de méthode plus radicale envers les ennemis du peuple.

"Comme il est laid" se dit le singe en regardant l'homme
“Comme il est laid” se dit le singe en regardant l’homme

Bref, c’est une tradition française, hexagonale. Prétendre nous en priver relève de la volonté de déculturation et du rejet de nos traditions. Et plus grave encore, cela contrevient gravement à notre liberté d’expression.

La Révolution de 1789 a été d’ailleurs un véritable vecteur de la caricature politique prenant dès lors le chemin d’une diffusion industrialisée. Croquer les politiques est donc pleinement compatible avec la défense des « valeurs républicaines », terme fourre-tout dont on nous rebat sans cesse les oreilles, mais qu’il faut bien, à un moment donné, faire coïncider avec les actes.

N’écoutant que son art de la moquerie et du contre-pied, David Miège, dessinateur de son état, a tout naturellement suivi l’actualité du moment, entre bananes et ananas, délires simiesques et autres grandes farces médiatiques, de Dieudonné et Hollande à Taubira. Dieudonné qui, soit dit en passant, a lui-même singé le gorille en soutien à Anne-Sophie Leclère condamnée à 9 mois de prison et 50 000 euros d’amende pour avoir simplement diffusé une photo montrant un joli petit singe accolée à celle de la Garde des Sceaux. Voilà qui fait tout de même cher l’image, surtout quand on voit que des agresseurs racistes s’en prennent beaucoup moins. Dans l’échelle des délits, pour la nouvelle « justice » française, il est donc comparativement moins grave de torturer un étudiant parce que blanc de peau que de diffuser une photographie de singe sur le net…

Le dessinateur, soucieux de souligner l’étrangeté de tous ces faits et la volonté de censure de Mme Taubira, s’était ingénié à dessiner un petit singe pleurant à côté de son avocat, lequel expliquait que son client portait plainte pour avoir été odieusement caricaturé en Mme Taubira.

Il explique d’ailleurs aimer les animaux, tous les animaux, à qui il donne la parole comme un ventriloque fait parler ses marionnettes.

Le MRAP, égal à lui-même et désireux de se remplir les poches, a bien évidemment porté plainte pour racisme, ce qu’il n’aurait certainement pas fait si au lieu du singe c’est une cigogne ou une girafe qui avait été représentée. Preuve donc que tous les animaux ne se valent pas. Le MRAP n’aurait pas davantage réagi si le petit singe avait porté plainte contre Martine Aubry, Ségolène Royal ou je ne sais qui d’autre. On peut donc s’étonner de cette indignation particulière à s’émouvoir de ce que le dessinateur a associé cet animal précis avec cette personne précise. Que faut-il en conclure sur le fond de la pensée des membres de cette association ? Est-ce que dans leur tête, l’association des deux personnages a un sens précis que n’aurait pas eu celle d’autres personnages ? Finalement, n’est-ce pas eux qui ont un problème de racisme refoulé ?

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David Miège a dû répondre de son dessin devant la police judiciaire en avril dernier et se retrouve aujourd’hui en correctionnelle pour – tenez-vous bien – s’être « rendu complice du délit d’injure publique envers une personne, Mme Christiane Taubira, à raison de son origine, ou de son appartenance, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ».

Et réjouissez-vous, braves gens, tout cela avec votre pognon !

Ce qui est extraordinaire dans cette accusation c’est que c’est la justice elle-même qui fait l’association entre les origines de Mme Taubira et le petit singe du dessin, et qui insulte du même coup la ministre ! Le dessinateur ne faisait que se moquer d’un fait d’actualité qui faisait le buzz, rien de plus.

A côté de cela, le dessinateur Charb, qui sévit dans Charlie Hebdo et qui a lui aussi représenté Mme Taubira à côté d’un singe, n’a pas subi les foudres du MRAP, ce serial-censeur décidément très sélectif dans le choix de ses proies.

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David Miège n’a pas le droit d’associer singe et Taubira parce que c’est raciste. En revanche, Charb, lui, a le droit

Notre pays est devenu une dictature qui ne dit pas son nom – pour cause de censure aussi probablement – mais dont les actes politiques montrent chaque jour un peu plus l’étau qui se resserre autour de nous, trahissant sans vergogne l’article le plus précieux de notre constitution, celui qui protège notre liberté d’opinion et notre droit à l’exprimer. Et ces dictateurs fourbes et avides ont le culot de nous vendre encore leurs salades sur les « valeurs républicaines » qui nous donnent désormais envie de vomir sur leurs godasses.

Pour la petite histoire concernant cette funeste association, on se rappellera de l’alerte donnée par Jean Ferrat en 2006 lorsque, se désolidarisant de ce mouvement suite à l’affaire des caricatures de Mahomet publiées par France Soir et qui avait valu une plainte au journal, le chanteur avait pris parti pour France Soir et contre le MRAP, et s’en expliquait ainsi : « Je trouve la position du MRAP extrêmement grave pour notre mouvement et au delà pour l’avenir de notre démocratie laïque. Je me vois donc forcé de me désolidariser entièrement de cette position et de cette action et de le faire savoir publiquement. A mon très grand regret ».

J’aurai toujours plus confiance dans un petit singe comme celui de Miège que dans un seul de ces humains-là.

David Miège entrera au Panthéon des victimes de la « toute puissante » 17e Chambre le 24 septembre prochain. Bien entendu, un soutien est absolument nécessaire, pour lui et par delà, pour nous tous.

Caroline Alamachère

NB : Si vous souhaitez soutenir David Miège, c’est ici : https://entraide-paysreels.nationbuilder.com/soutenons_mi_ge_et_la_libert_d_expression

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