Yann Moix ? Juste un enfant du siècle

“L’affaire Moix” est emblématique de l’extrême désordre de la pensée dans la France des affairistes, des sangsues et des truqueurs cliniques.

Yann Moix donc. L’homme en imposa à sa clientèle par la violence de ses attaques, le désarroi de ses victimes et la complice compassion, affichée, de ses hébergeurs. Une bête de plateau, au centre même du grand cirque audiovisuel, un rétiaire habile à manier son filet : laissant venir la proie, tournant autour, œil assassin et bouche fermée, évaluant plus ou moins longuement le moment de l’attaque avant de lancer son cri en même temps que son piège.

Un gladiateur

Dans la Rome des arènes, certains, qui avaient beaucoup tué pour survivre, devinrent fameux, esclaves affranchis puis citoyens respectés, craints même. Ils n’avaient plus de passé, juste le droit de finir leur vie tranquillement, loin des lieux où coulaient, mêlés, le sang des fauves et celui des hommes.

Yann Moix, clone parmi d’autres de ces tueurs-là, risque bien de ne pas vraiment connaître la destinée que réserve aux plus malins, aux plus tenaces, aux plus intelligents, le maniement des divers outils de la communication moderne. Un passé lourd comme une ombre de sumo l’a rejoint, qui aujourd’hui l’escorte comme le frelon, le cueilleur de fruits blets sur le chemin de la décharge. Ces fantômes-là, qui bourdonnent et piquent méchamment, sont encombrants.

Adieu la jolie petite stratégie éditoriale si bien mariée aux manières de l’époque. Mensonge et calomnie bien dosés, étalages de quelques bas morceaux  plus ou moins faisandés, senteurs et remugles censés attirer l’amateur de ce genre de barbaque. Tout, jusqu’à l’achat programmé de la critique-qui-compte, était en place pour le triomphe, et puis…

Et puis rien. Du pitoyable et de l’abject, du gaz qui fait pincer le nez et de cette matière dont on engraisse ici ou là les maraîchages.

Et le dernier éboueur, assorti : l’inévitable BHL, commis en suaires et catafalques, grand manipulateur de denrées périssables, traqueur de tyrans arabes et riche à se monter une écurie romaine.

C’est là toute la différence entre le prolétaire-spadassin commis aux chausses-trappes nocturnes et le bourgeois-commanditaire bien planqué, suffisamment puissant pour s’épargner les ennuis de son double.

Jean Sobieski